César dans l’arène.

yl5

Histoire vraie



    Les unes de la presse espagnole se sont montrées unanimes à blâmer un pareil spectacle, et le ministre de l'intérieur saisi, a décidé depuis d'en interdire toute nouvelle organisation.

 En ce jour de la fête de la reine, la foule se presse dans les nouvelles arènes de Saint-Sébastien, cette pittoresque ville, particulièrement pavoisée pour l'occasion.
   En cette année 1904, pour corser le spectacle déjà passablement émouvant, les concessionnaires de l'enceinte avaient programmé une lutte sensationnelle entre un tigre royal du Bengale, acheté à Marseille, nommé César, et Huròn un des plus courageux taureaux de l'élevage hispanique.
   Plus de douze mille personnes assistaient à ce duel inédit depuis l'antiquité, confrontation qu'on pensait être des plus sérieuses.
   Au milieu de la piste, on installa une cage d'un diamètre de quinze mètres à la manière des cirques, où attendait le taureau rejoint bientôt par le tigre.

Tout d'abord les deux s'observent, la foule impatiente se manifeste bruyamment  pour les exciter, alors le taureau charge tête baissée, mais juste avant l'impact le tigre se retourne et s'accroche toutes griffes et dents sorties, au poitrail du chargeur, qui le traîne au sol.

L'assaut dure à peine deux minutes jusqu'au moment ou Huròn se débarrasse de l'étreinte des griffes et dents du chargé, aussi agaçante que  les banderilles traditionnelles. Le tigre ensuite se dérobe, s'enfuit puis s'aplatit sur le sable au ras des grilles, échappant de cette façon au bovin maladroit, furieux d'encorner le vide, mais arrivant malgré tout à le piétiner telle une belle descente de lit. Lassé, l'assaillant recule tout en restant menaçant, attendant une réaction de l'allongé.

A coup d'épieu au travers des barreaux, on força alors le tigre à se relever, une seconde fois le taureau charge dérouillant même quelques barreaux corrodés, sans toutefois toucher sérieusement le félin, roi de l'esquive statique.

On eut recours après vainement aux fusées, aux pétards aveuglants pour énerver l'empereur, mais sans aucun résultat.

Le spectacle de la férocité n'est plus alors dans la cage, mais tout autour, chez les humains. Car outre les cris vociférés par l'assistance assoiffée de sang, de téméraires assistants improvisés descendus des tribunes rouent de coups le félin, qui se décide à se redresser, le taureau alors se précipite sur lui, le rate une nouvelle fois et échoue sur les barreaux de l'accès. Sous la violence du choc, la porte de la cage cède libérant dans les arènes les lutteurs.

 A cette vue, le public devenu subitement moins téméraire s'affole, c'est un sauve-qui-peut général, une bousculade indescriptible résonne dans les gradins.

  Cependant le tigre s'étend sur le sable, inerte, trop secoué pour avancer, le taureau alors s'en désintéresse, parcourt l'arène et blesse deux ou trois spectateurs qui s'y sont aventurés.

  Pour toute personne de sang-froid, il n'y aucun danger à redouter, mais la panique et la peur s'emparent aussi des miqueletes présents, le mauser au poing.  

  Dix coups, vingt coups partent en quelques secondes vers les animaux, tandis des spectateurs armés se joignent à la pétarade à coups de revolver. 

Des balles perdues ricochent sur les fers de la cage et vont blesser plusieurs personnes, dont quelques-unes très grièvement.

  Le tigre, une fois abattu, des scènes d'une sauvagerie inouïe se sont produites. Une foule en délire s'est ruée dans l'arène et en quelques instants a mis en pièces la dépouille du tigre, c'était à qui couperait un morceau du fauve transformé rapidement en bouillie de viande, pour garder un souvenir de cette "fête".

Le tableau de chasse est impressionnant car outre César et Huròn ; M. Lizariturry, un français originaire de Saint-Jean-de-Luz expire quelques heures plus tard à l'hôpital, environné d'une cinquantaine de blessés par balles relevés après coup.

  • Je ne comprends même pas qu’une telle idée ait pu être autorisée. Maintenant j’ai renoncé, depuis bien longtemps, à essayer de comprendre les hommes.

    · Il y a presque 5 ans ·
    Photo rv livre

    Hervé Lénervé

    • Les organisateurs voulaient faire comme les Romains et de tout temps les "gens" veulent du sangsationnel !

      · Il y a presque 5 ans ·
      30ansagathe orig

      yl5

  • Très justement classé dans horreur, la bêtise humaine est si grande, merci yl5

    · Il y a presque 5 ans ·
    W

    marielesmots

  • Bravo à Huron qui a vaillamment résisté, et bravo aussi à César qui, certes tigre pusillanime face au taureau n'en a pas moins montré son humanité face à une foule barbare digne des jeux du cirque sous Rome...

    · Il y a presque 5 ans ·
    P1000170 195

    arthur-roubignolle

  • Vain Dieu ! La corrida est encore là 115 ans après ! Et quand on essaie (j'ai essayé !) d'expliquer à un fan de corrida que c'est une monstruosité, la réponse est toute de violence: "ma non tu comprends rien, c'est culture !"

    · Il y a presque 5 ans ·
    Oiseau... 300

    astrov

    • Animal, on est mal sur Terre !

      · Il y a presque 5 ans ·
      30ansagathe orig

      yl5

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