C'était l'été
aile68
C'était l'été près des rosiers de mon enfance. La chaleur nous enveloppait, elle était comme suave, langoureuse, c'était une heure où tout était calme, comme souvent dans ce coin isolé, les abeilles nous faisaient peur d'habitude, on parlait doucement pour ne pas les effrayer. Il y avait Isabelle, ma soeur et moi, je n'avais pas l'habitude d'être avec elles quand je passais mes journées dehors mais je garde un bon souvenir de ce moment. Isabelle était belle, elle avait le teint olive des Corses, quant à ma soeur il se dégageait de sa personne une saine tranquillité propre aux aînées, c'était quelque chose de léger exempt de toutes préoccupations existentielles. Moi j'étais la petite soeur, j'étais bien avec les grandes près des rosiers, les abeilles allaient de rose en rose sans s'occuper de nous. On parlait je ne sais plus de quoi, c'est si loin, ma soeur souriait toujours tranquille, sa copine avait l'air sérieux, moi je profitais de ce bon moment, à tel point que je m'en souviens encore. Nous étions seules, il n'y avait personne autour de nous à cet endroit-là, c'est là-haut que ça se passait si on voulait être en compagnie, là-haut sur la placette où grouillaient des dizaines d'enfants d'habitude. Je faisais partie de ces enfants-là, la placette nous offrait un terrain de jeux sans égal. Là, les rosiers ne nous faisaient pas peur, les abeilles vivaient leur vie, à part, sans être dérangées. Au milieu de notre placette il y avait le grand, le majestueux, sympathique saule-pleureur, et un terrain troué par endroit pour jouer aux billes. Mes souvenirs de cet endroit-là, un paradis plein de vie le plus souvent, s'effilochent avec le temps, je m'en souviens comme des pièces de puzzles éparses, qui tiennent à deux à trois comme des enfants qui se tiennent par la main.
Les étés étaient longs et chauds mais je me rappelle certains matins frais avec les copines je devais avoir neuf ans, dix ans, Valérie voulait devenir chanteuse, elle écouterait plus tard Jean-Jacques Goldman et puis Renaud, notre poteau. Moi je m'amuserais à parler le verlan et l'argot, j'aimais les inventions de langage.
Voilà... Aujourd'hui Goldman vit à Londres, Renaud dans le Vaucluse, personne des copines et des enfants ne vit plus sur la placette ou près des rosiers aux abeilles folles qui d'habitude me faisaient peur. Je pourrais y retourner, la placette a bien changé, elle n'est plus ce qu'elle était, mais les rosiers de ce coin isolé, sont encore là, oui, je le pense. J'irai me promener un jour jusque là-bas, les souvenirs que j'en ai sont plus proches de moi que tous les rosiers de cette époque-là où l'enfance évoluait telle une abeille tranquille ou au contraire une abeille qui tournait dans tous les sens tel un gyrophare tout affolé.
Une enfance toute rose et je me rappelle aussi les roses dans le jardin abandonné en face de la maison. Les copains, copines dans la petite rue, près de la vieille fontaine...ton enfance se reflète dans la mienne !
· Il y a plus de 3 ans ·J'y suis retournée mais tout a changé, je ne veux plus y aller.
Louve
Merci pour ce si beau commentaire!
· Il y a plus de 3 ans ·aile68
Je partage avec toi cette nostalgie du temps qui passe et qui est passé ! J'avais rédigé, à lire plus entre les lignes, un texte en ce sens que j'avais appelé "L'instant idéal". Ces moments uniques qui impriment en nous l'empreinte d'un instant qui dirigera notre vie.
· Il y a plus de 3 ans ·daniel-m
Je n'ai pas retrouvé ce texte mais tu ne l'as peut-être pas publié ici. Y a des moments qui nous accompagnent dans la vie, c'est bon d'en parler avec ceux qui les ont vécus aussi. Merci à toi daniel.
· Il y a plus de 3 ans ·aile68
http://welovewords.com/documents/linstant-ideal
· Il y a plus de 3 ans ·daniel-m