Chrysanthèmes

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A la Toussaint  tous les vivants se pressent sur les tombes des familles. 

Dans d'incessants balais, les portes des cimetières s'entrouvrent et se referment sur ceux qui entrent et se souviennent.

Les bras chargés de chrysanthèmes, ils inondent les défunts de jaunes d'or ou déclinaisons d'orangers, de mauves variés, de blancs immaculés, de mordorés ou roses thé.

Magnifiques marguerites automnales qui novembre durant composent un patchwork flamboyant recouvrant le granit.

Débauche de couleurs recouvrant les  morts familiers , ravivant les malheurs, les fleurs mettent au jour les pertes de chacun.

L'on tire un arrosoir et l'on frotte la pierre envahi de lichen pour déposer les oboles de pomponettes ou grosses boules désuètes.

Une grand-mère, le père et puis la mère ou l'époux adoré reposent sous la terre et plus triste destin que ses jeunes parents se tenant par la main devant la petite tombe de l'enfant qui n'a pas pu vieillir.

Les pots du souvenir offrent un spectacle aux multiples facettes.  

Petit matin gelé nimbé de brume blanche sublimant les monuments colorés d'un flou de Claude Monet.

Rayons de soleil levant réchauffant les stèles alignées.

Noms incrustés, dates qui s'ajoutent et photos figées en fond de coupes chargées.

Les morts jalonnent nos vies pour les siècles des siècles et puis un jour sans prévenir n'existent plus que dans les généalogies.

A la Toussaint les vivants déposent leurs palettes animées, arrosent les chrysanthèmes de leurs larmes épuisées pour abreuver d'éternité les cœurs de leurs aimés


Tableau de Claude Monet

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