Colline Arc en Ciel
Jean Claude Blanc
Colline Arc en Ciel
Au début y’avait rien, pas un vélo-solex
Pas de BMW, et de montres Rolex
La colline Montreynaud, envahies de broussailles
Pour nos tendres marmailles, c’était champ de bataille
C’était pas les corons, historique crassier
Seulement un mamelon, qui la ville dominait
Le soleil au coucher, venait s’y reposer
Mais de trop s’exposer, son pelage a bronzé
Les chantres du progrès, un jour se sont pointés
Ce joli coin d’azur, fallait le restaurer
La cité du charbon, enfin, dépoussiérée
Enfin viabiliser, ce dôme, enluminé
Mais c’était sans compter sur les manies obscures
Des partisans zélés, qui amochent la nature
Sociologues rêveurs, fanas d’architecture
Ont terni ce joyau, qu’avait bien fière allure
On a bâti en hâte, HLM et clapiers
Pour loger à l’écart, les fauteurs de merdier
On les veut plus en ville, dobermans enragés
Idée géniale, sans doute, ensemble les regrouper
Quand t’arrives à St E, tu peux pas la louper
Mamelles voluptueuse, ivresse de beauté
De la réalité, ce n’est que le reflet
En t’approchant plus près, tu risques de déchanter
On est tellement gavés, de ces cités bétons
La colline Arc en Ciel, en serait l’antithèse
Les faiseurs de rêves, ne sont que maquignons
Ils bradent l’opinion, brassant leur mayonnaise
Pour placer sa pension, un vieux silicosé
Y a laissé ses rentes, et même sa santé
Son appart entouré, de jeunes dégénérés
C’est sûr pour le revendre, il peut toujours chercher
Ne suis pas spécialiste, dans l’art de construire
Faut pas être un génie, pour voir que ça empire
Ce petit bout de France, pourrait être la vitrine
De notre savoir-faire, référence à la mine
Cité aux sept collines, on chante l’harmonie
Mais pourtant c’est la ruine, valeurs à l’agonie
Pourquoi, ils nous oublient, les faiseurs d’avenir
T’as vu la gueule qu’on a, pas près de s’investir
La Colline Arc en Ciel, quel mirifique titre
Mais quand on a dit ça, on a clos le chapitre
La colline inspirée, surtout par trous de nez
Attire le trafic, chacun son LSD
On a détruit la tour, toujours ça de gagné
Y’en qui la prenait pour un triste minaret
Lorsque tombe la nuit, dans ce quartier hanté
Déboulent limousines, tapinent les mousmés
Ce qui est fait, est fait, paysage estropié
N’y a plus que des vieux et des gus pleins de blé
Des commerçants frileux, avares de leur gousset
Et même aux élections, on sait plus quoi voter
A la région Rhône-Alpes, on nous a accolés
Territoire que l’on vante, florissant le progrès
Réduits à notre Loire, St E et ses quartiers
On est des sinistrés, qu’il faut dissimuler
Au début y’avait rien, tout juste grosse bourgade
Peuplée de crèves la faim, descendus des montagnes
Ajoutez à cela, un zeste d’émigrés
Au début s’entendaient, mais la sauce a tourné
On dit qu’on est gagas, comment doit-on le prendre
Imbéciles, bavards, ailleurs, on nous chambre
Mais notre accent subsiste, d’expressions bien tournées
Un autre langage arrive, baragouinant français
La Colline Arc en Ciel, a encore ses fidèles
Mais ses nouveaux croyants, lui pourrissent la vie
Le stéphanois blasé, s’enfuit à tire d’ailes
Reconnais plus sa rue, où jadis a grandi
Comme quoi, faut pas grand-chose, pour salir une ville
La nôtre, a dans le sang, ses ouvriers serviles
Méritait coup de pinceau, et même un poème
Je me suis résigné, lui confier « t’aime quand même »
N’ai toujours pas compris, pourquoi on est maudits
Patrie de Massenet, de Piem, de Lavilliers
Tous sont nés ici, Dasté, Mickey 3 D
On voit que les pochtrons, de foot, avinés
Le musée du design, trop intello, abstrait
On tend aux traines guenilles, le rôle du pauvre diable
Ici on dit « bosseigne », jouant les misérables
Se rouler dans la fange, résignation funeste
Pour marque de référence, Manufrance en détresse
JC Blanc février 2013