Comment Bambi devint un satyre.
rocabar
Comment Bambi devint un satyre.
le synopsis
C’est de l’Amour (oui, oui, avec un grand A…) qui ne veut pas dire son nom, et c’est aussi des envies et des sentiments qui se cachent derrière tout ce qu’il y a de plus trash. Vaudeville dans une backroom, Alix musclor à la cervelle de moineau aime Dean l’ange blond un peu trop con, un peu trop naïf (le pauvre garçon…) et c’est Carole qui tire les ficelles de tout cela, un peu nympho, un peu mytho, et surtout un peu trop amoureuse d’Alix , elle voudrait bien se débarrasser de l’amitié, pour elle aussi avoir sa part de l’appétissant gâteau. Il ne lui échappera pas, ça c’est sûr, elle a mis tous les moyens de son côté pour finir entre ses bras, elle connaît l’histoire, elle n’est pas le genre de fille à renoncer. Ces trois-là, ils s’aiment et se détestent, ils doutent et se posent mille questions, ils se supportent et s’observent, sachant l’équilibre de leurs trois vies précaires ils n’osent s’éloigner l’un de l’autre, et c’est ensemble qu’ils dérivent. Un peu border-line ou l’esprit complètement ravagé, ils ne se laissent guider que par leurs pulsions, leurs envies, leurs sensations, leurs oublis et leurs regrets aussi. Toujours plus haut, toujours plus fort, toujours plus défoncés aussi, toujours un peu plus perdus dans les méandres de leur amour, ils ne sont que des maladroits, ils se dépatouillent, la clope au bec, au milieu des fleurs bleues et des romans à l’eau de rose. Ils vivent du plus ridicule jusqu’à l’irréparable. Puis des secrets ressurgissent, dans les jardins il y a des tombes, un lapin, il s’est passé des choses et in extremis, on redistribue les cartes.
Et l’Amour triomphe…Presque… il faut ajuster.
le début
Un garçon, un tout petit garçon, voilà ce qu’il était redevenu, incapable de la moindre volonté. C’est petit à petit, comme en glissant dans le temps, que toutes ces choses qui l’avaient excitées auparavant s’étaient incrustées dans son cerveau, le dealer avait raison, ses neurones avaient grillées. Ses divagations et ses plaisirs aujourd’hui n’étaient plus que synthétique. Organisé avec régularité, tous les soirs, même ses effets là, il pensait en avoir fait le tour. Son cerveau était tout Tchernobylisé. C’est plus que de stupéfiants dont il a besoin, c’est de sensations dont il a envie. Alors, il avait trouvé, il s’empiffrait de romans à l’eau de rose, de bons sentiments dégoulinants, d’amour triomphant, d’illustrations de couvertures kitsch, de coucher de soleil, de garçons aux cheveux longs et de belles endormies dans leurs bras. Et ça, ça le faisait planer. Il l’aimait bien, son tout nouveau petit monde baigné de rose et de sucres, il lisait ça les yeux exorbités, comme ce soir-là, et les images venaient à lui, comme ça, sans effort, son cerveau, la boîte à fantasmes lancée au galop. Sur sa table, des cachets qu’il n’a pas encore avalés, c’est trois ou quatre qu’ils attrapent, sa bouche parfois semblent vomir les pilules dont pourtant il se gave, ses organes saturent, il avale encore. Il finit, bien entendu, par s’écrouler, les yeux clos, un sourire béat sur le visage. Et un réveil, en sursaut, comme une baffe dans la gueule, l’œil hagard, le regard vitreux, aussi expressif que ceux d’une vache, il essuie d’un revers de main le long filet de bave sur sa joue, et de nouveau, il s’écroule, toujours son sourire d’abruti comme un sticker sur sa bouche.
Ce fut Carole qui aujourd’hui réveilla Alix, jamais le téléphone ne lui sembla sonner si fort. Il se secoua comme un chiot, puis il reprit le livre qu’il avait encore abandonné avant de sombrer,vieux bouquin au papier jauni écrit par une vieille dame kitsch pour de vieilles dames tristes, mais lui le jeune garçon à la beauté triomphante, le prince charmant ou le palefrenier innocent, il y trouvait aussi son compte. Là, voilà, calme toi, tout est fini. Il doit rejoindre Carole. Il est en retard. Il se fera engueuler, encore.
Carole était l’ami d’Alix, du moins tous deux s’accommodaient-ils de cette idée, en réalité, lui n’était que le faire-valoir, elle aimait bien parader avec Alix à son bras, et même s’il se refusait à elle, ce qu’elle faisait semblant de ne pas prendre comme une offense, elle continuait d’entretenir l’illusion. Elle aimait jouer avec lui, s’approprier et disséquer ses sentiments, survoler ses histoires, lui voler son temps, son amour sans qu’il s’en rende compte, comme ça par petites touches impressionnistes et perverses qu’elles distillaient dans chacune de leurs rencontres. Son petit jouet ce soir-là, ce fût ce garçon qu’elle lui présenta, qu’elle avait emmené juste pour le narguer, le chatouiller, l’exciter un peu ou encore le torturer. Mais plus tard, bien plus tard ce sera fini de tous ces petits jeux, elle allait passer aux choses sérieuses. Alors bien sûr il en tomba fou amoureux à l’instant même ou il le vit, ce garçon, comme dans ses livres débiles. Et pour une fois ce fût Carole qui sembla restée sur la touche, ça c’est ce qu’elle voulait qu’il croit, pour l’instant.
Alix et Dean filaient le presque parfait amour, de cet état qui ne dure qu’un temps, tous les deux, ils le savaient, alors ils en profitaient, multipliants ébats et baisers, laissant Carole de son côté, ressasser, avancer et placer ses pions. Et pour une fois, ça avait déraillé, pas prévu comme ça, elle sentait que cela lui avait légèrement échappé. « T’avais pas prévu ça !», ricanaient les yeux d’Alix plantés dans ceux de Carole, sa bouche ventousé à celle de Dean, « Si ça te fait plaisir de penser cela ! », pensait-elle alors, rectifiant déjà le tir dans sa tête.