CONNY

sophiea

Eloge

Conny est mort.

Conrad.

Il était allemand.

Le premier que j'ai rencontré.

Il était le premier amour d'une de mes tantes, un peu le mien aussi. Enfant, je le suivais partout. Il était beau, brillant. Il ressemblait comme deux gouttes d'eau à Gérard Philipe, mon idole.

Il était photographe, écrivain. Avec deux bouts de ficelle et des sacs poubelle, il créait des marionnettes, des cerfs-volants bleutés et comme ils volaient...

Il était ivre de liberté et a toujours mené la vie comme il le souhaitait. Même si c'était dur, même si les fins de mois étaient difficiles.

En vacances, il se levait quand nous passions à table pour le déjeuner. Il trempait ses tartines de kachkéis (cancoillotte luxembourgeoise qu'il apportait avec lui) dans son café au lait pendant que nous mangions notre niçoise... Décalé et sans se faire gronder. Fait rare dans cette famille où tout était planifié à la minute près.

Conny est mort. Il avait 66 ans. Le dernier AVC a fini par nous le voler. Je me souviens de longues conversations, jusqu'au bout de la nuit, où nous refaisions le monde.  Même s'il n'était plus avec ma tante depuis longtemps, il était un ami de la famille. Il avait connu mon père. Il m'avait vu grandir. Il savait la complexité de notre passé.

Conny tu vas beaucoup nous manquer. Repose en paix. Tu l'as bien mérité.

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