Coupable. Chapitre 1 - Partie 2.

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- J'ai bien peur de ne pas vous comprendre mademoiselle, pourquoi cherchez-vous absolument à mourir, à imaginer toutes les façons dont vous pourriez mourir, pourquoi et comment. Pourquoi pensez-vous autant à la mort ? Avez-vous envie de mourir ?

- La question n'est pas là, la question n'est pas de savoir comment je vais mourir, et pourquoi je songe au comment du pourquoi. Tout le monde pense à la mort, au moins une fois, pas vous ? Si, vous aussi. La question n'est pas non plus de savoir si je veux mourir, qui le veux vraiment après tout ? Tout le monde meurt Docteur, tout le monde meurt, il n'y a pas d'exception.

- Pourquoi le suicide mademoiselle ?

- Et pourquoi pas le suicide, docteur ?

Abrutis de médecin, il ne comprend rien, personne ne comprend rien, il n'est pas psy, il ne devrait pas poser autant de questions, je n'aurais pas dû aller le voir non plus, pourquoi y ai-je été d'ailleurs ? Stupidité. Je suis stupide, oui. Mais si je n'avais pas été le voir, j'aurais était coupable de ne pas être aller le voir, coupable de ne pas m'être fait soigner, coupable d'être malade, coupable d'être malade parce que je suis sortie trop ou pas assez vêtue. Coupable de tout, coupable de rien.

Quand je serais morte, je ne serais plus coupable de rien, ou alors, je serais coupable d'être morte, mais, comment pourrais-je être coupable d'être morte alors que tout le monde va mourir un jour. Cela dépendra probablement de la façon dont je vais mourir. Serais-je responsable de la façon dont je vais mourir ? Ignorance, je ne sais pas, je ne sais rien de la mort. Personne ne sait rien, de la mort, ils parlent, ils piaillent, ils ont peur, mais ils ne savent rien.

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- 10, 50 s'vous plait.

- …

- Mademoiselle ?

- Hein, euh oui ?

- 10,50 s'il vous plait.

Rapiat. Non, mais j'y crois pas, c'est quoi cette société de consommation à la con qui vous arrache le peu d'tune que vous avez, juste pour bouffer. Bientôt j'vais devoir payer avec la peau de mes fesses pour me nourrir. Pourquoi doit-on obligatoirement manger pour survivre d'ailleurs ? Quelle belle connerie.

Peut-être que je devrais arrêter de manger, d'acheter à manger, de consommer à manger. Et je serais alors coupable de m'être laissé crever de faim, coupable d'avoir cessé d'acheter et de consommer de la nourriture pour le bien de mon corps, et psychologique, car ça fait du bien à la tête aussi de manger, nous aimons manger.

Peut-être que c'est comme ça, que je vais mourir, un beau matin je me lèverais en décidant de ne plus me nourrir, de ne plus ingérer, de ne plus rien avaler, et je crèverais de faim, mon estomac criera famine, il grignotera dans les réserves qu'il a fait jusqu'à maintenant, puis quand il n'aura plus rien à manger, criera, encore et encore, il finira par se tordre, je ne serais qu'un sac d'os ambulant, ‘fin pas si ambulant que ça, puisque au bout d'un certain laps de temps je ne tiendrais plus debout. Mon corps se desséchera, je ne pourrais plus bouger même ramper, ma peau se desséchera et je serais laide, très laide et je finirai par mourir, là, allongée sur le sol, mon corps en effroyable décomposition.

Et je serais coupable aux yeux des médecins, de ma famille, de mes amis, aux yeux de tous, de m'être laissé crever de faim et dépérir d'une façon si atroce, je serais coupable d'avoir fait le choix de ne plus rien ingérer alors que des tas de gosses en Afrique crèvent la dalle eux aussi parce qu'eux, ne peuvent pas manger. Coupable de tout, coupable de rien.

Coupable. Chapitre 1, seconde partie.

© Entre Aië.