Damnation

« J’aurais voulu être comme tu l’as aimé, comme tu l’as aimé dans sa force et dans ses creux.

 J’aurais voulu être toutes celles qui ont effleuré tes draps, toutes celles qui ont touché ta peau. Le temps d’une nuit. Etre ce que je ne suis pas et ce que je ne serai jamais. Jouer ce qu’elles sont, comme on s’approprie un rôle.

Je t’aurais aimé des orteils aux amygdales, tu sais. Je t’aurais aimé dans tout ce que tu as de plus laid et de plus sombre, comme un cauchemar dont on frissonne mais qui nous tient chaud, comme un mauvais rêve qui nous fait nous sentir un peu moins mort.

Je t’aurais aimé comme le croyant maudit ses pêchés : « Tu seras ma faute, je serai ton pardon »

Je t’aurais aimé comme on n’aime pas, tu m’aurais aimé comme on croit devoir aimer.

On ne se serait pas compris mais on se serait entendu. Des échos qui se suivent sans jamais se répondre. On n’aurait peut-être pas fait bander Shakespeare mais on aurait réécrit l’Amour, dans ce qu’il aurait pu avoir de plus authentique et de plus dangereux.

Peut-être qu’on n’aurait pas aimé comme il le faut mais on aurait aimé comme on aurait vécu, des espoirs plein les yeux et des regrets dans le cœur.

Je t’aurais aimé de toute mon âme et de tout mon corps, jusqu’au dernier souffle.

Dis-moi que toi aussi t’aurais pu m’aimer. »