Dans l'instant et à l'instinct

patacraousette

SYNOPSIS:

Là, sur un banc du Prado elle sanglote avec ce SMS sous les yeux: C fini.

Elle regarde son téléphone les yeux embués, n’arrivant plus à relever la tête. Le néant total dans lequel elle vient de se plonger l'empêche de voir l'homme qui s'est soudainement dressé devant elle.

Au grès de votre lecture, vous... chers lecteurs... allez être certainement très agacés par les nombreux « elle et il ». Ceci est totalement volontaire afin de conserver l'anonymat d'elle et lui, instruments de l'intrigue de cette romance contemporaine . Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existés serait fortuite et indépendante de la volonté des auteurs...

Lui, seul, présent et absent à la fois aperçoit ce banc occupé. Elle se lève quand il veut s'assoir. Elle veut fuir lorsqu'il veut la retenir. Ils se bousculent. Elle replace ses lunettes de soleil. Lui place ses mains sous les coudes de la jeune femme pour la stabiliser. Elle se dégage et souhaite partir.« Tout va bien ? s'inquiète-t-il.

- Non... pas vraiment, se libère-t-elle. Je viens... »

Elle hésite à poursuivre mais elle le fait quand même. « ... de me faire plaquer par l’homme de ma vie, c’est tout.

- Ouh ! Quel programme dites-moi. Bienvenue au club de la détresse sentimentale ! Mais mon histoire est sûrement bien plus compliquée que la vôtre...

- Je ne pense pas non ! Qu’est-ce-que vous en savez ? Comment pouvez-vous juger en un instant ?

- Je perçois malgré l'émotivité que vous semblez vouloir cacher derrière vos grosses lunettes de soleil, une certaine sensibilité. Délectable. Je vous l'avoue. Mais se prendre une veste, reste bien loin d'être la fin du monde, finit-il ».

Elle le regarde tout en se mouchant délicatement dans le Kleenex qu'elle a saisi dans son grand sac à main. Fier de lui et assis confortablement sur le banc public, rictus aux lèvres, il fixe un horizon imaginaire et écoute pousser les fleurs. « Qu’est-ce-que vous regardez ? demande-t-elle.

- Rien. J’attends votre réponse ».

Curieuse, elle se rassoit de côté, un coude sur le dosseret soutenant ainsi sa tête. Il tourne alors son visage et jette ses petits yeux marron qu’il plisse à cause du trop fort ensoleillement, sur cette jeune femme au nez rouge à force d’être trop essuyé. Elle est mal coiffée et même pas maquillée. Elle dégage néanmoins un doux parfum de cosmétique désirable. Ça lui plait. Elle semble plus jeune que lui, peut être d’une dizaine d’année. Jeune, belle en situation de détresse : tout pour continuer de lui plaire. Il croise alors les bras sur sa poitrine, fixe à nouveau le lointain et passe à l'attaque.

Sachez, cher grand public, que nous vous attendrons pour le début de ce roman. Cette romance n'est que le début de la fin de cette histoire. Notre récit se situe dans le sud de la France. Aussi nous avons choisi de l'appréhender par une description relativement théâtrale mais néanmoins réaliste de cette ville de prédilection qui n'est autre que Marseille. Marseille et ses auteurs, Marseille et ses acteurs...

Ah oui ! Selon l'usage l'homme va finir par invité la femme à déjeuner. A l'issue de celui-ci les deux personnages vont résoudre, sans trop le vouloir, une bien sombre et très triste affaire...

Avertissement : Attention, attention ! Cet ouvrage peut heurter la quête émotionnelle des plus avertis en lecture romantique ou autre d'ailleurs ! Pour résumer et faire court: peut heurter la sensibilité inextirpable des intégristes de la syntaxe. Vous voilà avertis !

« Si l'on ne comprend pas l'utilité de l'inutile, l'inutilité de l'utile alors on ne comprend pas l'art... », Notes et contrenotes - Eugène Ionesco -

Le début de la fin:

Par la minuscule croisette du port, ils se dirigent vers le tout petit restaurant offrant une toute petite terrasse sur la mer. Le serveur les installe. Ils décident de se mettre côte à côte, face au spectacle marin. La carte est simple comme le lieu. Le service est joyeux comme auraient pu être ces deux êtres peu radieux. L'apéro les détend. La première quille de rosé bien frais les rend légers, la seconde les assomme. La chaleur devient pesante. Alors qu'ils secouent leurs mains devant leurs visages comme des éventails pour se rafraichir, le serveur intervient: « Et voilà pour... Madame et voici pour... Monsieur, dit-il en déposant sur leur tête un capéu – chapeau en provençal - de paille claire à large bordure ».

Le Soleil castagne fort. « Oh, comme c’est rigolo ! Bon puisque c’est comme ça… le dessert, le dessert, réclame-t-elle ses deux couverts dans les mains.

- Serveur ?! S’il vous plait. Portez nous donc votre carte des desserts, on est tellement bien ici… On ne partira plus vous savez ? Si vous continuez à être aussi prévenant avec nous. Nous allons finir par souper aussi ! Héhé ».

Il étouffe un rot et s’adresse à la jeune femme. « Dis-moi ? et si on se tutoyait ?

- Vouii !! Mais d’abord on trinque ! »

Soudainement, il se lève le verre à la main. Trop soudainement. « Oh pu-tain ! Suis complètement… bou-rré.

- A... a... attend ! arrive-t-elle à exprimer ».

Elle se lève aussi mais se rassoit aussi tôt. « Ah !! Tu vois … Toi aussi t’es complètement… bourrée, se moque-t-il ».

Du haut de son équilibre douteux, ses yeux pensent la regarder. En réalité ils sont fixés juste au dessus d’elle. Sa bouche légèrement entrouverte permet à sa langue dilatée de se disposer sur sa lèvre inférieure.

« Vouais, lui répond-t-elle péniblement ». Accoudée sur une partie de son assiette presque vide, une main appuyée sur sa tempe étirée, elle tente de soutenir sa tête qui semble à ce moment beaucoup trop lourde pour elle. Son autre main pendouille entre ses jambes. « Et si on allait cueillir du thym ? propose-t-il ».

Très surprise. Elle rétracte sa tête telle une tortue peureuse, les sourcils en « V » inversés, elle exprime celle qui ne comprend pas. Elle n'arrive plus vraiment à prononcer quelques consonnes, « Ee te demande pardon ! Du toi ? Euh... du quoi ? hic.

- Du thym !! Vouais. Là bas, lui montre-t-il ».

Les deux membres supérieurs ankylosés, il tourne son tronc désynchronisé plus vite que les bras. Tel un pantin de bois, il lui indique de tout son corps la direction des gros cailloux blancs à gauche du restaurant. Son verre, lui, s’évide sur le sol lorsque dans un dernier effort il tente de le boire. « Oh là là ! suis pas bien épiquée, équipée, rectifie-t-elle tout en appuyant le « Q »… Z’ai pas les auu-ssures… tout terrain… Héhé.

- Tu les enlèves… Bon…On y va ?! »

Talons, pointes, talons pointes, un deux et trois et quatre...C’est ce qu’il tente de faire pour tenir son équilibre. « Pff… m’emmerde avec ton thym, grommèle t-elle. Ssais pas, si zeeuh vais pouvoir…, continue-t-elle en doublant les consonnes et les voyelles maintenant.

- GARCON ! crie t-il car il n’a plus de force pour lever un bras. L’addition siouplaît, conclut-il en oubliant d'articuler ».

Nos deux complices d'alcool, toujours aussi saouls, se retrouvent maintenant tout proche de l'endroit désigné. Le visage rubicond, il l'invite à le suivre.  « Bon… tu grimpes ? »

Les deux mains appuyées sur ses genoux pliés, il attend qu’elle le rejoigne. « Peux pas. Ai mal aux pieds, dit-elle.

- Grouille, allez…y’a des touffes…A-aa bas. Allez… poupée…monte, hurle-t-il tout aussi péniblement que ses tentatives à escalader les rochers pourtant pas si énormes que cela ».

Agrippée à un arbuste par ses deux mains et penchée vers l’arrière, elle tente d’envoyer à plusieurs reprises, une de ses jambes - mais toujours la même – devenues molles, afin de se rendre là haut, elle aussi. Crois moi je vais y arriver. Y arriver seule... - Kaolin - Ouf ! Elle y parvient enfin. Une fois sur l’espace rocailleux elle tente par des opérations d’équilibriste sur un fil imaginaire, de le suivre... ses chaussures dans les mains et son gros sac à main autour du cou. « Attend-moi, A-arrive ! Y ssuis presque ».

En se retournant pour la voir, il tombe de tout son poids sur ses fesses, oubliant de mettre les mains en protection. Les yeux louchant et tout ronds, les joues gonflées d’air qu’il vient d’avaler. Il ne bouge plus. « Ta va ? T’as mal ? l'interroge-t-elle ».

Une fois arrivée à sa hauteur, par-dessus la tête du cul-cassé, elle aperçoit un trou béant à quelques mètres seulement . Intriguée et ne se souciant aucunement de l’état de son nouveau pote, elle continue sa route. Arrivée devant le large puits à ras le sol, elle se jette à terre. « Hé-ho ?! Y’a quelqu’un ? »

L'écho se « punch » à droite et à gauche et comme personne ne lui répond, elle s'approche un peu plus. Quand elle aperçoit: quelque chose... enfin quelqu'un. Loin. En bas. « Hé, chuchote-t-elle. Truc… viens voir, dit-elle en direction... de machin.

- J’ai…MAL… au cul !

- M'en fout ! Viens, insiste-t-elle.

- Peux pas… J’ai mal au cul ! »

Elle se retourne vers la curiosité au fond du gouffre et plisse ses yeux afin de mieux distinguer. Puis elle s'adresse à nouveau à bidule.  « Y’a quelqu’un en bas ».

Les deux mains sous son menton elle regarde toujours vers le bas. « Pff, comment ça... y’a quelqu’un ? Mais il bouge ? demande-t-il

- Ppp, sais pas. Y’a des arbres aussi…en bas.

- Mais qu’est-ce-qu’elle raconte ? Pff m’emmerde celle-là. J’ai mal au cul, marmonne-t-il. PEUX PAS BOUGER !

- Eh ben bouge pas ! Mais moi... je vois ».

Comme animé par une curiosité soudaine il se retourne. Se positionne tel un missionnaire en planque sur les coudes et sur le ventre. Il rampe, escalade maintenant les petits mètres qui le sépare de la jeune femme. « Pousse-toi ! »

Il ouvre grand les yeux. « Fais voir…vois rien !

- Mais si ! Eegarde…làh ! insiste-t-elle son index pointé vers la silhouette.

- Oh pu-tain ! Mais c’est pas un homme…c’est une… Sauvageonne… Héhé… c’est la femme de CAPITAINE CAVERNEUH ! Hahaha.. Ouh ouh ouh, s'esclaffe-t-il ».

Sur le dos maintenant, les deux mains sur son ventre, il est mdr (oui. Oh ça va. Mord de rire). « Mais qu’est-ce-qu’elle fout là ? ajoute-t-il ».

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