Dans mon beau carrosse

Monter dans mon beau carrosse, un gros billet en poche, je me sens la plus riche du royaume. Vêtue d'une robe en jean, je pourrais me croire la plus belle, mais mon miroir m'a dit ce matin que dans la forêt à côté vit une princesse entourée d'amour et d'amitié. Je voudrais la connaître, la rencontrer, voir comme elle est belle et aimée, je ne suis que la pâle ressemblance d'une fleur de lys, mes baskets brillent à mes pieds. Mon beau carrosse tousse, fait des soubresauts, je dois en changer, il ressemble plus à une guimbarde qu'à une rolls. Je ne suis la princesse de personne, je vis dans un vieux conte, une comptine farfelue, ma maison c'est un château en carton. Un troubadour a dit un jour:" La vie est ce que tu en fais...", la frontière est souvent fluctuante entre la réalité et son propre monde, ce qu'on fait de la réalité relève de sa propre subjectivité. Dans mon beau carrosse qui crache et hoquette, j'ai l'air de rien, y a pas foule autour de moi comme pour les vraies princesses. Je ne suis la princesse de personne mais les princesses sont-elles des personnes ou des poupées, de beaux objets dont on use jusqu'à les abandonner tout écartelés et décoiffés comme une harpie ou une Barbie dans un cauchemar. Avec mon gros billet en poche je me sens forte, importante, il me tient chaud comme un baiser, celui qu'on n'a pas su donner et qui nous manque comme un gros gâteau plein de crème. Je le dépenserai avec mes amis, et rentrerai à pied sans mon beau carrosse.