Demain

Matthias Claeys

Réaction à l'attaque de Charlie Hebdo, et aux réactions à l'attaque de Charlie Hebdo.

Nous sommes au demain d'hier. Nous avons vieilli d'un coup.


Les tarés, les lavés du cerveau, qui tuent d'autres personnes parce qu'ils estiment que c'est leur droit, qui tuent d'autres personnes parce qu'elles les ont vexées, qui tuent d'autres personnes parce qu'elles se sont exprimées contre un dogme, qui tuent d'autres personnes parce qu'elles ont dessiné un prophète ou un dieu, et les immondes, les abrutis, qui disent que c'est bien fait pour ces personnes assassinées par ces tarés pour une de ces raisons ou une autre, et celles et ceux qui croient savoir,celles et ceux de bonne foi mais de mauvais conseil, qui disent qu'il faut remettre la peine de mort en place pour ces gens qui tuent ces personnes, et les pourris aussi, les intéressés, qui se disent que c'est un bon coup politique et qu'il faut savoir en tirer avantage, et les affreux, celles et ceux qui ont le cul bien confortablement assis dans leurs idées rances, qui éructent que ceci prouve bien cela, et que les Musulmans c'est rien que des salopards haineux qui assassinent et remplacent les Français avec un putain de F majuscule, qu'ils aillent tous se faire voir. Qu'on en fasse un beau paquet, et qu'on les envoie tous se faire foutre.


Et nous, qui sommes tellement plus nombreux, gardons au coeur les gens qui se sont battus jusqu'au dernier coup de kalachnikov pour la liberté d'expression, pour la liberté de la presse, la liberté de la parole, la liberté de l'acte artistique, la liberté du plus innocent des dessins. Nous qui nous rassemblons et qui crions notre colère et notre désarroi, qui pensons qu'il faut « répondre à la terreur par plus de démocratie, plus d'ouverture et plus de tolérance », gardons en tête nos compatriotes qui ont peur parce qu'ils portent sur leur corps une foi qui leur est nécessaire. Nous qui avons cette affreuse sensation de vide, ce goût d'enterrement, nous qui sommes endeuillés. Nous sommes, par choix, parfois par contingence, les enfants de la liberté. Nous sortons dans les rues dire notre refus de la haine, notre refus de la peur. Nous sommes tristes et dignes, nous somme meurtris et debout, nous avons froid et nous nous réchaufferons. Nous tiendrons bon le rempart avant l'obscurantisme et la barbarie, d'où que les assauts viennent. Il faut croire que nous nous sommes fait des ennemis. Nous ne sommes pas des soldats, nous n'avons pas été élevés à aller à la guerre, et nous n'en voulons pas. Nous ne riposterons que par notre refus de plier. Allons enfants. Allons.




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