Dernière mode à Tripoli

octave-santelli

Marina Valleste


Fille d’un riche industriel Bordelais, Marina était tout naturellement destinée à reprendre la tête des bonnes œuvres de la fondation CEYLAN, créée par son père en marge des activités lucratives de son conglomérat. Mais le caractère de la jeune fille en décida autrement. Depuis qu’elle était en âge de parler, elle montrait une personnalité hors du commun, une sorte de mélange raffiné et pourtant instinctif entre sa sincérité explosive, son goût pour l’action, et sa curiosité dévorante. Elle s’était donc très tôt intéressée à tous les aspects des affaires familiales, et notamment au dessous des cartes que jouait son vieux père, qu’elles soient politiques ou financières. Si bien qu’au sortir de l’adolescence elle en était  convaincue : son moteur ne sera jamais la charité, mais l’envie brulante de jouer son propre jeu.

Plus tard, elle fit à Paris de brillantes études en langues orientales, les seules qui lui offraient un passeport facile pour dépasser les frontières d’un occident vieillissant.

C’est à cette période qu’elle rencontre Clyde Benett, qui se présente comme un chargé de recrutement pour le compte d’une holding basée à Washington. Dès leur premier entretien, Marina sent que le poste qu’on lui propose n’a rien de classique, et que  le destin qu’elle provoque depuis de nombreuses années se joue ici. Elle remarque très vite que ce bureau, sensé être l’antenne parisienne de la compagnie, n’est occupé que très occasionnellement, comme en témoignent les traces très superficielles que le fauteuil de son interlocuteur a laissé dans l’épaisse moquette. Son sens de l’observation et sa curiosité pour le service « information » de la compagnie familiale, lui permettent de détecter rapidement les dispositifs d’écoute, dans le stylo plume négligemment posé sur le bureau de verre, et dans l’anse de la tasse de café que l'homme lui a servi. Rien n’a été laissé au hasard, et elle perçoit jusque dans les questions de cet inconnu que l’entretien n’a pas pour but de faire connaissance.  Faisant taire le peu de doute qui lui reste, elle prend alors les devants : « vous recevez des directives en ce moment même, ce Smartphone que vous consultez d’un œil distrait ne donne pas que l’heure » ironise-t-elle. « Vous ne me décevez pas, répondit-il placidement. Nous enquêtons sur vous depuis plus d’un an, et les missions que nous pourrions vous confier sont assez éloignées de la traduction. Si vous acceptez ce poste, vous partez dès ce soir pour Al-Oudeid dans l’émirat du Qatar, où vous suivrez un entrainement pour préparer vos affectations à venir. Je serai votre agent de liaison, et la seule personne de l’agence que vous rencontrerez officiellement. La CIA couvrira l’ensemble de vos besoins matériels tant que vous nous appartenez, et vous pourrez rester en contact avec les proches figurant sur cette liste». « Je n’y vois pas mon meilleur ami » dit Marina avec une naïveté surjouée… Et Clyde de lui répondre dans un large sourire : « ça, c’est ma nouvelle affectation ».

Synopsis

De cette année d’entrainement au Qatar, la jeune Marina était sortie métamorphosée. Ses traits encore enfantins de jeune fille en fin d’études avaient laissés place à une certaine dureté, imperceptible, qu’elle savait dissimuler à loisir derrière son sourire faussement candide et ses grands yeux clairs, aux éclats émeraudes. Les courbures des son corps, auparavant assouplies par des années de « sport » cérébral en bibliothèque, s’étaient changées en lignes rebondies, qui laissaient deviner sous un jean ou une chemise les rondeurs fermes d’une silhouette affutée. Mais c’est l’exceptionnelle assurance de son caractère, sa résistance inégalée aux plus cruelles mises à l’épreuve psychologiques, et l’ascendant qu’elle avait ainsi acquis sur ses rivaux hommes ou femmes, qui avaient décidé ses supérieurs à lui offrir le poste tant convoité de l’agent spécial Malko Linge.

Et son baptême du feu n’allait pas être une simple mise en jambe. Cet été de l’année 2008 est marqué par un incident diplomatique, qui aurait pu rester anecdotique s’il n’impliquait pas la bouillonnante famille Kadhafi. Hannibal, le fils du dirigeant Libyen, est signalé à la police Genevoise pour mauvais traitements sur ses domestiques. Les informateurs de la CIA pressentent que les autorités Suisses ne  mesurent pas les conséquences possibles de leur entêtement, et l’agent Marina Valleste est dépêché sur place pour apaiser la crise naissante. Par d’habiles manœuvres, elle parvient à convaincre les autorités locales d’en rester là, mais au dernier moment un juge Suisse indépendant ordonne, contre l’avis du ministère, l’arrestation d’Hannibal. Dès lors, Mouammar Kadhafi retrouve ses reflexes de chef de guerre guidé par le sens de l’honneur, et laisse de côté toutes considérations diplomatiques ou économiques, pour méditer une vengeance qui lui coutera probablement son trône : retirer ses avoirs placés en Suisse, et surtout couper l’approvisionnement en pétrole des compagnies Helvétiques. La mission de Marina prend alors une tournure moins feutrée : la plus grande raffinerie d’Europe, Petrolplus holding, est enregistrée à la bourse de Zurich, et appartient au groupe Carlyle,  une entité hautement stratégique pour les intérêts américains, puisqu’elle investit massivement à l’international dans l’aéronautique, les transports, les médias, les télécommunications, ou encore l’énergie. Et quand l’ancien directeur de la CIA, aujourd’hui à la tête de Carlyle, demande une faveur aux services du renseignement, il n’est dans l’intérêt de personne de lui refuser : Kadhafi doit quitter le pouvoir. Marina est alors envoyé à Tripoli, pour obtenir des renseignements sur les forces en présence, et procéder à quelques éliminations stratégiques.

Sur place, elle rencontre Mustapha Abu Jalil, le ministre de la justice Libyenne. Il subit depuis qu’il est en poste les vexations du clan familial, pour qui la justice est soumise à leur seul bon vouloir. Elle n’a aucun mal à le « retourner » en lui faisant miroiter une place de leader populaire, que ses talents d’orateur obtiendront facilement auprès des tribus de l’est, déjà lésées par la révolution Libyenne. Mais l’objectif de Marina est ailleurs : par l’intermédiaire de Mustapha, elle veut en savoir plus sur les faiblesses du général Abdul Fatah Younes, ministre de l’intérieur et chef de la police politique du régime. Mais son enquête montre qu’aucune n’est exploitable, car l’homme est inattaquable tant qu’il a pour lui la confiance de Mouammar Kadhafi. Et c’est donc là qu’il faut frapper, en exploitant à son avantage les accès de paranoïa du dictateur. Marina s’engage alors dans une mission de manipulation des services de renseignement du régime, qui a comme point d’orgue un entretien particulier avec sa cible. Elle parvient à organiser une rencontre avec le ministre dans les salons particuliers d’un hôtel du centre de Tripoli, sous le prétexte fallacieux d’un contrat d’armement avec la défense américaine. Quand elle abat ses cartes, l’effet de surprise est total : le général apprend qu’il sera emmené et exécuté par l’armée Libyenne dans les prochaines minutes. Il est accusé de haute trahison envers le régime, qui a en sa possession les fausses preuves que Marina elle-même a fabriqué et diffusé. Son seul espoir est de quitter Tripoli dans la minute, pour diriger militairement le soulèvement qui se prépare à Benghazi, la « capitale » de l’est du pays. Le général met d’abord en doute la solidité du plan de la jeune femme, mais doit finalement se rendre à l’évidence quand les premiers coups de feu sont échangés à l’extérieur de l’hôtel, entre sa garde rapprochée et l’armée régulière du régime.

Ainsi, un gouvernement alternatif est prêt à prendre la tête du pays. Mais il reste à Marina une ultime mission : éliminer physiquement le colonel Kadhafi. Après avoir étudié toutes les options, elle choisi de piéger le seul accessoire du dictateur qu’il fait systématiquement importer depuis l’occident : ses lunettes de soleil…

Passion

Les rues de Tripoli étaient bondées en ce début de soirée. Une population presque exclusivement masculine devisait le long des échoppes, et Marina passait difficilement aperçu, contrairement à l’homme qui la suivait. Depuis quelques minutes déjà, elle avait senti sa présence, comme on peut sentir se poser un regard  trop insistant. Sachant qu’il n’y aurait aucun échange de coup de feu dans une rue bondée, Marina était décidée à confronter ce grand brun au bouc précis, dont la corpulence musculeuse ne l’effrayait  pas. Déviant son chemin de l’artère principale, elle emprunta alors une ruelle étroite, puis une seconde, et finit par attendre l’homme au détour d’une troisième. Son pas régulier s’approchait sans hâte, et Marina ne pouvait retenir l’adrénaline de couler dans ses veines. L’homme était maintenant à un pas de la jeune fille. Sans hésiter, elle prit appui sur sa jambe gauche pour envoyer le genou droit à hauteur de sa virilité. Une coquille ! Elle ressentit une vive douleur au contact de cette protection d’acier, et en quelques mouvements, l’homme l’avait plaquée au mur, posant brutalement le tranchant de sa main contre sa gorge. Elle était désarmée, et sous la menace du couteau qu’il agitait maintenant sous son visage, elle laissa l’homme lui lier les deux mains dans le dos par une attache de plastique cranté. Comme pour jauger de ses chances d’en réchapper, elle plongea son regard de braise au fond des yeux de l’assaillant. Elle vit un éclair de fébrilité, auquel elle répondit immédiatement par un coup de langue dans le vide, accompagné d’un regard aguicheur. Le grand brun céda dans un souffle rauque, et plongea brutalement dans cette invitation, en remontant d’une main ferme la robe de la jeune femme. Le contrecoup de cette brève lutte et l’ardeur de l’inconnu qui fouillait sa culotte, la fit haleter de plaisir. L’homme chuchota quelques mots salaces en Libyen, et déchira la culotte de Marina d’un coup de couteau sur l’élastique. Elle brulait de désir, et alors qu’elle sentait glisser le lambeau de tissu le long de ses jambes, l’homme sorti de son pantalon un sexe massif et turgescent. Un bras puissant entourait la taille de l’agent spécial, et d’un geste l’arabe la souleva pour la plaquer contre le mur. Ses jambes entouraient maintenant l’assaillant, et son vagin était déjà trempé quand elle sentit ce sexe large entrer en elle. Les frissons qui parcouraient la colonne de Marina étaient comme chargés d’électricité et elle donnait des coups de bassin pour baiser cette verge large et rigide. Elle savait pourtant qu’il ne faudrait plus très longtemps pour que se décroche la lame tranchante dissimulée dans son épais chignon, et qu’elle glisse le long de son dos jusqu’à ses mains toujours liées. Malgré ses efforts intenses de concentration, elle sentait son ventre emporté par une chaleur brulante pendant que s’accéléraient les coups de reins du puissant Libyen. Ils allaient jouir ensemble, c’était inéluctable. Mais à l’instant où se dissipera le voile de plaisir qui embrumait leur esprit, Marina aura les mains libres, et une lame affutée…

Action

« Vous n’avez aucune idée de la confiance que le guide suprême a placé en moi ! Quelle naïveté ! Croire que vous pouvez me faire exécuter sur quelques fausses évidences ! Moi ! Le chef de sa police militaire ! » Le vieux général s’agitait dans le confortable fauteuil en cuir, et il semblait à cet instant ne se parler qu’à lui même, comme pour s’en convaincre. « Personne n’est irremplaçable » lança Marina dans un arabe sans accent, « et vous avez moins d’une minute pour l’accepter, le convoi arrive devant l’hôtel ».  Younes passa quelques ordres à sa garde rapprochée, qui s’éclipsa vers le hall d’un pas rapide. Le général grisonnant ne parlait plus, et tendait maintenant l’oreille en direction des éclats de voix qu’on entendait depuis le salon privé. La première détonation le fit sursauter, rapidement suivie par le concert chaotique des rafales et le claquement régulier des pistolets semi-automatiques. Un rictus trahit alors la nervosité qui s’emparait du vieux combattant. « Allons-y » ordonna Marina en lui désignant la porte de service. A cet instant le premier soldat du régime passait la porte de devant, mais Marina le maitrisa d’une balle au milieu du front. « Courez ! Je vous couvre ! » lança-t-elle à Younès, qui déplaçait hâtivement ses 90 kilos vers l’issue de secours, tournant alors le dos au reste des soldats qu’on entendait s’approcher d’un pas lourd. L’agent spécial couvrit leur fuite d’une grenade, qu’elle fit rouler vers la porte de devant, et tandis qu’elle se ruait vers leur échappatoire, le souffle de l’explosion la projeta lourdement contre la porte entrouverte. D’un bond, elle pût se relever pour empoigner par le col le vieux général, que l’action avait laissé à quatre pattes sur le carrelage de  la laverie de l’hôtel. Ils couraient maintenant entre les chariots de linge, sous le regard médusé des quelques employés qui n’étaient pas recroquevillés contre le sol. La porte du fond n’était plus qu’à quelques mètres d’eux quand elle s’ouvrit brutalement sur un soldat Libyen prêt à faire feu. Avant qu’il ait pu presser la détente, Marina finissait sa course d’une glissade et vint briser le genou du militaire d’un violent coup de botte, avant de l’achever d’une lame en plein cœur. Younès, arrivé à sa hauteur, ouvrit brutalement la porte de sortie sur la lumière aveuglante du soleil Libyen. Un monospace noir aux vitres teintées les attendait là, le moteur vrombissant, et sans même chercher de confirmation auprès de Marina, le vieux général courut s’y réfugier, inconsciemment décidé à faire confiance aux seuls alliés qui lui restaient.

Signaler ce texte