Désarticulée

Dessins d'enfants accrochés aux murs de la cuisine, châteaux de quand on était petit, réussir notre vie, on y pensait déjà, tartes aux pommes et purées étaient pour nous un festin. Saluer la gentille maîtresse, apprendre ses tables de multiplication avec une camarade de classe, à nager, à compter sur ses doigts. Jamais je n'oublierai combien mon enfance a été un tremplin pour moi, j'ai pas mal de souvenirs de cette époque-là, des boules de papier jonchant le sol à l'herbe fraîchement tondue le mercredi matin. On faisait du découpage, des guirlandes, avec de la grenadine et du lait mon frère nous avait appris à faire du bébé rose, boisson sucrée par excellence qui caresse les papilles des enfants ravis. On était aux anges. Mon mini-vélo, la pédale qui se déboîtait, la chaîne qui déraillait, les copines, la colline. Par chez nous, "La mare aux diables" était "la" discothèque à fréquenter, the must, elle résonnait en nous comme un mauvais accordéon désaccordé, l'endroit où il ne fallait surtout pas aller et en effet je n'y suis jamais allée, c'est sans regret. Un regret? Oui, bien sûr plusieurs. Si on pouvait avoir l'esprit de l'escalier avant de faire certaines choses... Moi, à une certaine époque mes escaliers étaient tordus, en papier, en colimaçon, casse-gueule, mais je m'égare...

Revenir à l'essentiel, une vie simple, insouciante, où tout est à sa place, la folie, le désir, le sérieux, le rire. Toutes ces composantes qui font avancer, sans faire des grands écarts trop grands comme une poupée désarticulée.