Devenue comme toi

bartleby

J'ai joué les gourgandines. Je me disais que ça plairait sans doute à un mauvais gars ténébreux. Tu sais, comme une lycéenne qui ne sais pas tomber amoureuse des garçons bien. Mais là, volontairement.

Je suis tombée sur toi, casting idéal, me suis pendue à ton cou. Tu ne m'as pas rejetée, non, mais tu ne m'as offert aucune place. Pourquoi l'aurais-tu fait, d'ailleurs  ?

J'avais envie de frémir, idiote, à tes mots cinglants, ton esprit sombre. La noirceur devenait ma couleur préférée. Un truc en moi voulais subir le "petit choc" quotidien. Maso, j'avais envie de ma claque, comme on se dévergonde. Crade, limite vulgaire. Puis m'en plaindre. Capter toute l'essence du "Oui mais Non" qui me caractérise.

Et puis un jour, je ne sais comment, je n'ai plus eu le sentiment de marcher avec plaisir dans le noir, la vue du sang, son goût que j'appréciais de force à ton calice, ton arme qui m'excitait étrangement, me parurent froids, tristes, la saveur, le parfum, il y en avait toujours. Ça ne puait pas ni ne titillait mes narines, non, c'était le "rien". Le mépris, le peu d'importance, le gris. Là, j'ai compris ce qui pouvait t'inanimer, t'inspirer le fade, j'ai compris que ton nom n'avait aucune signification particulière. Que tu ne t'adressais pas autres dans tes écrits. À peine à toi-même. Fumée sans toxicité, vapeur sans mystère. Et pourtant, pourtant tu n'inspirais ni pitié, ni dégoût, ni compassion. 

Tu n'es pas la crainte, tu n'es pas l'amitié, sûrement pas l'amour, encore moins la haine. Tu es une enveloppe vide. Et là, en ayant cru un instant que tu savais m'attirer, j'ai eu l'impression, non, je sais ou je crois, comme le sentiment que...

Je suis devenue comme toi.

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