Doigts collants dîtes-vous ?

tiki

On ne peut pas dire que les doigts de Keith Richards et de Mick Taylor soient restés collés à leurs cordes de guitare lorsque l’on écoute ce disque qui devait marquer le début des seventies et celui de l’ère Stones-Taylor. Le virtuose remplaçant de feu Brian Jones, apporte un profond son bluesy, notamment dans ses titres Sway, Moonlight Mile et Wild Horses. Mais avant que notre ouïe soit enveloppée par le R&B, ce sont d’abord nos yeux qui sont envoutés par la mythique pochette : quel est ce sombre objet du désir qui se cache derrière la braguette ? J’ai fantasmé pendant quarante ans sur Jagger et voilà-t-il pas que récemment Richards, par une indiscrétion dans Life, a mis les choses au point… Mais qu'importe, lorsque je fais glisser la fermeture éclair, le crissement est un avant-goût excitant des premiers sons s'échapant des sillons du vinyle et, à peine l’aiguille glisse-t-elle doucement, que j’entends « Gold coast slaveship bound... » en introduction du sulfureux Brown Sugar où les guitares accompagnent le rythme endiablé du saxo.  Les Stones sont arrivés à maturité avec Sticky Fingers. L'album allie aussi bien le R&B que le gospel ou les ballades épurées, le tout embaumé dans une atmosphère de drogue et, of course, de R'N'R! Pas étonnant qu’il ait été censuré, à l’époque, dans des pays non démocratiques. La drogue apparaît ainsi, sans détours dans le rythmique Dead flowers ou dans le rageur Sister Morphine entrecoupé par un remarquable passage mi-parlé mi-chanté par un Jagger toujours en quête d’inflexions de voix noires. Mais des Stones ont retient avant tout cette capacité à nous faire vibrer au son de la musique. You gotta move, très spiritual, à la ligne mélodique simple, est une des meilleures adaptations du genre. Chaque instrument y trouve sa place. Charlie Watts et Bill Wyman sont en parfaite harmonie tandis que les deux guitares apportent cette touche folk qui se diffuse lentement. De même, Moonlightmile avec ses mélopées au cachet folk très marqué insiste, comme dans Sway sur les cordes. Quant à I got the blues, et Can't you hear me knocking, ils allient à la perfection la trompette,  le saxo et l’orgue de Billy Preston. L'atmosphère de Wild Horses s’étend à l’intégralité du disque et s'empare de mon esprit, je ne contrôle plus rien, je suis intoxiquée, mes doigts sont restés collés à l’aiguille , j’écoute Sticky Fingers en boucle 40 ans plus tard and I like it !

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