Échappés

odeanox

Celle que tu aimais trop

Je suis née avec tous mes organes

Mais plus le temps passait plus un trou s'est creusé

Là au milieu du ventre et aussi dans les bras

Alors j'ai cherché cherché

Quelque chose pour le combler

Parce que ça faisait mal

Et sinon je n'existais pas


Je t'ai demandé de faire comme les cratères de la Lune

De faire comme si on ne les voyait plus

En te montrant : regarde mon ventre on peut voir à travers

Regarde mes bras je voudrais t'enserrer

Pour que tu ne puisses plus partir


Toi tu as dit : tu es bien gentille mais

Ce n'est pas à moi de combler tout ça

Néanmoins je t'aime beaucoup et pour cela

Je ne vais pas faire attention je vais tout creuser encore plus

Parce que tu en as besoin

Souffrir ça fait du bien


Au début je n'ai rien dit

J'ai pleuré, et j'ai pleuré encore

Ca n'était pas grand-chose la souffrance

Etant donné que je t'aimais

Et que l'amour que tu me portais

J'aurais souffert mille fois plus pour ne pas le perdre


Puis un jour j'ai réalisé

Que ce que je pensais combler

S'ouvrait encore plus

Que maintenant c'était un fossé

Qui nous séparait toi et moi

Je pensais te serrer dans mes bras

Je me rendais compte que tu étais très très loin

Tombée

Que finalement le creux dans ma poitrine

T'avait engloutie

Au lieu de nous porter


Alors j'ai décidé

Ma chérie je suis désolée

Je dois fermer la porte je dois me barricader

Parce que la seule qui puisse combler le fossé

C'est moi-même, pas toi


Et quand les travaux seront terminés

Tu pourras marcher sur des planches bien solides

Ca ne me fera plus mal

Je te prendrai dans mes bras

Et la chair qui t'enserrera

Sera bien la mienne et pourra même te faire respirer


En attendant envole-toi

Je ne veux plus te retenir

En attendant envole-toi

Je pleure mais il n'y a pas le choix 


Je suis née avec tous mes organes

Mais plus le temps passait plus un trou s'est creusé

Alors j'ai refusé cette part de mon enfance

En me disant que je valais plus que ça

Un jour il n'y aura plus rien à combler

Je n'aurai plus mal et je saurai 

Que j'existe déjà

Pas besoin de tes yeux pour ça

Mais nos regards dans la même direction

Ressentiront la même grandeur

Face à l'immensité

  • Rien à ajouter au commentaire édifiant de Julien si ce n'est que j'approuve votre projet Odea Nox: il est ambitieux et regroupe plusieurs arts. Pas simple mais réalisable. Naguère je l'ai fait, de façon ponctuelle, regroupant poètes, musiciens, vidéastes, danseurs et peintres tous amateurs performant sur un même thème l'espace d'une soirée. Persévérez.

    · Il y a plus de 6 ans ·
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    enzogrimaldi7

  • Bouleversant. Vous avez tout dit du rapport complexe que nous avons avec l'amour et qui n'est pas intellectualisable. Tout passe par ce corps cassant et poreux que vous évoquez avec une délicatesse infiniment poétique. Aucune complaisance, aucun désir de rejeter la faute sur l'autre... Et cette fin qui laisse pénétrer la lumière. Sublime !

    · Il y a plus de 6 ans ·
    Profil

    Julien Darowski

    • Merci, beaucoup.

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      odeanox

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