Elle est deux

Caïn Bates

     Dieu, qu'elle est belle à se damner. Ses cheveux bruns tombant sur son visage pâle en deux cascades chocolatées, ses deux yeux bleus rappelant à la fois la clarté du ciel et la tumulte des océans, ses lèvres rouges comme un bouquet de roses ou une transfusion sanguine. 

          Quand elle me regarde, le temps semble s'arrêter pour me laisser libre de parcourir son fleuve. Elle me montre alors un monde monochome s'agiter de toutes parts dans une euphorie mondiale à côté d'un autre monde aux couleurs éclatantes mais entièrement vide de toute vie. 

           Quand elle me sourit, je peux voir tout le bonheur et la détresse qui ont désertés ses yeux. Sa bouche invite à milles baisers, aux nombreuses morsures menaçant ceux qui s'en approche. Ses lèvres ont un goût sucré, sa langue laisse un arrière goût rance qui ne semble jamais disparaître.

             Sa peau est d'une blancheur immaculée, d'une pâleur cadavérique dont le rimmel perle parfois le long du visage pour combler la page blanche des ses emotions profondes, du gouffre qu'abrite son coeur.


          Elle est mon ange gardienne, un flingue posé sur ma tempe. Elle m'apporte cette impression d'éternité lorsqu'elle m'enlace tendrement, lorsqu'elle m'étrangle de rage. Je ne vis que pour elle, elle me murmurre les nombreuses raisons qui me poussent à rester, elle me souffle des épitaphes lyriques. Elle est la lame qui tranche ma peau, le cathéter des perfusions.


       Ma petite soeur est toute ma vie mais son absence est comme la mort, triste et froide mais solennelle et inspirante. 

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