Enfantothèque

Enfantothèque

C’était elle qui avait eu l’idée. « Si on allait louer un enfant. Juste pour le week-end ». Moi, je n’étais pas très chaud. C’était pas parce que l’époque était aux enfants qu’il fallait faire comme tout le monde. Tout ça pour aller frimer chez des gens que je ne connaissais même pas. « Quand j’étais petite, je disais toujours que plus tard je voulais avoir plein d’enfants, alors ils ne comprendraient pas qu’à mon âge j’en ai pas déjà au moins un ». La nouvelle mode, c’était la location d’enfants. Pour une soirée, un week-end, une semaine, des vacances… Certains tombaient dans le piège du leasing et ils les gardaient à vie. Nous, on en n’était pas là, même pour animer nos soirées on n’avait pas encore besoin de lardons, on arrivait à se débrouiller tout seuls. C’était juste pour aller voir ces gens qui l’avaient connue petite. Des amis de la famille quoi. A l’enfantothèque, on nous en présenta de toutes sortes, des sales, des bruyants, ils essaient toujours de les fourguer aux gens pressés, ils les proposent en premier. Quitte à les reproposer en fin de visite si rien d’autre n’a séduit les candidats à la location. On ne sait jamais, il y a parfois des pervers ou des étourdis qui se laissent prendre. Moi, je les voulais propres et polis. Finalement, on s’était décidés pour un couple, frère et sœur, on s’était dit qu’à deux ils seraient peut-être moins pénibles du fait qu’ils s’ennuieraient moins. On s’était trompés. Ils n’arrêtaient pas de se chamailler dans la voiture, au point que Marie a dû se mettre avec eux derrière pour les séparer. Si ce n’avait pas été pour la caution, je crois que je les aurais laissés sur le bord de la route. Mais ils ne rigolent pas avec la caution, il faut absolument rendre les mômes en bon état si on veut un peu rentrer dans ses frais, déjà que c’est pas donné la location et, qu’en plus, il faut les nourrir. Et qu’est-ce qu’ils réclament les mômes ! On a intérêt à les prendre jeunes, ils ont des exigences moins coûteuses sur les boutiques d’autoroutes.