Fine'gueur ine ze nauze !

godavelamoldave

Joyau taillé et poli au milieu d’un bordel sans nom, Sticky Fingers est un pur, très pur extrait des 70’ mais qui, injecté droit dans le sang, arrive à vous transporter hors du temps. Principalement enregistré au cours de l’hiver 1970-1971 dans le studio mobile de la nouvelle propriété de Mick Jagger, c’est le premier album édité par le label éponyme du groupe. Il sort l’année de la mort de Jim Morrison (après Jimi Hendrix et Janis Joplin), celle de la séparation officielle des Beatles, de la sortie d’Imagine et de Life on Mars? Brian Jones a été remplacé à la guitare par Mick Taylor, Marianne Faithful est sur le point de quitter Jagger après avoir échappé à l’overdose du siècle, Keith a eu un fils avec Anita Pallenberg - ex-femme de Jones - et tous baignent dans l’héroïne jusqu’au cou mais bizarrement, si le cinquième disque des Stones a indéniablement une saveur opiacée, très opiacée, on y trouve aucune trace de doute, de chaos ou d’incertitude.

Présageant Exile on Main Street, sortit treize mois plus tard et souvent considéré comme leur meilleur album, Sticky Fingers respire au contraire la foudroyante certitude d’être , exactement comme dirait Gainsbourg, pieds nus dans la terre, défoncés mais vivants. Ce disque a le goût, l’immédiateté, la brutalité et l’aisance du plaisir avec un grand P. Plaisir de prendre son temps. D’écouter. D’attendre. D’expérimenter. D’aller plus vite. Plus lentement. Plus fort. A condition de le passer en boucle et à pleins poumons, tel un bon Kind Of Blue ou le Unplugged de Nirvana, il détient ce charme rare, très rare et – oh, surprise ? - associé à certains délires chimiques… Celui vous soulever.

 Lisez maintenant ce qui suit à haute voix (et avec l’accent, please !) : Sister Morphine, Wild Horses, Brown Sugar, Dead Flower…Titres parfaits d’un album non moins  percutant, évocateur, poétique, élastique, terrifiant. Je pourrais ici rappeler l’audace, la qualité et l’incroyable diversité des dix pistes qui le composent. Souligner la plus belle performance de Bill Wyman au sein du groupe. Rappeler l’influence créative (et le talent monstre) de Marianne Faithful. Suggérer aux adolescents de ne pas sous-estimer le pouvoir d’une bonne balade des Stones pour conclure (seul le Wish You Were Here de Pink Floyd arrive à la cheville de Wild Horses sur ce plan et encore, c’est surtout vrai en cas de relation à distance). Je pourrais parler de blues. De guitare. De pureté. Je m’en tiendrais à répéter la grâce d’un album magnifique et à écouter en entier si on veut pleinement l’apprécier.

 Il en est des pochettes de disques comme des jeans délavés. Certaines collent si bien à leur sujet qu’on ressent une irrésistible envie d’y glisser les doigts et de les y laisser. Sticky Fingers a le goût et l’odeur d’un jean brand new hier aujourd’hui usé, râpé, lessivé. Foutrement sexy. On est de plus en plus excité à l’idée de le voir s’ébranler. D’y glisser une pleine main, sans hésiter. Définitivement accro(chée).

  • Merci Gilles c'est très sympa ! Je ne suis pas une très grande connaisseuse de l'histoire du rock mais j'adore les Stones depuis toujours !!! Bonne chance pour le concours, tu es déja bien parti pour gagner le nombre de votes en tout cas et c'est mérité ! Au plaisir de te lire :)

    · Il y a presque 14 ans ·
    Photo 10 orig

    godavelamoldave

  • Salut !

    J'ai beaucoup apprécié ta chronique. C'est précis, vif et agréable à lire comme j'aime. Dommage pour le titre qui laisse à penser autre chose de beaucoup moins appetissant. Mais remarque dans un sens, la surprise n'en est que plus grande quand on lit le texte. Très bon boulot en tout cas, qui, d'après moi, se détache du lot.

    · Il y a presque 14 ans ·
    Photo shunrize

    Gilles Rolland

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