Hermione moderne

Julie Vautier

Poème inspiré d'un monologue d'Hermione dans "Andromaque"

Où suis-je ? Qu'ai-je fait ? Que dois-je faire encore ?

Quel amour te porter ? Quel dégoût me dévore ?

Je croyais voir fleurir un destin bien meilleur

Fait de passions communes et de petits bonheurs.

J'espérais voir en toi quelqu'un que tu n'es pas,

Qui pourrait s'oublier pour s'occuper de moi.

Mais désormais je sais : ce n'est que pour les autres.

J'ai fait l'erreur de naître, est-ce vraiment ma faute ?

Comment aurais-je pu savoir qu'il y aurait

Dans le creux de ma vie cet être peu parfait,

Inclus bien malgré moi dans cette union innée

Qu'on appelle famille, immuable et sacrée ?

Longtemps, oui, je l'avoue, j'ai continué de croire

Qu'il me restait encore un tout petit espoir

Pourtant tu sais comment décevoir les croyances.

Aujourd'hui, c'est trop tard, je t'ai donné la chance

De tout recommencer, effacer tes erreurs

Mais seuls les plus idiots ne voient pas leurs erreurs

Ils voient celles des autres et celles des anciens.

Ils veulent soutenir tous ceux qui sont chagrins

Ils oublient un peu tôt d'où proviennent les larmes

Qui rougissent les cœurs et détruisent les âmes.

Désirant découvrir l'origine des pleurs,

Ils oublient qu'ils en sont eux-mêmes les auteurs.

Cependant, s'ils le savent, ils consolent et rassurent

De sorte qu'on les croit innocents, sans souillure

Leurs paroles et leurs mots sont leur loup et leur masque

Qui recouvrent en secret sous les plumes fantasques

Les terribles pensées qui animent leur cœur,

Les terribles paroles et nos futures peurs.

Je sais bien qu'il existe ailleurs que sous mon toit

Des hommes bien plus vils et plus méchants que toi.

Je sais que la misère et les guerres infernales

Ne m'ont jamais blessée, ne m'ont jamais fait mal

Dans ma vie je n'ai vu que bonheur et amour

Il t'a suffi d'un jour, un maudit petit jour,

Où, à coup de secrets, sans vraiment le savoir,

Tu m'as brisé le cœur, tu m'as volé l'espoir.

Ce jour m'a vue pleurer pendant tellement longtemps

Mais enfin je savais qui tu étais vraiment

Je te croyais géant quand tu n'étais qu'argile

Par ta faute aujourd'hui, je suis bien plus fragile

Moi qui m'étais bâti une écorce invincible

J'étais sans le vouloir de tes flèches la cible.

A travers le miroir, je voyais une enfant

Egarée dans les bois de tes mensonges errants.

Pour ne plus m'y noyer, pour enfin t'échapper

J'ai brisé le miroir, j'ai choisi de changer.

J'ai choisi d'ignorer les liens qui nous unissent

Pour qu'en mon cœur blessé ton souvenir périsse,

Pour que tes jolis mots restent à l'état de mots,

Pour pouvoir oublier, préserver mon ego.

Selon toi, entre nous, une complicité

S'est tissée dès l'instant où je suis arrivée.

Tu ne comprends donc pas qu'au fond, tout nous oppose

Tel le jour et la nuit, les orties et les roses.

Je me barde d'épines d'un piquant véritable

Pour mieux me protéger, être plus redoutable

Sous ma robe de soie, je cache mes secrets

Pour les rendre invisibles à tes yeux indiscrets. 

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