Encensé par la critique, adoré par le public, La Reine des Neiges finit de redorer le blason de la marque Disney Princesses qui n'en avait plus vraiment besoin après les succès précédents de Rebelle et Raiponce. Certains vont même jusqu'à parler de féminisme. D'autres dénoncent un odieux coup marketing.
Alors, vent de fraîcheur ou gel des actifs? Menons l'enquête.
Deux héroïnes en tête d'affiche, une femme couronnée, toute-puissante... La Reine des Neiges a des atouts non négligeables dans son jeu.
Il est loin le temps où les princesses servaient de faire-valoir à la virilité masculine et offraient aux petites filles la ligne de conduite à suivre. Révolue aussi l'époque, où après avoir sauvé leur peuple comme leur statut de femme libre, La Petite Sirène et Mulan entamaient sagement une vie domestique.
Depuis 2007 et le fabuleux Il était une Fois, la révolution des princesses est en marche.
En effet, petite pépite d'humour et de second degré, le film prenait à contre-pied tous les symboles traditionnels d'un conte de fées. Au terme d'un parcours sentimental inédit, la princesse Giselle s'assurait son indépendance financière et formait avec un avocat divorcé une étonnante famille recomposée.
3 ans plus tard, Raiponce enfonçait le clou. Armée d'une poêle à frire et de ses longs cheveux blonds, la jeune femme brisait les chaînes du joug maternel et détournait les artifices, longtemps symboles d'une oppression patriarcale.
Dans une suite logique, La Reine des Neiges semblait être alors le film de la maturité, à l'âge de tous les possibles.
Prisonnière de ses pouvoirs comme de ses émotions, la princesse Elsa prend sur elle après la disparition tragique de ses parents et monte sur le trône. Mais visiblement, la reine ne saurait contrôler ses humeurs... Une malheureuse dispute avec sa sœur Anna et tout vole en éclats. C'est dans l'hystérie qu'Elsa se libère de son carcan de glace.
Là, le chignon défait, le visage fardé, les épaules offertes, le corps magnifié dans une somptueuse robe de voiles, il faut le reconnaître, Elsa nous offre pour la première fois dans l'imaginaire Disney, une femme assumée pour qui l'homme n'est absolument pas un référentiel. Elle fait fi de tout, des conventions comme du genre.
On applaudirait presque.
Mais quelle véritable libération dans l'exil? Car c'est une vie d'ermite que se choisit Elsa. Une reine dans un palais vide. Quelle image!
Si ses pouvoirs inquiètent, ils ne soumettent pas. Ici, point de Sauron ni de Voldemort, Elsa reste étrangement seule. Comme si l'idée de suivre une femme forte restait étrangère à un royaume entier.
Quant à sa sœur Anna, fragile, maladroite, ingénue, versatile, elle n'est qu'une grossière accumulation de clichés qui nous renvoient tous à l'image séculaire de la damoiselle en détresse.
À propos, n'oublions pas que Rebelle, déjà, frôlait le faux-pas sur le chemin de l'émancipation, les errances médiévales de la flamboyante Mérida remettant la famille et surtout le mariage au centre de l'équation.
Mais au delà de toutes ces considérations scénaristiques, le problème majeur n'est pas là.
Brushing impeccable, taille de guêpe, yeux de braise immenses, minuscules extrémités, c'est bel et bien la dysmorphie des princesses qui les empêche de s'affranchir du regard de la société, en particulier, quand, de l'autre côté du spectre, le génie Miyasaki a, lui, depuis longtemps prouvé la singularité de ses héroïnes.
Depuis le sublime Nausicaa (qui fête cette année son 30ème anniversaire!), le maître, à la tête du studio Ghibli, a non seulement réveillé la conscience écologique de son pays mais aussi installé la femme, égale de l'homme, comme l'avenir de l'humanité. Des ingénieures pilotes de Porco Rosso aux forgerons guerrières de Mononoké, de l'énigmatique Mamie Sophie au chef pirate de Laputa, de Dame Eboshi aux sorcières de Chihiro, la femme est partout, avec un naturel et une cohérence qui forcent le respect. C'est simple, ici, la femme n'est ni un prétexte, ni un argument, c'est une évidence.
Alors, sommes nous en droit d'attendre mieux d'un groupe tentaculaire comme Disney? À grands pouvoirs, grandes responsabilités. L'hégémonie de l'entreprise en matière d'animation et de programmes jeunesse devrait leur souffler le devoir de pousser plus loin la dimension féministe, ne serait-ce qu'en termes de design.
Tant que leurs figures de proue respectent en tout point les canons de beauté actuels, le message sera d'emblée biaisé.
Les Princesses sont peut-être l'atout charme du géant américain, mais elles démontrent surtout les failles d'un colosse dont le féminisme est à l'image de leur physique démesuré : faussé.
Bien d'accord, sauf sur votre réserve concernant "Rebelle", dont l'éventuel faux-pas ne m'a pas frappé. Je suis de parti pris... J'adore ce film !
· Il y a presque 10 ans ·astrov
Ha ha, moi, c'est pareil avec Raiponce, j'ai du mal à être objective!
· Il y a presque 10 ans ·Nicole Bastin
Moi, j'aime Bambi, rox et rouki, cendrillon... Enfin, bref tous les anciens ! C'est grave, docteur ? LOL
· Il y a presque 10 ans ·veroniquethery
Bien sûr que non! J'affectionne aussi beaucoup les classiques comme Merlin ou Peter Pan.
· Il y a presque 10 ans ·Nicole Bastin