Ils tournaient en rond

vallenain

Ils tournaient en rond. Tels des êtres mécaniques. Ils tournaient en rond. Ils ne semblaient pas, ou plus, dotés de conscience, ils ne semblait pas, ou plus, maitriser leurs membres. Ils tournaient en rond. Rien ne paraissait pourtant casser le banalité de ce paysage fait d'immeubles et de parkings, le soleil se levait toujours du même côté, illuminant les vitres de verre de son orange chaleureux, le ciel revêtait toujours ce gris-bleu si particulier, témoin et victime de l'évolution des comportements, la Terre tournait toujours. Mais elle n'était plus seule. Ils tournaient avec elle.

Tous ces déçus, ces frustrés, ces perdus, ces pauvres, ces illuminés, ces fous, ces solitaires, ces brisés, ces naïfs, ces pantins, ces innocents, ils tournaient, mécaniquement. Plus aucune logique ne régissait leurs mouvement.

Qu'est ce qu'était la logique ? Ce cheminement qui conduisit l'humanité à cet état ? Cette réflexion qui poussa les Hommes à devenir ce qu'ils devinrent ? Pouvait-on appeler cela de la logique ?

La logique était-elle l'idéal à atteindre ? Les Hommes avaient-ils une destinée ? Un but à atteindre ? Qu'en savait-on ? Qui savait ?

Quelqu'un avait-il seulement su à un instant t ?

Qu'importe, ils tournaient. Et les autres, les ficelles du système, les engrenages de la machine, si virtuelle et immatérielle qu'elle soit, restaient figés. Le Temps lui-même se déréglait. Le Temps lui-même se remettait en question. Avait-il une raison d'être pour les Hommes ? Fallait-il compter, comptabiliser, déduire ? Fallait-il calculer.

Les aiguilles du Temps ne tournaient plus, les Hommes avaient pris le relais.

Et les bureaucrates, les politiciens, les économistes, les savants, les professeurs, les juristes, les analystes, tous s'étaient arrêtés. Attendant que leur tour arrive.

Il n'y avait eu ni explosion ni implosion. Il y avait eu le changement. Si doux et si brusque à la fois. Il y avait eu la révolution. Celle que l'on ne contrôle pas, celle que l'on ne demande pas, celle que l'on ne conçoit pas.

La Nature, qui, de longs siècles durant, avait acceptée de rester soumise à l'être humain, avait repris ses droits.

Ils étaient en attente. Et la Nature respirait. De cet air pur nettoyé de toute contrainte.

La Terre, telle le processeur de la vie, venait de reprendre le main pour la donner à tout ce qui avait été mis de côté. L’humanité n'était plus qu'un silence, une mécanique si finement huilée qu'on en entendait aucun crissement.

Et la Nature, sage philosophe, ne lui redonnerait la main que lorsque qu'elle se tairait.  

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