J'aime bien le rouge qui cache le blanc

chevalier-neon

Ce corps que tu aimes tant caresser,
je l’ai imaginé couvert de sang.
Je suis las tu sais et je suis pressé,
et c’est vrai que j’ai envie d’être absent.
Ce n’est pas que je désire la mort ;
c’est qu’à la mort elle est la seule issue.
Car je ne suis pas assez fou et fort
pour laisser porter par mon cœur déçu
tout ce que j’ai eu de désillusions,
tout ce que je sais de la réalité.
Que jamais quelqu’un ne fasse allusion
à cet enfant en moi qui reste alité.
Je veux vraiment le soigner ;
je dépends de lui pour guérir.
Celui qui veut l’éloigner
veut simplement me voir périr.
Ce visage que tu aimes tant embrasser,
je l’ai imaginé couvert d’ecchymoses.
Cette passion que tu as laissé t’embraser
ne peut conduire l’un de nous à l’osmose.
Je t’aime même les joues noyées de larmes ;
je suis un enfant même s’il est mort le gosse.
Je ne veux me servir de l’amour comme arme
mais j’aimerais jeter le reste dans la fosse.
Avant tu sais je n’avais qu’un seul rêve,
maintenant j’ai des infinités de cauchemars
car tout le monde laisse ceux qui crèvent
rouvrir les yeux pour savoir qu’il est déjà trop tard.
Ces lèvres que tu aimes tant baiser,
je les entends déblatérer des horreurs.
Mais je n’y peux rien si j’ai vu lésés
tant d’innocents qui ont perdu leur honneur.
Je suis fatigué et je veux dormir,
j’ai mal au cœur et il faut l’amputer.
Il a déjà commencé à pourrir ;
pour toujours le chagrin l’a transmuté.
Il ne sera plus jamais aussi noble et aimant
parce qu’il s’est mis à haïr la haine.
Avant il pardonnait attirant comme un aimant
ceux qui voulaient lui causer de la peine.
Ces yeux dans lesquels tu te regardes,
je les ai mieux imaginés crevés.
Pitié il faudrait que quelqu’un garde
l’enfant endormi en train de rêver.
Lui il ne sait pas encore ;
réveillez-le mais il ne faut pas lui dire ni lui montrer.
Lui n’a plus vraiment de corps,
mais seule son âme compte c’est elle qu’il faut rencontrer.
En moi tu as le droit de te plonger
parce que j’ai trop peur de l’introspection
et de la douleur qui va me ronger
si je vois en face sa déréliction.
J’avais essayé de bannir l’enfant,
mais je le gardais même s’il n’était qu’un cadavre
car c’est son souvenir qui me défend
de l’enfer qui m’empêche d’imaginer un havre .
Maintenant je sais que l’enfant doit bannir l’adulte ;
même s’il est mort c’est à travers lui que je peux vivre.
Même grand je ne sais pas comment vouer un culte
à ceux qui créent des rêves mais nous privent de les suivre.
Ce corps contre lequel tu te réchauffais,
il a encore plus froid que l’hiver.
Laisse-le tomber et servir de trophée
à ce monde qui fait tout à l’envers.
Il faut que j’arrête d’être malheureux
parce que je veux que l’enfant en moi ressuscite.
Et ne fais plus semblant d’être chaleureux
dans ce monde où tout se vole et rien ne se mérite.

(écrit le 26 mai 2012)

  • C'est vraiment beau, surtout la fin. Les rêves que l'on doit abandonner, et l'insouciance de l'enfance qu'on aimerais retrouver... Devenir adulte semble parfois tellement difficile et injuste. Ce thème ma également inspiré, il y a peu.
    C'est percutant, comme poème.

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Weekendplansnewest

    mlleash

  • Je veux que l’enfant en moi ressuscite ...dans ce monde où tout se vole et rien ne se mérite.

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Vkhagan orig

    Victor Khagan

  • Immense (pour moi) !

    Je sais que l’enfant doit bannir l’adulte :
    même s’il est mort, c’est à travers lui que je peux vivre.

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Vkhagan orig

    Victor Khagan

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