JE ME SOUVIENS (1)
seb365
Poudre d'alumine virevolte, vole d'un vol gracieux, s'écrase sur ma face, tombe à terre, devient tapis blanc, matelas de neige. Montréal, décembre 2000. Je navigue dans les flots de ma mémoire ; quinze ans plus tard ; souvenirs alors que tombent des cristaux sur ma terrasse normande.
Eté, je me souviens. Je me souviens de ce quadrillage architectural, Est-Ouest, mais à quoi ça ressemble un quartier nord-américain ?
Perdu; perdu mais plaisir que de se perdre le long de ces avenues au hasard. « Pardon, Clanranald 66 ? », «Hein ? Comment ? », « Clanranald 66 ? Perdu, je suis perdu !», le chauffeur du bus, moustache gasconne, yeux éberlués me dévisage puis s'éclaircit : « Ah, CLANRANALD SIXTY SIX !!! Mais t'es un sacré français, touai ? ». Eclats de rires dans le bus, et je comprends que mon accent devient couleur et sujets à plaisanteries : « Ouais ! Je suis français. ». Je passe de l'autre côté du miroir.
Une semaine que je suis ici, et se perdre est devenu une bénédiction. Cette terre qui rejoint le ciel. Je ressens ce que les pionniers ont pu saisir en arrivant ici. Sur le Mont-Royal ; trente-deux kilomètres d'horizon, un infini qui vous guérit de vos hésitations ; je me souviens, tout est possible.
Les saisons s'enchaînent, et l'automne a déjà des accents d'hiver, et l'hiver a des accents d'hiver, et le printemps c'est déjà l'été pour que l'été plonge dans l'automne.
L'automne ; feuilles vertes deviennent oranges, rouges, or dans les arbres sous ce tapis minéral, le ciel bleu flamboie et l'éternité devient possible.
Je me ballade à Angrignon Park : l'été des Indiens. Oui, l'été des Indiens et non pas l'été Indien ; sacré Joe Dassin qui fait hurler les québécois. Trois ou quatre jours avant l'hiver, avant la disparition de la chaleur, un châle épais s'abat, particularisme de cette partie du monde ou l'automne vous dit au revoir, vous embrasse de feux baisers pour qu'empreintes soient gravés dans votre quête de lumière jusqu'à la fin de l'hiver. La foule profite de ces dernières heures et les cieux illuminent, réverbèrent un toit de feuilles d'érables incandescent. J'ai la tête en l'air. J'ai toujours eu la tête en l'air et je comprends enfin cet avantage qu'on m'a toujours reproché : c'est pour mieux voir. Un vieux juif m'interpelle : « C'est la lumière de Dieu ! », je suis pas croyant, je suis athée. Je m'assois auprès de lui et il me parle de sa vie d'émigrant après les camps. Il y a du sens dans ce voyage, je commence à comprendre.
Je confirme ! ma fille a vécu un an à Québec, moins 45 parfois , l'hiver est long , mais les canadiens fort sympathiques !!
· Il y a plus de 9 ans ·marielesmots
Tu nous fais partager là un superbe ressenti de ce pays aux palettes de couleurs incomparables !!
· Il y a plus de 9 ans ·marielesmots
si coloré et si froid. merci
· Il y a plus de 9 ans ·seb365
Ça fait du bien ce bol d'air pur. Ce pays est une pure merveille.
· Il y a plus de 9 ans ·erge
je suis entièrement d'accord. merci pour ton passage
· Il y a plus de 9 ans ·seb365
C'est magnifique et si apaisant. Infini, éternité, regards en l'air , tête en l'air c'est tout moi aussi. Et l'amour des saisons, le chatoiement des feuilles d'automne, la flamboyance des étés. Je me suis retrouvée dans ce voyage initiatique, ou même extatique. L'univers autour de nous est aussi en nous, et quand nous le respirons ainsi, en osmose avec lui, quel bonheur. Quel envie de vivre. Je te comprends et je partage. Merci.
· Il y a plus de 9 ans ·elisabetha
je crois que je ne me suis jamais autant senti libre. Et là-bas c'est le pays des 4 saisons.Merveilleuse contrée.
· Il y a plus de 9 ans ·seb365
j'imagine pleinement. Par contre pour moi il faudrait supprimer l'hiver. Sourire.
· Il y a plus de 9 ans ·elisabetha
la suite arrive... brrr...
· Il y a plus de 9 ans ·seb365