JESSIE . Chapitre 34

Jp Scriblerus

Résumé des chapitres précédents : Charles Villepou a succombé aux séductions de Jessie, l'ex de son fils Sébastien qui a retrouvé sa nouvelle amie Charlène à laquelle il s'est confié.

Chapitre 34

Charles Villepou s'en remet -il ?

   En sortant de chez Jessie Charles Villepou éprouva la nécessité de marcher, se rendit quai de la Fosse et chemina sur le quai le long du fleuve jusqu'à la butte Sainte-Anne qui offrait de ses hauteurs un joli panorama sur la ville.

   Ainsi l'irréversible était accompli.

   Plus jamais il ne pourrait le matin se dire en se rasant et en se regardant dans la glace qu'il est de clairs matins de roses se coiffant où l'âme a des clartés d'eaux vives dans les roches où la chair est sans taches et l'esprit sans reproches. Le péché était consommé.

   Le péché était consommé et quel péché. Même si jusqu'alors il n'avait que quelque peu écorné sa fidélité et terni son image d'homme probe, honnête et religieux, ce dont il était plus heureux d'ailleurs que fier, ces moments de fornication intensive qu'il venait de vivre avec Jessie Cassegrain, l'ex potentielle fiancée de son fils, constituait désormais l'acte générateur de son effondrement moral et de son basculement dans le vice.

                                                      *

    Et c'est ainsi qu'un matin las de tout, soudain, épuisé par les tensions de ses charges professionnelles et de ses investissements sur des fronts multiples, courant de chez lui au train, du train à l'hôtel, de l'hôtel aux lieux de réunions, sautant des taxis dans les avions, finissant par être exaspéré, désespéré par une femme sans doute amoureuse mais n'entendant rien à sa vie professionnelle, la lui jalousant, collante, et sans restes de beauté suffisants - en avait-elle jamais eus …- un matin l'on sort nu de sa douche ...

     ... L'on sort nu de sa douche et que l'on tombe par inadvertance de manière impromptue sur la femme de ménage que l'on croît ingénument consentante, et que l'on entreprend, une soubrette exotique, une négresse, belle plante prometteuse dans sa plénitude et sur laquelle sans trop y mettre les formes, mais en y plongeant les lèvres, les mains et les doigts ( fingers ), on fond littéralement.

   Mais la sauvage s'effarouche, l'on s'était mépris sur ses intentions, elle consent à se laisser un peu grappignoler selon le droit coutumier en vogue dans les hôtels, puis elle prend peur sous l'effet de gestes plus intrusifs, et alors se défend, se met à crier, alors, alors, vous, vous prenez peur, cette femme ne va pas quand même vous faire une histoire pour des choses que vous n'avez même pas eues à l'esprit ! elle était consentante avez-vous cru !

      Alors vous, énervé par la tournure de l'incident qui prend une ampleur délirante, dans une spirale de peur panique soudaine et infernale, dans une rage subite, vous êtes saisi du désir effréné, incontrôlable de violer cette femme pour la punir.

...

   Ainsi cheminaient les pensées de Charles, son pas épousant le courant paisible du fleuve, lui repassant ce film récent au retentissement planétaire, et il imagine la scène de la chambre 2806 du Sofitel à New-York. Charles Villepou s'estime désormais à la hauteur de la cheville de Dominique Strauss-Kahn.

    Comment regardera t-il son fils lorsqu'il reviendra sur Nantes dans dix jours. Jessie s'était maintenant offerte selon des modalités différentes les deux mâles de l'entreprise Villepou et compagnie.

   Il était vingt-heures lorsqu'il mit les pieds chez lui. Ne préviens pas surtout quand tu rentres tard lui cria Arlette du salon, j'ai mis ton assiette dans la cuisine, tes nouilles sont froides.

   Arlette apparut dans la cuisine alors que d'un coup il finissait son verre de vin et s'en versait un autre.

   - Tu bois deux verres de vin maintenant au dîner ? Ton absinthe au bistrot ne te suffit donc plus !

   Arlette avait lu l'Assommoir.

    -  Mais quelle tête tu as ce soir, des problèmes au bureau ? tu as même une très sale tête. Y 'a quelqu'un de mort dans la famille !

   Charles Villepou ne savait pas cacher, dès qu'il avait un problème celui-ci façonnait son visage et chacun sans être grand clerc dans le domaine de la psychologie pouvait y décrypter l'éventuelle contrariété. De guerre lasse Charles Villepou leva les yeux de sa fourchette et dit à Arlette : " Peux-tu me ficher la paix un moment !

   - Oui comme toujours, c'est ta vie c'est pas la mienne, tes affaires de bureau je ne peux pas les comprendre.

   Arlette fit sa vaisselle tandis que Villepou s'enfourchait ses nouilles froides, puis rejoignit le séjour pour y regarder le journal de vingt-heures. Quand il était dans cet état de soucis rentrés mieux  valait ne pas insister. Ne pas l'approcher était la règle.

   Charles Villepou revivait chacun de ses moments avec Jessie, ce corps de jeune femme dont il s'était repu, malgré qu'elle l'avait scandaleusement malmené, et dont il avait joui, jusqu'à cette séquence téléphonique démente qui dans un premier temps l'avait irrité puis qui avait exacerbé follement son désir et, durant laquelle dans un deuxième temps il avait joui en elle alors même que tombait et résonnait comme le glissement du couperet de la guillotine le prénom de son fils qui venait sans nul doute de percevoir les émanations sonores de leur copulation.

   Ces moments de plénitude et d'ivresse charnelles délirantes alors qu'il était en elle, alors qu'elle parlait au téléphone, et qu'en même temps elle le pressait contre ses seins chauds, contre son ventre, lui griffant les fesses... " C'est Sébastien, ton fils ! " ... et toi tu es le fils d'un vrai salaud... Par deux fois, trois peut-être il l'avait ensemencée sans s'être pourvu d'une protection, son fils était sain et ce n'est pas lui le prude, le fidèle jusqu'alors qui aurait pu lui balancer un virus, .. pour le reste...

   Non, non ! ce n'était pas possible, elle aurait fait attention, ce serait trop bête juste une fois, la première fois de son existence qu'il trompait sa femme véritablement, qu'il se donnait pleinement à une femme, non ! ... 

   Qu'il trompait sa femme avec la femme promise à son fils ...

   Ce Père Patrice qu'il se promettait de consulter, et dont il avait différé la prise de contact ... Mais absolution ou pas, pénitences ou pas, le mal était fait, fait, fait, fait, le ver était dans le fruit, le vice était dans la bête, il ne pouvait plus, désespéré, qu'espérer que le temps passant, il recouvrît de ses couches d'histoires quotidiennes cette période d'échanges singuliers, de sauteries, de tchats pervers, de chatroulettes, se refusant à imaginer l'impensable, l'innommable, plus qu'à espérer que Jessie ait un comportement loyal..

   Le téléphone sonna.

                                                            *

   Il sursauta. Arlette Villepou décrocha. Charles entendit : " Bonsoir Jessie. " Puis, après, le silence de celui qui écoute : " Ah ! c'est vous qui avez annoncé la rupture avec Sébastien à votre mère ... votre soeur... ah sur le coup je n'ai pas trop compris ... C'est vrai que je vous ai toujours pensé vous et Sébastien comme enfants uniques ... ça faisait un point commun en plus entre vous deux, voyez-vous ... pardon ? Votre soeur c'était une plaisanterie, vous n'avez pas de soeur, c'était une plaisanterie de votre mère ! ...

   -  Non Jessie, mon fils n'est pas un beau salaud ...  engrossée ? mais Jessie vous devez savoir ce que vous avez fait l'un et l'autre je croyais que ... je vous passe mon mari ".

   -  Charles  ? c'est Jessie...

    Charles faillit se dérober et fuir, faire le mort qu'il était déjà, mais il espérait encore quelque mot de pacification, un mot par lequel elle lui signifierait qu'elle célait à tout jamais leur secret. C'était peut-être ça.

  - Oui, bonjour Jessie... ah ! non ... ça suffit mademoiselle vous n'êtes pas correcte.

   Arlette était restée dans le salon à l'écoute, elle fit signe à Charles Villepou de mettre le haut-parleur. Mais il raccrocha très pâle. Il dit : " Elle est abjecte cette fille. C'est bien que Sébastien ait rompu avec elle."

   -   Mais que t'a t-elle dit ?

   La sonnerie retentit de nouveau, les figeant. Arlette voulu décrocher. Charles fit barrage : " L'on ne répond pas ! ". La sonnerie strida de nouveau. Charles tendu, décrocha.

   -  Qu'avez-vous à dire ?

    Arlette approcha appuya sur la touche du haut-parleur. " Vous êtes bien nerveux, cher ex-futur beau-père. N'iriez-vous pas bien ? ".

                                                     *

   " Mais quoi ! dit Zadig, il est donc nécessaire qu'il y ait des crimes et des malheurs et que les malheurs tombent sur les gens de bien ? Les méchants, répondit Jesrad, sont toujours malheureux ; ils servent à éprouver un petit nombre de justes répandus sur la terre, et il n'y a point de mal dont il ne naisse un bien...

                                                        *

Jessie au téléphone continuait ;

   -   N'êtes-vous pas gens de bien vous et Arlette Charles ? serais-je la méchante ?

   Charles respirait mieux. " Allons, soyez cool, zen, lexomil.. " Jessie éclata de rire et raccrocha.

  -   Elle est folle cette fille !

  -  Mais Charles que t'a t-elle dit avant que je mette le haut-parleur ?

  - Rien, enfin que des conneries. Elle devient méchante, elle n'accepte pas la rupture, elle se venge, je la sens prête à raconter n'importe quoi. Mais à toi Arlette au premier appel lorsque tu as décroché que t'a t-elle dit ?

  -  Elle a appelé parce que sa mère lui a appris que je lui avais téléphoné.

  -  Et alors ?

  - Et alors, elle m'a répété ce que sa mère lui avait dit, qu'elle m'avait dit que ton fils était un beau salaud. Puis elle a ajouté que sa mère m'avait dit qu'elle espérait que Sébastien ne l'avait pas engrossée.

     A vrai dire, poursuivit Arlette, et je ne sais pourquoi mais ça m'amuserait d'apprendre qu'elle attend un petit ou une petite Villepou, de Sébastien Villepou, ça aiderait peut-être à la réconciliation, et lui mettrait du plomb dans le crâne.

 - Ne jouons pas avec ces choses là, reprit Charles Villepou sombre, la voix blanche et comme se parlant à lui-même, ça ne les ferait pas mari et femme pour autant, et cette garce pourrait même demander une pension.

 -    Certes, mais si l'on en croit Sébastien tout en partageant le lit de Jessie leurs rapports seraient demeurés quasi platoniques jurant qu'ils ne consommeraient qu'une fois mariés. Mais j'avoue que j'ai des doutes Charles.

 -  Tu as raison nous ne sommes pas dans leur intimité et un homme et un femme dans un lit, ça peut faire autre chose que des étincelles ...

-    Mais à toi Charles que vient-elle de te dire ?

-   Elle m'a dit,  elle m'a dit, elle m'a dit oui que, voilà, elle m'a dit que toi et moi étions aussi lamentables que notre fils. Elle est odieuse cette fille n'en parlons plus.

     Des cernes d'angoisse ombraient le visage de Villepou qui siffla, éteint ;

 -   Leur voyage, les fiançailles, ce n'est plus mon problème, ce n'est pas mon problème, ils sont majeurs Bon dieu ! qu'on ne me parle plus de cette fille, une de perdue dix de retrouvées !

 -  Pourtant il y a quelque temps encore Charles tu la déshabillais de ton regard qui se glissait sous sa jupe.

 -  Et après ! je suis un homme Bon Dieu ! Je n'en peux plus. Je vais prendre l'air.

 -  Charles tu n'es vraiment pas bien ce soir, tu me fais peur, c'est quoi le bureau, des problèmes, c'est cette fille ? va falloir consulter Charles, ça va pas durer ...

   En vérité, au téléphone Jessie avait dit à Charles Villepou :

   " Alors Charles on se remet ? "

                                             µµµ

05052013 .

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A Suivre

     Quand Sébastien Villepou, le fils, croit encore en Jessie l' étudiante déglinguée avec laquelle il a rompu et qui vient de séduire son père ...

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  • je vous sais gré de votre passage ... j'éprouve un plaisir réel en reprenant ce roman écrit il y a deux ans, mais qui sur le fond quand même me donne parfois le vertige ... merci ...

    · Il y a presque 10 ans ·
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    Jp Scriblerus

  • Woaou, c'est beaucoup de travail. . .Faudrait lire depuis le début pour bien tout comprendre ! Mais c'est cool, les résumés !

    · Il y a presque 10 ans ·
    Mains colombe 150

    psycose

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