LA CONJUGAISON DU TEMPS

agathe

Un slam sur le temps qui passe, ce temps qui se conjugue à tous les temps..Une sorte d'application pratique du Bescherelle...

LA CONJUGAISON DU TEMPS

  

https://soundcloud.com/agathe2014/la-conjugaison-du-temps


Quand t'es gamine au fond d'ton lit, tu rêves du jour où tu s'ras grand',

Où tu n'iras plus à l'école, où tu n' seras plus un enfant,

Tu t'imagines vivre cent ans, comme t'en as dix c'est irréel,

La preuve tes arrières grands-parents, même très vieux sont éternels.

Toi tu les as toujours connus, c'est bien la preuve sans mentir,

Que le temps tourne au ralenti, malgré tout ce que tu entends dire.

L'adulte est un être bizarre qui se complait à répéter

Que le temps va s'accélérer quand tu commenc'ras à 'travailler.

Tu n'comprends rien, tu laisses dire, car à quoi bon les contrarier,

De toute façon t'es persuadée que pour ta pomme, ça va changer.

Pourtant à chaque anniversaire, ils te regardent d'un peu plus bas,

Racontent que c'est la roue qui tourne, que tu ne les rajeunis pas.

 

Enveloppés de tous leurs doutes,

Ils radotent « la vie est courte »,

Toi tu souris en te disant

Que le futur c'est pas marrant…

 

Aujourd'hui résultats du bac, c'est dans deux heures  que tu sauras

Si cette année est la dernière, si en septembre tu reviendras.

Tu aimerais être plus vieille d'une heure ou deux juste pour savoir

Si l'impasse en géographie se révèle éliminatoire.

C'est la première fois de ta vie, tu voudrais que ton nom s'affiche

En première page de ton portable, au lieu de ta photo fétiche.

Les minutes sont interminables, le temps est un bel enfoiré

Qui s'amuse à prendre son temps et rit de te voir angoissée.

Et si jamais t'avais raté, si t'étais passée à côté,

Comment vas-tu leur annoncer, le pire serait de redoubler.

D'un seul coup tu prends la mesure que l'attente génère du stress,

Sans compter les ongles rongés et les boutons que ça te laisse.

 

Enveloppée de tous tes doutes,

Tu dis l'année a été courte,

Et tu t'inquiètes en te disant

Que le futur c'est important…

 

Un jour enfin tu le rencontres celui qui va te rendre folle,

Dans ta poitrine un chronomètre, le compteur s'arrête puis s'affole.

Çà fait tic et tac dans ta tête, le temps se joue de ton émoi,

« Si à cinq heures il n'est pas là, ça voudra dire qu'il ne vient pas ».

Les yeux rivés sur ton ice swatch, tu veux avancer les aiguilles,

Tu es prête à n'importe quoi, pourvu que le temps vite file.

Arriv'  l'heure du  fameux baiser, le vrai, le seul, tant espéré,

Celui qui t'empêche de dormir depuis déjà quelques nuitées.

Juste l'espace d'un instant, le temps a suspendu son vol,

L'horloge de ton cœur a flanché, tu planes  à mille pieds au d'ssus du sol.

Et puis l'instant est dépassé, et quand vos lèvres se séparent,

Tu penses que le prochain baiser ne s'ra jamais plus le premier.

 

Enveloppée de tous tes doutes,

Tu soupires « c'était trop court »

Il te sourit en te disant

De vivre le moment présent …

 

Tu te retournes et le p'tit homme à qui tu lisais des histoires,

A poussé comme un chromosome, dans ton dos et sans crier gare.

Quand son anniversaire revient deux fois par an,

Et quand ce n'est plus pour te plaire qu'il se fait beau, qu'il s'lave les dents,

Tu voudrais bien de temps en temps rouler un peu à contre-sens,

Remonter la montre à l'envers, vous donner une deuxième chance.

Si tu pouvais pauser le temps, et ne plus souffler les bougies,

Opérer un arrêt sur vie, au moins un léger ralenti.

Finalement,  finalement, tu n'as pas l' temps de vivre ton temps,

Tout juste le temps de perdre ton temps, de faire semblant, mais tu te mens.

Tu dis « tu verras mon chéri la vie d'adulte n'est que folie »

Il te regarde en se disant « être parent c'est pas marrant »

 

Enveloppée de tous tes doutes

Tu penses l'enfance est bien trop courte

Tu le vois partir désolée

Qu'il te conjugue à l'imparfait

 

Quand tu aperçois dans la glace, accrochées au film adhésif,

Les rides qui écrivent les traces de ton passé définitif,

Tu prends les armes et tu t'accroches, pour mieux lutter contre les griffes

Aigues du temps qui effiloche ton reflet à coups de canif.

Même si tu dis que tu t'en fiches de contempler ton corps en friche,

Il n'y a que toi pour y croire, parfois ça te donne le vertige.

Tu racontes à qui veut t'entendre qu' les retraités sont débordés,

Comme s'il y avait urgence à vivre, juste prouver « ça, je l'ai fait »

C'est pas la peine de t'accrocher un jour ou l'autre tu vas lâcher,

Le soir où ton môme te dira, dans neuf mois j'aurai un bébé.

Tu t'remettras à tricoter en attendant le beau baby,

Le pire est qu' tu seras d'emblée d'accord pour qu'il t'appelle mamie.


Et délivrée de tous tes doutes,

Tu l'aimeras coûte que coûte,

Tu lui diras en le berçant

« Le passé n'est pas important »…

 

 


 

 

 

 

 

Signaler ce texte