La consultation

- Bonjour Docteur.

- Bonjour, asseyez-vous, je vous en prie. Alors, que puis-je pour vous Monsieur ?

- Voilà… Mon généraliste m'a conseillé de venir vous voir. D'après lui, j'ai tous les symptômes de la maladie. En fait, je ne comprends pas ce qui m'arrive et je me demande même pourquoi ça m'arrive...

- Hum… Rien qu'à vous entendre, je confirme le diagnostic de mon confrère. Je suis effectivement un spécialiste de la question, le meilleur je crois, mais je ne vous dirai pas pourquoi.

- Ah bon… Et pourquoi ça ?

- Monsieur, nous allons commencer votre traitement dès maintenant.

- Je ne comprends pas.

- Ne vous inquiétez pas, je sais ce que je fais. Avez-vous des antécédents médicaux ?

- Non. Tenez, j'ai amené mon carnet de santé, vous pouvez vérifier.

- Oui, merci. Alors… Ah… Hum. A l'âge de trois ans, il est indiqué que vous souffriez de troubles du langage. Je suis certain que vous demandiez sans cesse le pourquoi du comment à vos parents.

- Sans doute… Mais, c'est normal pour un enfant, non ?

- A l'époque oui ! Mais maintenant, nous prenons cela très au sérieux. Vous comprenez, il est important de limiter le nombre de curieux. Les cerveaux sont de plus en plus malades, saturés de nouveautés.

- C'est aussi ce que m'a dit mon médecin. J'espère que vous pourrez m'aider à retrouver ma sérénité. J'ai tellement… d'incertitudes, sur le sens de la vie, sur l'univers…

- Monsieur, je comprends l'enfer que vous vivez. Le traitement que je vous propose est simple. Nous allons mettre en place des automatismes mentaux. Dès que votre esprit formule une question de ce genre, vous affirmez haut et fort « Je m'en tape » et vous vous administrez une gifle.

- Euh… D'accord… Je m'en tape !

Paf.

- Bravo.

- Merci, c'est vrai que je me sens déjà mieux, je crois que je vais vite guérir.

- Oui, faites-moi confiance. En attendant, il faut que vous fassiez attention car vous êtes très contagieux. Des pourquoi prononcés à proximité d'autres personnes peuvent les contaminer. Surtout, évitez autant que possible le contact avec les enfants. Les écoles ont beau être régulièrement désinfectées, c'est la population la plus touchée. Par chance, c'est aussi celle que l'on soigne le plus facilement.

- Je n'ai pas d'enfant, alors ce sera facile. D'ailleurs, je me suis toujours demandé pourquoi nous n'en avions pas mais je n'ai jamais osé en discuter avec ma femme.

- C'est une très bonne chose, croyez moi. En revanche, vous ne m'avez pas écouté : vous venez de dire pourquoi à moins d'un mètre de moi.

- Pardon, excusez-moi ! Vous n'êtes pas immunisé ?

- Je n'ai jamais contracté la maladie mais il faut que vous preniez l'habitude d'être prudent.

- Bien sûr, vous avez raison.

- Vous verrez, tout est une question de volonté. Je vous prescris une pommade contre les hématomes et on se revoit dans un mois pour faire le point.

- Merci Docteur. Tout de même, il s'agit d'une bien curieuse maladie.

- Je vous l'accorde. C'est d'ailleurs ce qui nous empêche de l'éradiquer. Nous autres spécialistes cherchons comment trouver un vaccin sans le chercher…

- Oh, vous ne le trouverez pas.

- Plaît-il ? Et pourquoi ça ?... Ah zut !!!... Je m'en tape !

Paf.