La cousine Gisèle

Hervé Lénervé

Tranche d’enfance, tronche de cake !

Quand j'étais petit, enfin enfant, plutôt, car petit je le fus à tout âge. Quand ma mémoire a commencé à laisser des traces pérennes dans mon esprit, nous habitions déjà Sarcelles Locheres, ville dortoir, poussée pour abriter les ménages populaires contraints à s'éloigner de leur lieu de travail pour échapper aux loyers prohibitifs de Paris. Nous, ma mère, ma grand-mère, mes deux frères, ma sœur et moi, mais sans la bonne, car nous n'avions pas les moyens d'en avoir une. (N'en déplaise à Robert Lamoureux). Nous, donc, logions une HLM éloignée de toute attache, de tout ancrage. La famille de ma mère se distribuait dans le sud de la France, principalement à Marseille. Bref ! Je ne connaissais personne de cette famille-là et comme ma mère n'aimait pas s'épancher, elle ne nous en parlait jamais. Je ne connaissais, donc, pas et n'imaginais même pas mes ascendants. Excepté, la cousine Gisèle, évidemment, je l'avais oubliée, celle-là.

Car chaque année que Dieu fait et que je me prélassasse dedans, nous recevions une photo de la cousine Gilette, qui avait le même âge que nous, qui n'étions pas quadruplés, pour autant. Alors, notre mère nous montrait la photo pour attester qu'elle avait vraiment une famille quelque part, au loin, mais sur cette Terre, nonobstant. Et nous écoutions distraits les mérites et les exploits de la cousine Giselle d'oiseaux.

Photo de la cousine Ginette en tutu. Putain, elle faisait de la danse classique au lieu d'aller au foot.

Photo de la cousine Gipoulette, plus âgée, montée sur un cheval. Putain elle faisait de l'équitation au lieu de faire le trottoir.

Photo de la cousine Germaine à l'Université. Waouh ! L'autre c'était une intello, ou quoi ?

Enfin, tout ceci pour dire que la cousine Gertrude nous bassinait un tantinet à être sans cesse citée en exemple pour un oui, pour un non, pour un peut-être. Nous qui fréquentions plus l'école de la rue et celles des caves que la vraie ; la buissonnière. J'allais même, un jour, jusqu'à vérifier, en regardant dans le Petit Larousse, qui était déjà pas mal Grand, pourtant, avec plein de mots dedans. Si elle ne s'y trouvait pas déjà immortalisée dans la rubrique des Noms Propres, de grandes personnes connues même si elles étaient sales, Hitler y était bien ! Eh bé, non ! Elle n'y était pas, elle n'y était pas encore, elle n'y serait jamais, d'ailleurs.

Comme bien des années plus tard, alors que ma mère n'était déjà plus qu'une mère vieille, ma mère-grand partit faire son tiercé dans un autre conte, puisse-t-elle y gagner davantage, je vis en vrai la réelle cousine Gisèle, de mes yeux vu, en vérité, je vous le dis. Elle n'était ni chercheuse au CNRS, ni même CRS, ni spationaute, ni  Georges Sand, ni Présidente de notre République, même pas, Superwoman. Elle était une obscure fonctionnaire d'une petite mairie perdue en mer. Où était, donc, la sémillante, la flamboyante cousine à l'avenir si prometteur qui avait parcouru notre jeunesse en la pourrissant ou l'inverse ?

Vous me croirez, si vous le voulez et ne me croirez pas, si vous avez un avion à prendre, mais je fus déçu ! Oui ! Déçu d'avoir devant moi la froide réalité de la Vie sans fard. Une femme sans attrait, qui parlait sans cesses, mais sans objet, avec l'accent pointu de Marseille, peu chère, la couleur en moins, un accent en noir et blanc, une bouillabaisse sans poisson. A cette époque bien sûr, j'avais cessé de croire au père Noël, dernier vestige de mes croyances, les autres usurpateurs étaient passés à la trappe depuis belle lurette. Dieux et ses bondieuseries, le Diable et ses  « mauvaisieuries ».

La cousine Machintruquette venait de me former au scepticisme cynique primaire, qui n'allait plus me quitter.

Moralité : les cousines Gisèle, germaines ou non, détruisent les rêves des enfants.

-   Qu'est-ce que tu voudras faire, petit, quand tu seras grand ?

-   Je voudrais faire cousine Gisèle. (ou me la faire, j'sais plus.)

  • Je crois qu'elle pratique assez bien l'auto-destruction mais je peux garder ton offre pour un autre contrat ?

    · Il y a environ 7 ans ·
    10

    gill

  • ma Gisèle à moi c'était Martine et j'aurais bien aimé qu'elle et sa parenté habite ailleurs qu'au 37 (j'habitais le 36) elle m'a gâté mes week-end d'ados et les zautres. Citée en exemple pour tous mes défauts dont elle avait les qualités, elle est devenue une grasse blonde insipide. Merci d'avoir réveillé ce souvenir et .... mon égo !!!

    · Il y a environ 7 ans ·
    10

    gill

    • Ecoute, ta Martine, elle ne me dit rien, mais si tu veux la trucider, je te filerai un coup demain.

      · Il y a environ 7 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

  • Tu es infernal d'idées ! Je te vois bien faire une chronique à la télé. Sur Canal par exemple, c'est la chaîne que je préfère avec Arte, bien qu'elles soient différentes....Je m'éloigne du sujet là...

    · Il y a environ 7 ans ·
    Louve blanche

    Louve

    • La Télé ! T’es folle ! Je suis moche comme un pou !

      · Il y a environ 7 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

    • Mais non t'es pas moche !!

      · Il y a environ 7 ans ·
      Louve blanche

      Louve

    • Si, si ! T’as pas vu ma photo ? Ha ha !

      · Il y a environ 7 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

    • c'est justement parce que je l'ai vu !!!!!!

      · Il y a environ 7 ans ·
      Louve blanche

      Louve

    • Houhouhouuuuu ! J’hurle avec les loups, Louve

      · Il y a environ 7 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

  • une deuxième rasade siouplait !

    · Il y a environ 7 ans ·
    Autoportrait(small carr%c3%a9)

    Gabriel Meunier

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