La fleur de l'âge

Adèle Delahaye

Les images m'assaillent, les souvenirs me reviennent par bribes...

Nous nous sommes rencontrés dans un bar, je me souviens que tu étais trop saoul, tu ne parvenais pas à mettre un pas devant l'autre.

Je me souviens qu'après ce soir-là, nous nous sommes souvent revus, dans ce même bar, parlant longuement, parfois jusqu'à la fermeture, puis continuant notre discussion dans les rues.

Puis nous avons commencé à organiser des sorties, prévu de nous voir, nous revoir, des sorties sans jamais personne d'autre que nous deux.

Je ne connaissais pas tes amis, et toi pas les miens.

Je me souviens de ce jour, qui restera à jamais gravé dans ma mémoire, ce jour où, pour la première fois, tes lèvres ont rencontré les miennes. C'était le première neige de l'année.

Je revois encore tes joues rendues rouges par le froid, tes yeux bruns me souriant, je sens encore ta main serrant la mienne, tes doigts toujours chauds enlacer les miens.

Je revois cette chambre d'étudiant, la tienne, nos vêtements jonchant le sol et nos corps emmêlés, certains de ne jamais plus se séparer.

C'était la fleur de l'âge, comme tu l'appelais. Je me souviens qu'un jour, je t'ai demandé quelle fleur. Tu m'as regardé avec un petit sourire, comme tu le faisais si souvent, et tu m'as répondu :

- La rose, bien sûr. Délicate, douce, fine et claire, elle est surtout le symbole de l'Amour avec un grand A. Le nôtre.

- Et ses épines ?

- Seuls les gens heureux peuvent y échapper, et n'aie crainte, quoi qu'il arrive je serai là.


J'esquisse un sourire, et sens les larmes me monter aux yeux. Je les essuie d'un revers de manche.

Je baisse les yeux vers cette pierre rectangulaire sur laquelle est gravé ton nom. Je m'accroupis et la caresse du bout des doigts. Elle est lisse, incroyablement froide.

Dessus, je dépose un bouquet.

Des roses.

La fleur de l'âge...

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