La maison de là-bas (2)

aile68

C'était ma chambre préférée, un peu mon grenier. J'avais toujours espéré y trouver des livres, des magazines, signes d'une époque passée dans lesquels j'aurais aimé y découvrir des événements marquants. Longtemps j'ai été amoureuse des bouquins, je ne jurais que par eux. Une fête, un anniversaire: je voulais des bouquins. Je m'accrochais à cette idée comme à la "prunelle de mes yeux", je sais l'expression est un peu bizarre mais c'est tout dire! Des années plus tard j'ai pratiquement dévalisé le papetier, je lui ai acheté beaucoup de livres que je n'ai pas lus. Pas le temps mais j'aimais l'idée de les posséder dans mes affaires, bien cachés dans mon bahut.

Mon "grenier" a toujours senti la vieille pierre et la poussière, ça lui donnait l'air plus vieux comme mystérieux, j'aimais fureter, me lancer dans des investigations personnelles dont je n'ai jamais parlé, c'était ma vie de chercher, de vouloir dénicher des trésors comme le saint graal. J'aimais aussi m'allonger dans le grand lit, sous les toits l'air était plus confiné, l'atmosphère était d'un calme absolu, il n'y avait qu'une seule fenêtre pour une chambre entière et plus loin une petite terrasse avec les tonneaux d'eau pour se laver et les toilettes. C'était un endroit un peu spartiate qui me faisait un peu peur, le bout d'un monde révolu que je n'aurais pas aimé vivre parce que sans confort. Et pourtant ce que j'aimais de cet univers c'était le four à pain et le bon pain qui en ressortait, grillé à souhait, chaud comme le coeur de mes tantes et de mes deux grand-mères. Mes racines sont là-bas, mes origines, le sang qui coule dans mes veines est né là-bas. Quand on me disait que j'étais entre deux chaises, j'imaginais les chaises de là-bas, de corde et de bois, elles semblaient fragiles, elles étaient tout simplement vieilles mais encore bien solides.

Dans ce grenier, j'aimais bien être seule. On aurait dit que je me retrouvais là-haut, le silence sentait la vieille pierre et la poussière, et puis les draps en lin du grand lit dans lequel on dormait et jouait à plusieurs... ça sentait le savon aussi et puis le bon talc. Un savant mélange d'odeurs se dégageait dans la grande pièce suivant l'endroit où l'on se trouvait et j'aimais ça les odeurs en général. Quand on m'offrait un cadeau, j'avais pris l'habitude de le sentir avant de l'ouvrir comme un jeune animal, une jeune enfant pas encore tout à fait développée. J'étais assez pénible quand j'étais petite mais d'une politesse extrême, je me rattrapais comme je pouvais. J'aimais les gens qui avaient du coeur et qui le montraient dans un bon sourire franc, bienveillant, heureux. Moi je ne souriais pas mais je pouvais m'esclaffer et rire, on n'entendait que moi dans ces cas-là. C'était le bon temps où l'on s'amusait en famille, mon grand-frère inventait des jeux, des personnages dont on se moquait, c'était si réel...


  • :o)

    · Il y a plus d'un an ·
    Gaston

    daniel-m

  • Et comme je te comprends, j'ai vécu avec ma famille, mes grands parents, mes parrains marraine, dans de vieilles maisons à plafonds hauts, aux plinthes sculptés, avec une rangée de greniers où j'avais créé des repères.
    Je suis anti loft tout blanc et aseptisé, comme si le moindre tableau était une anomalie dans cet univers de parvenus high tech.
    Les vieilles maisons mal chauffées, avec des araignées et de vieilles pierres et poutres apparentes, et surtout les grandes cheminées à l'ancienne où on faisaient cuire les châtaignes dans des vieilles poêles percées.

    · Il y a plus d'un an ·
    Lwlavatar

    Christophe Hulé

    • parrain, sculptées, oups!

      · Il y a plus d'un an ·
      Lwlavatar

      Christophe Hulé

    • De vrais monuments ces maisons! Ah les vieilles poêles percées! Nous en avions une nous aussi! Toute une époque... et de bons moments en perspective!

      · Il y a plus d'un an ·
      Coucou plage 300

      aile68

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