La musique adoucit les légumes

Hervé Lénervé

Tiens, j’vais écouter un peu de musique pour me détendre l’atmosphère terrestre.

C'est quoi ça, Ai Ci Di Ci ? Non, encore un truc religieux de castras à voix de faussets et talus, surement pas ! Voyons l'autre merde, là !  Wolfgang Amadeus Mozart, connais pas. J'vais mettre du Bach plutôt, ça s'boit tout seul. On n'comprend pas les paroles, mais tant pis. De toute façon, leurs histoires au siècle de Charlemagne, on s'en fout complètement.

Eh, si je me passais de la variété rétro française. Tiens et ça, du Fernand Raynaud, connais pas. Il chante : « Et vlan passe-moi l'éponge ! ». Oh, non, encore un truc d'intellos ! Il va me saouler avec ses théories sur la nécessité absolue de sauver l'espèce des éponges sauvages dans leur milieu naturel, la salle de bain. De toute façon, la salle de bain, elle est toujours occupée, c'n'est donc, pas moi qui vais déranger les pérégrinations aquatiques des éponges en eaux savonneuses.

Tant pis, pas de musique, je continue mon futur bestseller en silence. J'ai déjà écrit le titre. « Il était une fois, un p'tit pois. » Qu'est-ce que tu en penses ?

-         Non ! On, ne peut pas s'identifier à un héros romanesque qui serait un p'tit pois. Trop léger, le p'tit pois !

-         Et pourquoi pas, le p'tit pois, dis-moi, toi ?

-         Déjà, parce qu'il est tout p'tit.

-         Tu es bien p'tit, toi aussi.

-         Oui ! Et justement personne ne me prend pour un héros romanesque sur lequel on peut s'attacher, comme la moule sur son clocher.

-         Donc, plus le héros est loin de ce que l'on est et plus on s'identifie à lui, si j'comprends bien.

-         Oui ! c'est comme ça. On n'a surtout pas envie d'avoir un héros qui nous ressemble, ça n'fait pas rêver.

-         Autrement, j'avais pensé à une citrouille, mais, « Il était une fois une citrouille »  ça sonne moins bien et ça renvoie immédiatement à Cendrion chez les souillons.

-         Voilà justement, tu vois ! Dans ce conte, personne n'a pris la citrouille comme l'héroïne du récit. C'est la belle jeune femme qui cristallise toutes les projections, même si elle est un peu nunuche, la pauvresse. Tu comprends ?

-         Je pense que finalement je vais me passer ACDC, ça va me gigoter les neurones pour trouver un héros présentable... et une courgette, non ?

-         Non ! Trop phallique !

-         Une betterave, alors ?

-         Non ! Trop conne !

-         Topinambour ?

-         Pas assez glamour !

-         Rutabaga ?

Pas mieux ! Mais continues à creuser avec ta bêche dans ton potager, tu vas bien finir par nous dégoûter un truc qui a bon goût.

Signaler ce texte