LA PERVERSION DES MOTS
ludo06600
I
ici à l’écart des révolutions
des insectes
je sculpte un galet
et
dans l’imperfection de mes gestes
je m’efforce à voir
un visage humain
comme ces étoiles
inertes
je perds le sens de l’orientation
je ne comprends même plus
le silence des pierres
elle se penche vers l’écorce
où meurt la mousse encore verte
et
à l’oreille du chêne
trahit l’identité de l’étranger
par une inspiration ininterrompue
elle me désigne
Mars
comme seul point de repère
elle souffre lorsque le soleil
devient électrique
alors
elle répète sans cesse
qu’il lui reste à peindre le commencement
d’une crucifixion
et que je suis la dernière trace
du mensonge
il y a…
il y a à la limite de l’étang
sauf l’espace inaudible
la neige
qui chuchote
ses
phrases
couleur de pluie
quel langage au milieu des sables ?
quel langage
lorsque personne ne respire ?
entendre les pas
des chevaux sans mouvement
calmes
comme les poussières de
l’air
dans l’apesanteur du sang
ainsi
je m’en vais au-delà des dunes
rouges
dernier battement d’une parole
flottante à
l’intérieur des rêves
et pour la première fois
j’ai senti
la vitesse de l’atome brûlant
dans mes veines
inertie partielle
des muscles
l’instant de la combustion hivernale
les champs
récoltent la semence impatiente
de l’œil
elle vit comme demain
dans l’intervalle
effacé
point par point
à jamais recommencés
en suspens
avant la fracture de la colonne vertébrale
les galops assassins
d’une langue
jetée à la verticale du
corps
et je tombe dans les buissons
errants
indisponibles
comme un couple d’amants
mais qu’attendent-ils
au bord
de l’inconcevable lointain ?
HURLER…
elle hurle
elle hurle sans voir
l’incessant mouvement de l’eau
ailleurs
une silhouette informe
proche
de l’absurde
courbe des métamorphoses
et
toi…
toi
qui ne touches
la terre
que d’une
seule lèvre
au pouls somptueux
II
entre le feu et l’arc-en-ciel
elle cueille
les fruits fendus de
l’averse
retenue dans ses doigts
là
où elle touche la
foudre
l’étang semble mourir
et devenir mer
d’abord
elle parle
comme si elle connaissait
l’eau
à moitié dévorée
nul écho
sur les visages
en forme
d’îlots incandescents
reste à apprivoiser
l’horizon
et les chutes imprévisibles
de neige
l’arbre s’est déplacé
et
cette fois-ci elle
a oublié de briser les branches
avant que l’éclair
ne fuit
l’aube
à voir au-delà des longitudes
la danse du feu
sur
nos mains ouvertes au ciel
je parle pour mourir
alors
qu’au milieu des champs moissonnés
un vol de corbeaux
ressemble à l’œil qui se
nourrit
derrière les vieux masques
d’ébène
des paroles inexactes et d’irréels
corps sans visage
elle
femme-vertige
traquée au commencement
de l’incendie arborescent
croit à la naissance
d’un être doué
à moitié fictive
elle traverse les chemins d’eau
et s’éveille
près des souches muettes
à chaque mouvement
de plumes
elle a des empreintes
d’algues
plein les veines
et au milieu
des univers qui tombent
elle rêve d’horizons
superposés
dans la non-évolution
de l’alphabet
infiniment
clos
dans son abstraction
il y a
des syllabes proches de la lumière
qui sont
des stèles de néophytes
lorsqu’
elle
entend
les
pulsations de l’œsoph-
AGE DE PIERRE
elle fuit
la perversion des mots
(éclats inflammables de
silex)
comme
des fragments
d’ YEUX en perspective
III
comme éloignée des apparences maritimes
elle respire
la logique consumation de la nuit
où
il pleut des sentiers
d’Espagne
le désert est plein
d’arbustes
qui flottent dans la silhouette
des astres défigurés
et l’absent jour
danse
sur les reste poussiéreux de
l’homme
elle a bu à la cime
du typhon
accrochée aux parallèles
évanescentes
de la lune
l’air est irrespirable
vagues indestructibles
qui
traversent les formes
impersonnelles
de l’âme
il y aura sous les paupières de l’espace
la vision d’un
électro-encéphalogramme
brisé
battements sourds
d’une île
qui est encore loin
de l’avancée des déserts
source de l’innommable
copulation
des syllabes vides
seulement vivre
du sadisme attractif des phrases
à travers les persiennes
fermées
elle doute face aux gémissements
des nuages
c’était comme si elle retenait
les rivages
ornés d’empreintes de tourmaline
et
d’éclairs distants
j’aime l’atmosphère lorsqu’elle descend
sur nos phrases saphiques
et si
là sous nos pas
on entendait
le balbutiement des champs
et
le chuchotement du fleuve
et si la terre était ronde…
elle redoute
l’imminente découverte de la
vie
elle qui ressemble à
l’insecte
que l’on tue
par plaisir
elle qui ne s’éloigne
que par
l’universalité de la pensée humaine
et si la terre était ronde…
une lumière fissurée hors du tremblement
de l’œil
qui
proche de la métamorphose
contourne la masse de
l’immobile
langage
C'est très bon. C'est très beau.
· Il y a presque 13 ans ·Frédéric Clément