La quenotte.(1)

J'avais dans la bouche un terrain si miné que j'aurais pu demander une pension d'invalidité.

J'entendais les explosions jusqu'au fond de ma gorge. L'ennemi avait avancé par surprise durant la nuit, profitant du plaisir qui s'offrait à mon canon. Au petit matin, Betty, les cheveux débordant des épaules et la langue toute retroussée, se voyait décorée pour la journée de la femme, et moi, désensibilisé à tout jamais.

- Puisque aujourd'hui c'est la mienne, attends-toi à avoir les 364 autres pour toi ! avait-elle précisé.

Les fêtes religieuses étant attachées à des traditions et pratiques ancestrales, je me demandais si celle-ci allait en être une et rien que pour moi.

Chez mon dentiste il y a des fleurs et des femmes déshabillées sur les murs. Mon dentiste adore le Quattrocento, la Renaissance, ce siècle qui a produit plus de corps nus à la beauté gréco-romaine, que de guerres durant tout un Moyen Age.

Chez mon dentiste, il n'y a pas d'outils de Barbarie, puisque tout y est moderne. Avec son laser américain il découpe la dent en 2, puis à l'aide d'une spatule au carbone testé sur la lune, rempli le trou d'un composant chimique ultra dur :

- Et voilà une jolie quenotte !

Mon dentiste est aussi doux qu'une vénus de Botticelli...