la terrasse

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Aux beaux jours, elle s’invite dans votre cœur, sans vous demander la permission. Elle sait que le soleil vous fait irrésistiblement penser à elle.  

J’avais hésité lors de sa construction entre un visuel  moderne, design ou naturel à l’aspect végétatif.  Après mûre réflexion, et considérant ma nature, j’avais opté pour la seconde option.

Ma terrasse est située en Provence. On est en août et je m’apprête avec l’enthousiasme incontrôlable d’un enfant à la rejoindre.

Nichée dans les hauteurs, profitant ainsi d’une discrétion nécessaire au bien-être. Elle surplombe les collines escarpées, par endroits l’immense bleu méditerranéen ressemble à une simple tâche luisante qui se mélange à l’horizon.  

Située à l’arrière du mas, elle se décline en deux parties.  Le premier espace  qui accueille  la longue  table et les chaises, est entouré d’une  végétation où s’épanouissent en désordre jasmins, lierres,  vignes sauvages, camélia, buis… pour accéder au second espace, il vous suffit seulement de descendre deux  larges marches en pierre et alors vous découvrez la piscine à débordement  qui se fond comme par ensorcellement à  la garrigue alentour.

J’aime ma terrasse, je l’aime dans la douceur matinale, quand pieds nus sur la roche froide, à peine éveillée, légèrement vêtue, respirant l’odeur délicatement suave de la lavande et des roses, mes yeux encore  nonchalants observent l’aube en révéler chaque détail.  

Il fait chaud, d’une sueur ruisselante lentement sur votre peau. Je bronze dans un large transat aux coussins beiges et à la charpente en teck, une sorte de baldaquin  recouvert d’une fine voilure blanche. La roche bordant la piscine est brûlante, besoin de se rafraichir, je plonge et me laisse couler au fond jusqu’à atteindre la mosaïque bleue.  Je recherche l’ombre quand ma peau devenue hâlée ne supporte plus le soleil brûlant. Je remonte alors vers mon petit jardin primitif et endormie dans ma chilienne, inerte comme ces quelques lézards cachés ici ou là,  j’écoute le bruit du Sud : les cigales. De temps en temps, mon bras fait juste l’effort de se tendre vers le pichet d’orangeade posé sur la petite table ronde en fer forgé. Ce verre d’orange pressé me glace divinement tout le corps. 

C’est un endroit qui donne envie de lire, d’écouter de la musique ou de ne penser à rien. Des rêveries vagabondant à leur guise.

Je l’aime dans la sérénité du crépuscule, quand il abat sur le paysage cette lueur orangée irréelle, avant que vous ne succombiez au scintillement des nuits étoilées.  

Ma terrasse sait se faire complice des moments d’intimités. L’esprit se repose, alors le corps se sent beau, ensemble ils plongent dans la plénitude. On devient appétissant de sensualité, plus libre, plus réceptif, plus aimant de l’autre.  Les corps se dénudent, souvent intégralement, tout en se dérobant derrière des voiles aux regards d’intrus.

Au moins une fois par semaine,  elle se fait festive. D’innombrables lampes posées à même le sol et sur la table,  des lampions accrochés aux arbres et  des flambeaux plantés en terre,  la transforme en lieu convivial. Amis et parents s’y rencontrent.  La grande table sous la pergola en canisse est garnie de coupelles d’olives noires et vertes, de jambons crus, de salades multicolores, de cubes de melon, de tranches de pain frottées à l’ail  sur lesquelles s’étalent tapenades et caviar d’aubergines. Ses apéritifs affairent les bouches, en attendant que les poissons  et pièces de viande aromatisés au thym ou au  romarin finissent de cuire sur les braises douces d’un grill.  Des bouteilles de rosés, de blancs et rouges et d’anis  circulent entre les convives. Des kilos d’oranges et de citrons achetés frais du matin ont été pressés.  Au milieu de la soirée, la musique finit par prendre des envolées fiévreuses, alors les rires se font plus éclatants, les voix plus hautes et les corps plus frénétiques.  On savoure l’instant d’être ensemble souvent jusqu’au lever du jour.

Alors quand vient l’heure de l’ « au revoir »,  inévitablement  en  refermant  les volets de mon paradis  la nostalgie me gagne.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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