La Valse des Chameaux

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La Valse des Chameaux : synopsis

            Ella, c’est elle. Luis, c’est lui. Tous deux sont les héros de cette histoire, les stéréotypes des célibataires endurcis d’aujourd’hui.

         ♀ Ella est un petit bout de femme qui, à l’âge de 31 ans, n’attend que de se faire croquer par un beau mâle, comme le fruit mûr qu’elle se sent être. Problème : elle doit composer avec une timidité maladive. Ses joues rosissent pour un rien, elle bafouille au moindre embarras.

Résignée à traîner ce trait de caractère comme un boulet jusqu’à la fin de ses jours, elle s’évertue à se cacher autant qu’elle le peut derrière ses cheveux, qu’elle appelle « le rideau de sa névrose ». Du reste, Ella n’exploite pas vraiment son potentiel de séduction, n’aspirant qu’à se fondre dans le décor.

Elle aimerait pourtant avoir l’assurance de Sarah, sa meilleure amie, une grande rousse flamboyante avec des allures de superstars et à qui tout semble sourire. Et quand Sarah la traîne dans les boutiques chics de Paris, en lui disant : « Cette fois, ma poule, je veux te voir mettre ton joli cul en valeur », Ella n’a qu’une envie : décamper !

Décamper, c’est ce qu’elle fait souvent face aux représentants du type masculin. A son âge, elle dresse le triste bilan de sa vie amoureuse : un dépucelage minable à l’arrière d’une voiture quand elle avait 19 ans, une relation amoureuse désastreuse avec un homme marié quelques années plus tard, et une relation de couple moyennement prometteuse interrompue à cause d’une tromperie.

Elle en est persuadée, elle doit son triste sort à sa mère, une femme aux idées farfelues et rétrogrades, qui aime Dieu plus que son défunt mari. Sans cesse étant petite, Ella essuyait les chastes recommandations de sa mère : « Quand tu t’assois, serre les cuisses, ou bien tu tomberas enceinte », ou encore « Si tu embrasses un garçon, ça fera sonner le téléphone d’en bas ».

D’absurdes paroles qui ont marqué son adolescence, où instinctivement, elle s’était mise à craindre les hommes, en même temps qu’elle les désirait « hard’ement ». D’absurdes paroles qui la hantent encore à l’âge adulte et qu’elle porte comme une ceinture de chasteté, dira-t-elle à son psy, un quinquagénaire étrangement friand de détails salaces…

Quoi qu’il en soit, Ella est bien résolue à rompre la malédiction ; elle compte bien tout tenter pour trouver l’homme de ses rêves, celui qui sonnera le gland…ou plutôt le glas de son célibat.

         ♂ Luis a de la chance, diraient certains. Il a été élevé par sa mère et ses quatre sœurs, qui l’ont choyé comme le petit dernier de la famille qu’il est, de sorte qu’il ne souffre jamais de la moindre contrariété et moins encore de l’absence de son père, qui, à l’âge de quarante ans, avait subitement décidé de se faire la belle et de vivre ses rêves d’enfance bien loin d’une famille devenue encombrante.

Qu’importe, Luis y a largement trouvé son compte. Parmi ces femmes qui n’ont toujours eu d’yeux que pour lui, il se sent comme un coq en pâte, un prince prêt à conquérir le monde.

Mais voilà, en-dehors du cercle familial, tout n’est pas aussi rose. En grandissant, Luis a dû faire face à la réalité, au rejet, aux déceptions.

Aujourd’hui âgé de 33 ans, perpétuellement démuni face aux situations vexantes, Luis s’emporte vite, quitte à céder à la vulgarité. Et il n’est décidément pas à l’aise avec les femmes, qu’il perçoit comme de drôles d’animaux difficiles à apprivoiser.

Pour couronner le tout, Luis est assez exigent, après tout, il est beau. Il incarne la virilité typiquement hispanique. Il rêve d’une beauté torride avec de longues jambes et une chevelure blonde comme les blés. Son fantasme ultime : Shakira. Soumis aux aléas du célibat, il est contraint à se palucher devant les clips de la célèbre chanteuse au corps de déesse souple comme du chewing-gum.

Cela inspire d’ailleurs bien des plaisanteries à ses deux amis, Fred et Will, qui eux n’ont pas ces problèmes (l’un est un dragueur invétéré satisfait d’enchaîner les conquêtes, l’autre un grand romantique persuadé d’avoir déjà mis la main sur l’âme sœur).

Le hasard a fait de Luis un jardinier de profession. Il entretient les jardins et parcs de propriétaires fortunés, installés dans la campagne parisienne. Dans son métier, il est confronté à la lubricité machiavélique de certaines de ses clientes, qui sont parfois de véritables couguars affamés de sexe qui ne voient en lui qu’un bon steak, un morceau de choix bien juteux aromatisé à l’espagnole. Malheureusement, la plupart sont loin, très loin, de réveiller en lui la bête passionnée qui sommeille.

Et pourtant, cette bête ne demande qu’à être réveillée…

 Jamais, dans l’histoire de l’humanité, on avait compté autant de célibataires que de nos jours. C’est un vrai phénomène de société. Pourtant, notre monde moderne met à leur disposition toute une palette de moyens de rencontres : Sites internet, Agences matrimoniales, Speed dating, émissions de télévision…

Ella et Luis vont explorer, chacun de leur côté, ces moyens dans leur quête de la perle rare, de la personne capable de combler toutes leurs attentes. Au menu, clichés drôles et situations grotesques, mais aussi émouvantes.

Un chapitre pour elle, puis un chapitre pour lui, c’est ainsi que va le récit dans la découverte de leurs péripéties, jusqu’à ce qu’enfin, après qu’ils aient tous deux roulé leur bosse en solo, ces deux êtres se rencontrent lors d’un voyage en Tunisie, au pays des chameaux…

Chapitre 1

♀ Ella.

«  100 000 000 de célibataires, et moi, et moi, et moi ! », fredonnait intérieurement Ella, avachie sur son canapé, dans son pyjama bouloché, en compagnie de son basset hound nommé Gaston ; un drôle de clébard gentil et paresseux, une boule d’amour à l’haleine fatale.

Un verre de vin blanc rempli à ras bord dans  une main, un saladier de chips à portée de l’autre, Ella regardait Pretty woman sur le petit écran de sa télévision, tout en ressassant ses déboires sentimentaux. Ruminant ainsi le souvenir de son ex Jérémy, son joli minois en partie caché par une longue frange avait presque de quoi rappeler la bouille typiquement triste de son chien.

Et au moment crucial, où Richard Gere allait donner un langoureux baiser à Julia Roberts, une odeur tout à fait nauséabonde taquina inopinément les narines d’Ella.

Elle sursauta tout d’un coup en s’exclamant :

- Oh, Gaston ! C’est  pas vrai, t’as encore pété !

Gaston leva la tête vers sa maîtresse avec un couinement. Sa queue se mit alors à bouger de gauche à droite nerveusement, comme à chaque fois qu’elle s’adressait à lui.

Ella, quant à elle, s’était bouché le nez. Elle ajouta, la voix nasillarde :

- Vilain chien !

C’est alors que la sonnerie du téléphone retentit. A la hâte, Ella se leva de son canapé et décrocha le téléphone, placé sur une desserte, dans la petite entrée qui jouxtait le living-room.

- Allô ? Fit-elle.

- Salut ma poule !

- Ah, Sarah.

- Bien sûr, qui d’autre ? Ne suis-je pas ta meilleure amie et l’unique amour de ta vie ? Dit Sarah, la voix badine.

- Eh bien j’imagine que si les hommes disparaissaient tous du jour au lendemain de la surface de la Terre, nous pourrions envisager de vivre toutes les deux une aventure vraiment torride, plaisanta Ella, en regagnant nonchalamment son canapé.

Elle s’y assit lourdement, en tailleur, le bol de chips dans le creux de ses jambes.

- Qu’est-ce que tu fais ? Demanda Sarah, d’une voix sexy.

- Je regarde Pretty woman, en pensant à la manière dont j’ai gâché ma vie.

- Tu plaisantes j’espère ?

- Non. Ma vie est un enfer. Alors je regarde cette saloperie de film à l’eau de rose que j’adore et je bois pour éviter de suffoquer dans l’immense désert de mon célibat.

Sarah soupira, elle trouvait son amie incorrigible et avait l’habitude de ses déclarations théâtrales.

Ella poursuivit :

- Je vais finir seule. Tu sais ce que je suis ?

- Non, mais tu vas me le dire…

- Une vieille morue desséchée. On devrait me recycler parce que je ne suis plus bonne à rien, dit-elle, très pathétiquement, en esquissant une moue d’enfant.

- Arrête de picoler et éteins-moi cette télé tout de suite. Ce film est une vraie daube. Non mais sans rire, une pute à trois balles qui se fait épouser par un beau milliardaire, c’est complètement débile. Il y a au moins autant de chance que j’accouche du nouveau messie.

- Toi j’en doute, mais moi faut voir. Ça fait cinq ans que je n’ai pas vu un seul pénis, à ce rythme là, dans quelques mois je serai redevenue vierge, répondit Ella, blasée.

A l’autre bout du fil, Sarah s’écria tout à coup :

- Merde !

- Que se passe-t-il ? Demanda Ella, intriguée.

- Oh, rien. Je suis en train de me vernir les ongles des pieds et ton désespoir me fait déborder !

Ella jeta alors un regard à Gaston, toujours vautré sur le canapé comme une grande saucisse ; la tête posée entre ses pattes avant, il regardait lui aussi sa maîtresse de ses mirettes mouillées de chien battu. Attendrie, Ella lui dit alors, en réponse à la boutade de Sarah :

- Tu vois mon chien, il n’y a que toi qui m’aime vraiment.

Gaston agita encore sa queue.

Sarah faisant honneur à son franc-parler en remit aussitôt une louche :

- Arrête tes conneries et bouge-toi les fesses, ou bien un de ces quatre tu vas découvrir une toile d’araignée entre tes cuisses.

Ella s’exclama, saisie de dégoût.

- Si tu ne te décides pas à te prendre en main, je vais m’en charger moi, et je te garantis que ça va déménager ! Insista Sarah.

- Ah oui, et comment comptes-tu t’y prendre ? D’un coup de baguette magique, tu vas faire de moi une nana de 31 ans sexy et épanouie ?

- Exactement ! Répondit fièrement Sarah.

Les deux amies gloussèrent en cœur.

Puis Sarah continua :

- Voilà ce que je te propose, enfile une petite robe sexy et pas tes vieux trucs de none et enlève-moi cette tignasse de ton visage, qu’on voit enfin tes jolis yeux. Je passe te prendre dans une heure, on va au Mystic pub ce soir.

- Oh… Je ne sais pas trop tu sais… Ces endroits qui fourmillent de monde, c’est pas trop mon truc. En plus, si c’est pour que je vous observe Mike et toi vous bécoter toute la soirée, je préfère de loin continuer à me morfondre toute seule chez moi.

- Mike est de sortie, on sera entre filles. Allez ! Il est temps de te décoincer un peu ! Jamais tu ne rencontreras d’homme cloitrée chez toi. Ou alors…

- Ou alors quoi ? Fit Ella, curieuse.

- Inscris-toi sur un site de rencontres…

Ella ricana jaune.

- Non, pas question. Mauvaise idée.

- Pourquoi ?! C’est une super idée, au contraire. Tout le monde tente le coup de nos jours. Et puis c’est excitant ! Imagine-toi seule, derrière ton ordinateur, à contempler les fiches de tous ces mecs célibataires en chaleur, offerts pour toi comme sur un plateau. Oh, qu’est-ce que j’aimerais être célibataire tout d’un coup !

- Célibataires, tu parles, la moitié doit être mariée. Et je ne parle même pas des pervers qui doivent traîner sur ce genre de sites.

- Quelle rabat-joie tu fais ! Tu veux trouver un homme ou non ?

- Bien sûr, oui !

- Alors tente le coup ! Ne bouge pas ! Je prends mes clics et mes clacs et j’arrive ! Conclut Sarah enjouée, avant de raccrocher brutalement le téléphone.

- Allô ? Allô ?

Ella n’avait pas eu le temps d’en placer une. Elle le savait, dans près d’une demi-heure, son amie allait débarquer chez elle la bouche en cœur et la tête pleine d’idées délirantes pour la caser. Ainsi, assise là, dans le living-room de son joli deux pièces parisien à la décoration très girly, Ella songeait, l’air désenchantée, qu’elle n’échapperait pas à son inscription sur un site de rencontres.

Elle n’avait pas avoué à Sarah qu’elle y avait quelquefois déjà parcouru les catalogues des célibataires offerts sur la toile, mais qu’en fait, elle n’avait jamais eu de déclic. The déclic !

Il lui avait plutôt semblé parcourir un album de chameaux, aux faciès peu engageants.

Et comme Ella craignait déjà que son amie la pousse dans les bras d’un de ces « tue l’amour », elle noyait sa nervosité dans le vin, si bien que lorsque Sarah frappa enfin à la porte, elle n’avait plus les idées très claires ! On peut même dire qu’elle se serait sentie légère, si elle n’avait pas eu tant de peine à atteindre la porte de son appartement.

C’est donc l’esprit bien embrumé qu’elle se rendit, en titubant, devant la porte d’entrée, tandis que Sarah tambourinait en lui disant :

- Ella ! Je ne vais pas attendre toute la nuit !

L’œil torve, contrainte à se pencher vers le verrou pour y voir, la pompette Ella ouvrit enfin la porte à son amie.

Sarah se tenait sur le palier, dans une attitude souveraine, vêtue d’une robe rouge et d’escarpins si hauts qu’ils lui faisaient des jambes interminables. Ses cheveux longs et roux éclairaient son teint très clair et retombaient le long de ses épaules, tandis que le médaillon de son collier s’enfonçait voluptueusement dans son décolleté pigeonnant.

La belle Sarah observa de haut en bas son amie, l’air désabusé, avant de lui lancer avec ironie :

- Mon dieu, saillant le pyjama à fleurs et j’adore tes pantoufles de gamine attardée. Très glamour !

En entrant, tout en faisant claquer ses talons sur le plancher, elle ajouta :

- Je crois qu’il est vraiment temps que je me mêle de ta vie amoureuse.

Lorsqu’elle arriva dans le living-room, elle ne manqua pas de repérer la bouteille de vin presque vide sur la table basse et l’écran de télévision figé sur le menu du dvd de Pretty woman.

- J’ai changé d’avis, continue de picoler et sers moi un verre aussi.

Ella, titubant à la manière d’un manchot, servit tant bien que mal un verre à son amie.

- Mademoiselle ne boit jamais une goutte quand on sort mais elle se biture seule chez elle, ajouta Sarah.

Ainsi armée de leurs verres les deux amies s’installèrent devant l’écran de l’ordinateur portable d’Ella et Sarah se lança, joyeuse, à la conquête de la toile magique. C’est les mirettes emplies d’idées légères que les deux amies pénétrèrent dans la caverne aux célibataires de «Biglove2toi.com ».

Sarah cria de joie en faisant rebondir ses fesses sur le canapé comme une enfant, lorsqu’elle vit le nombre extraordinaire d’hommes inscrits sur le site.

-  Regarde ma chérie, 200 000 mecs t’attendent ici ! Dit-elle, enjouée.

Ella, que l’alcool avait quelque peu désinhibée, se laissait gagner par la ferveur. Toutes deux écarquillaient les yeux, tout en scrutant les profils des prétendus princes charmants.

- Alors, tu le veux comment ton homme ? Brun, blond ? Plutôt intello secret, sportif sexy ou businesse man ? Dis-moi tout ! Lança Sarah.

Ella tentait de rassembler ses pensées, en se concentrant. Elle regardait son amie, plissant les paupières autour de ses yeux brillants et tout à coup presque coquins. Sa réponse fut presque celle d’un enfant élaborant sa précieuse liste au Père Noël :

- Je veux un beau Prince aux cheveux longs, dit-elle en se passant lascivement la main dans les cheveux.

- Oui,  mais long comment ? Comme  Jésus, ou comme …

- Comme Antonio Banderas, répondit Ella d’une voix sensuelle, en forçant l’accent espagnol.

- D’accord, alors je mets : mi-long, parce que tu vois, Antonio Banderas, je crois qu’ils ne l’ont pas dans le catalogue, et s’ils l’avaient, il y a 8 millions de bonnes femmes qui lui sauteraient dessus, ma chérie.

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