L'abandonnée.

Les dates peuvent faire mal. Surtout pour ce genre de drame. Cette date c'est le 15 décembre pour elle. C'est le 15 décembre qui a fait d'elle une abandonnée.

Tout est récent et le passé la rattrape parfois. Quand elle est dans son lit, qu'elle tourne la tête vers la fenêtre et qu'elle la voit dans ce cadre. Quand elle sort de la douche et aperçoit son nom en se regardant dans le miroir. Juste là sur sa côte. Quand elle prend un verre avec un parfait inconnu qui lui parle de ses peurs. Mais lui n'a rien vécu. Rien de tel. Alors son ventre se noue. Les larmes remontent de son estomac. Elle essaie de déglutir pour les réprimer.

« -Non, pas ici! Qu'il arrête s'il-vous-plait. »

Mais ses yeux la piquent déjà. Elle se laisse aller. 

Ce soir là, j'étais l'inconnu qui avait tout mis sur la table. C'est à cause de moi si elle pleure. Et je m'en veux de la rendre si triste. 

Je la regarde tendrement et lui sourit. Je pense qu'elle a compris qu'elle n'a rien à craindre. Alors elle se livre. Et laisse sortir ses larmes. Elle me dit qu'elle l'a vu. Une fois. En rêve. Toute rationnelle qu'elle est, elle a envie de croire à ça. Et je la comprend. Elle me parle de celle qui l'a quitté, avec la force d'une femme. Celle qui l'aidera à se relever à chaque fois qu'elle tombera. Elle parle d'école au bout du monde et de voyages. De ce que sa soeur lui a transmis. Elle m'impressionne. Et alors que les larmes sèchent, j'ai envie de lui dire qu'elle serait sa fierté. Que d'où elle est, elle se permet encore de guider ses pas. Mais c'est le genre de choses difficiles à dire. Et j'ai pas envie de la blesser plus. Alors je lui souris. Un sourire qui lui souffle que tout ira bien. Parce que, là, tout de suite, c'est la première chose qui me vient à l'esprit. 

Et de toute façon, quoi qu'il arrive, je sais qu'elle aura toujours la force de se relever, cette abandonnée.