L'ange déchu - Chapitre 1
cecileboiscourbeau
Chapitre 1
“Nous sommes les messagers. Rejoins-nous à Aggela et accomplis la Prophétie. Nous sommes les messagers…” Adel se réveilla en sursaut, des mèches de cheveux collées sur son front par la transpiration. Ses yeux se posèrent sur la fenêtre où il vit le vieux pommier du jardin, tordu par la tempête qui rageait au dehors. Ce n’était qu’un rêve. Ce n’était que Le Rêve. Cela faisait déjà deux lunes que les phrases résonnaient en écho dans son esprit. Il aurait du s’y habituer depuis. Pourtant, il éprouvait toujours un sentiment étrange, comme si sa vie était mise en jeu, son âme jugée par les trois Necros de l’au-delà. Il secoua la tête désormais complètement réveillé : son père lui avait trop bourré le crâne de tous ces boniments, il était trop crédule. Incapable de pouvoir se rendormir, Adel prit son pantalon de toile qui traînait à côté de sa paillasse et malgré l’orage, décida de sortir prendre l’air. La bruine lui fouettait doucement le visage, mais cela ne dérangeait pas et apaisait plutôt sa peau brûlante. Il se dirigea vers la grange, les pieds déjà mouillés par l’herbe humide. Il pesta contre la porte qui grinçait : il ne voulait pas réveiller son père, il se fatiguait vite ces derniers temps et le peu qu’il arrivait à dormir ne devait pas être gâché. L’odeur du foin l’apaisa : il aimait cet endroit où il avait passé toute son enfance. Il flatta le flanc d’une jeune génisse née depuis peu et qu’il affectionnait particulièrement. Après ses nombreux cauchemars, il lui fallait reprendre contact avec la réalité qu’il connaissait depuis toujours pour ne pas perdre pied. D’autant que les maux de tête que lui provoquaient ces visions devenaient de plus en plus insoutenables avec le temps. Il s’allongea sur la botte de foin au fond de la remise. Les épis de paille lui piquaient le cou, mais il se sentait mieux que dans l’atmosphère lourde et moite de la maison. Il s’endormit.
Quand il rouvrit les yeux, le matin était déjà presque là. On voyait le soleil qui commençait à poindre derrière les montagnes du Laas. Il devait être environ six heures. Adel fronça les sourcils : d’habitude, son père était debout vers les 5 heures pour traire les vaches. Il se leva avec peine, enleva les bouts de foin restés dans son abondante chevelure noire et repartit vers la maison pour voir si tout allait bien. Il poussa la porte, grimpa les escaliers, un peu anxieux. Son père préférait dormir à l’étage qui gardait mieux la chaleur que là-bas, qui était sans cesse traversé de courants d’air. Quand il entra dans la chambre, Adel sut que ce n’était pas de bonne augure. Son père respirait avec difficulté, il suffoquait presque. Il accourut à son chevet, lui caressa le front : il était brûlant de fièvre. Le vieil homme s’aperçut de la présence de son fils et lui adressa un regard implorant. Il tenta de parler, mais Adel l’en empêcha d’un geste. “Ne bouge pas, je vais chercher Iama.” Le vieux Iama était le seul médecin du village et l’on craignait beaucoup qu’il puisse devoir s’en aller un jour puisqu’il n’y avait pas de successeur pour prendre sa suite et assurer la santé du village. Mais pour l’instant, le médecin était encore suffisamment solide, et heureusement pour Adel, habitait à deux pas d’ici. Adel descendit les marches quatre à quatre, puis courut comme un fou dans les allées du village de Polichné. Deux rues plus loin, il atteignit la maison de Iama. Il ne prit pas la peine de frapper à la porte et alla débusquer le vieux médecin qui dormait encore dans son lit. “Iama dépêche-toi c’est mon père, il va très mal, arriva-t-il à balbutier, encore tout essoufflé. Iama, qui connaissait le mauvais état de santé du paysan, comprit l’urgence de la situation, rassembla rapidement son matériel et suivit Adel aussi vite que lui permettaient ses vieux os.
Adel faisait les cents pas devant la porte de la chambre. L’examen de Iama semblait durer une éternité. Le médecin avait ordonné à Adel, malgré les réticences de ce dernier, de ne pas assister à l’examen, il était, selon lui, trop nerveux. La porte s’entrebâilla enfin pour laisser passer le frêle Iama, songeur. “Ton père a trop travaillé, il s’est épuisé. J’ai peur que ses poumons ne tiennent pas l’hiver.”“Il n’y a rien d’autre à faire ? s’enquit Adel, abasourdi par la nouvelle, mais reconnaissant envers le médecin qui lui avait épargné de trop longs discours remplis de vains espoirs. Iama secoua tristement la tête : “Ton père savait qu’il mettait sa santé en danger. Je lui avais dit plusieurs fois de prendre du repos mais tu le connais, il n’en a fait qu’à sa tête. Il s’est calmé maintenant, je lui ai donné un remède pour qu’il respire mieux. Il a demandé à te voir. Ne reste pas trop longtemps, il doit se reposer.” Adel mit sa main sur l’épaule du guérisseur, le remerciant ainsi de son intervention et entra dans la petite pièce. Il fut ému de voir son père ainsi diminué, lui qui l’avait connu si vaillant. Il s’assit à son chevet, et attendit que le vieil homme soit prêt à lui parler. “Adel, mon fils…”Sa respiration était sifflante, il prononçait les mots avec difficulté. “J’aurais voulu que tu me vois dans un autre état.” Adel ne put s’empêcher de sourire : son père avait toujours voulu paraître si fort. Quand il n’était encore qu’un enfant, il lui semblait presque invincible, mais avec le temps, il avait compris que ce n’était qu’une façade. Le géant s’écroulait. “Je dois te dire des choses…des choses importantes. Je n’ai jamais osé te les avouer mais je crois qu’il est temps de te révéler la vérité. Je ne voudrais pas partir avec ça sur le cœur.” Il fit une pause, guettant avec appréhension les réactions de son fils. Adel, bien qu’intrigué, n’en laissa rien paraître. “Je t’ai toujours dit que ta mère nous avait quitté à ta naissance. En réalité, elle est morte bien avant, avec l’enfant qu’elle attendait. Mon père m’avait laissé de l’argent. Alors, je suis allé à Emenë, dans le temple des Gennesis. Je t’ai acheté.” L’annonce lui fit l’effet d’une douche froide. Bien sûr il connaissait ce temple, il l’avait vu plusieurs fois quand il était passé à Emenë pour vendre le bétail. Personne ne savait exactement d’où sortaient ces enfants qui naissaient tous les jours à l’intérieur du temple, contrôlé totalement par les Eminences. Au village, les Eminences faisaient figure de sorciers : mystiques et en même temps savants, ils avaient la mainmise sur le savoir et la religion. On ne savait pas d’où ils tiraient leurs connaissances, mais ils étaient craints et respectés. Cependant, même si certains s’accordaient à dire qu’ils étaient utiles à la société, jamais un villageois n’avait eut l’audace de s’aliéner avec les lois qui gouvernaient les naissances du Gennesis. Ces pratiques étaient réservées aux riches, les marchands, les administrateurs et les soldats. Ces gens-là n’étaient pas du même monde qu’eux. Instinctivement, Adel baissa la tête, déçu, en colère. Il n’eut pas le courage de dire ce qu’il pensait au malade alité et quitta brusquement la pièce, n’écoutant pas les plaintes de son père qui tentait désespérément de le faire revenir.
Je me réjouis de lire la suite. Très prenant!
· Il y a plus de 11 ans ·laera
Tu pourrais être un auteur jeunesse , pour les 9-13 ans de préférence. Tu as une écriture facile, tant dans le syle que la forme. Je ne sais pas ce que va donner ce scénario, et tu as commencé un peu rapidement. Mais même si je ne lis ce genre de livre que par conscience professionnel, tu passerais comme une lettre à la poste entre Muchamore et Price ( cherub et starter )
· Il y a plus de 11 ans ·jone-kenzo
J'ai rarement vu une syntaxe aussi parfaite ! Franchement, y'a rien à dire, c'est magnifiquement écrit. Et toute cette mythologie que tu as créé, c'st hallucinant ! Il faut une suite ! Impérativement !
· Il y a plus de 11 ans ·octobell