L'antre des souvenirs

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Participation au concours « Le logement parfait » Parfois, on ne choisit pas.

Un abri pour quatre, voilà ce qu'on cherche. On n'est encore que trois.

Une impression

On arrive devant cette maison, une de plus sur la liste des visites programmées. Ton ventre s'arrondit comme les fruits du cerisier de ce jardin deviennent rouges. On aperçoit dans la haie de thuyas un figuier qui pousse sauvagement, une graine jetée-là qui a trouvé sa terre. Un lieu pour que grandisse la vie, ce qu'on cherche. Un chat parcourt nonchalamment la petite pelouse et vient se frotter aux jambes de notre premier fils, qui en rit. Nous sourions, nous entrons.

Une histoire

1967. La maison en a accueilli d'autres avant nous. Elle fait son âge, nous aurons du travail. Une époque où on savait choisir les matériaux, où on connaissait les bonnes méthodes, où le temps pour bien faire les choses ne manquait pas. Un regroupement d'artisans avait élevé ces demeures, modestes, mitoyennes, en ville. Chacun la sienne, pour les familles, et on aidait sur le chantier du voisin. Une époque où on savait ce qu'était le partage. Quelques fissures témoignent du terrain qui a bougé, mais la structure est là, en place. On a confiance.

Un lieu

On entre par la véranda, quelques marches un peu hautes pour tes jambes qui vous portent toutes les deux. Le gamin est dans le jardin avec le chat, il est déjà chez lui. On le laisse, il est en sécurité dans ce terrain clos.

Petite pièce, un simple lieu de passage pour les anciens propriétaires. De la place perdue si tu veux mon avis... Une porte en bois la sépare du reste de la maison, l'ancienne entrée, vestige du balcon que fut la véranda avant aménagement. Je réfléchis. Pas très bien isolée, les fenêtres en alu datent, et l'air y a trouvé un passage. Une marge de négociation.

Porte en bois passée, un couloir, un escalier et une porte dans le renfoncement, deux portes à gauche, une à droite, une autre tout au fond en face. J'approche du mur, tapote dessus avec mon poing. Ça sonne creux. Je te regarde et tu souries. Tu devines. On va jouer de la masse, aérer tout ça. On découvre salle de douche et toilettes derrière les portes de gauche. Pas bien grand pour les enfants, il va falloir s'arranger. On avait imaginé une baignoire, pour nos moments tranquilles après le coucher des enfants… Bon, on verra. La porte du fond ouvre sur la cuisine et les années soixante-dix, et la dernière à droite sur un salon, pas bien grand non plus. A part la véranda, tout le premier niveau est en double-vitrage, on fera des économies de chauffage, tant mieux.

On monte à l'étage. Les trois chambres sont belles. Lumineuses. Spacieuses. Regarde, là, dans le coin, on aura même la place de mette l'armoire que tu aimes tant, et peut-être même une coiffeuse, comme tu en as toujours rêvé ! Imagine déjà les chambres des enfants, pleines de jouets, toujours encombrées, un vrai combat pour les faire ranger ! Que des jouets en plastique et à piles, qui font du bruit, l'horreur ! Des trucs offerts aux anniversaires et à Noël, même pas par nous ! La vie, quoi ! Il y a deux grands placards aussi, de quoi entasser, comme on le fait toujours, on sait jamais ça peut servir. Je monte dans le grenier, seul car tu ne peux évidemment pas me suivre, et je te raconte : du potentiel, la future salle de jeu pour les mioches qui seront moins gênés par la petite hauteur sous plafond. Tu vois, on trouve des solutions pour les jouets !

Un passage par le sous-sol, on voit la place pour la voiture, le lave-linge et mes outils. C'est pas mal, hein ? On remonte, des marches encore, ça nous fera les cuisses. Tiens, le mur entre la cuisine et le salon, ça sonne creux aussi ! De nouveau un coup de masse, on ouvre tout, salon, cuisine, couloir et véranda. Un seul et grand espace. Le carrelage froid, on le remplace par un parquet, pour se balader pieds nus. La lumière rentre de tous les côtés, directement au Sud côté fourneaux et salle à manger, Nord et Est vers la véranda. Regarde, ça, on casse ! Là, la porte, on la ferme, et on passe par là pour déposer le landau de la petite ! Pour les travaux, on en profite, il y a les aides, on isole par l'extérieur et la vieille chaudière à fioul, Hop ! Dehors ! Bonjour pompe-à-chaleur ! Et puis…

Tu me saisis le bras. Tu m'arrêtes… Tu te plies légèrement vers l'avant, la courbure de ton dos trahit des douleurs abdominales, ta main caresse le fruit de notre amour. Tes yeux se lèvent vers moi et me regardent, inquiets et joyeux. Je t'interroge par mon sourire. Oui. C'est le moment.

On a trouvé notre maison.

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