LE CANCRE
virgo34
Adrien Dumont était à la retraite depuis plus de dix ans. Il coulait des jours heureux avec son épouse dans un petit village de Provence où les activités ne manquaient pas. Ses journées étaient bien remplies. La pétanque le maintenait en forme physique. La lecture, le scrabble et la belote sur le web entretenaient son mental.
Mais un jour, il fut pris de crampes abdominales qui le faisaient souffrir à intervalles réguliers. Il ne s'en inquiéta pas car il avait depuis son jeune âge des digestions difficiles qu'il pensait responsables de ses malheurs. Les douleurs se manifestaient certains soirs quand il venait s'allonger dans son lit.
Une nuit, elles le réveillèrent. Sa femme, affolée, appela le service de médecine de nuit. Vingt minutes après l'alerte, on sonna. C'était le médecin. Dès qu'il le vit, Adrien commença à se sentir mieux. Mais le praticien ne l'entendit pas de cette oreille et Adrien fut soumis à une auscultation approfondie. Le diagnostic tomba : la vésicule biliaire !
Adrien fut transporté en urgence à l'hôpital le plus proche où, dès son arrivée, il fut pris en charge par l'interne et l'anesthésiste de service. Au petit matin, un brancardier le descendit au bloc opératoire. L'opération ne s'éternisa pas et Adrien fut rapidement remis sur pied.
En fin de matinée, il sortit peu à peu de sa léthargie, bercé par un doux murmure : "Les sanglots longs des violons... Mignonne, allons voir si la rose... C'est un trou de verdure où chante une rivière... Demain, dès l'aube..."
"Quel doux discours ! Est-ce possible ?", pensa-t-il en se remémorant son aventure de la veille.
- "Bonjour, Monsieur Dumont ! Vous me reconnaissez ?"
Adrien avait beau réfléchir, il ne voyait pas... et son cerveau, rendu paresseux par l'anesthésie, ne voulait pas en savoir davantage.
- "Je suis Kévin Langevin, un de vos anciens élèves !"
Un sourire illumina aussitôt le visage d'Adrien qui, incapable de réagir plus vivement, se remémora tout un pan de sa vie. Il se revit écrivant au tableau noir les mots-clés de la leçon et récitant des poèmes à des adolescents peu motivés. Et le "cancre" était là, devant lui, à lui susurrer des vers qu'il aurait dû avoir oubliés mais qui avaient finalement atteint leur but. Ce fut la plus grande satisfaction de son existence.
Et quand, quelques jours plus tard, il rentra chez lui, il avait repris goût à la vie et échafaudait des projets ambitieux avec son épouse.
Le cancre d'antan qui remotive le prof à la fin, c'est finement bien mené. Comme quoi on peut ne pas être à la hauteur à un moment de notre vie et pouvoir faire quelque chose de formidable après :-)
· Il y a plus de 8 ans ·Yitou
C'est surtout que les conséquences ne sont visibles que bien après l'action.
· Il y a plus de 8 ans ·virgo34
À mesure de volonté, à force de travail et bienveillance.. C'est un très bon texte !!
· Il y a plus de 8 ans ·Yitou
Merci, Yitou !
· Il y a plus de 8 ans ·virgo34
ben;.. du prof ! finalement il y a une belle morale !
· Il y a plus de 8 ans ·Gabriel Meunier
Vu du côté du prof, c'est évident et motivant.
· Il y a plus de 8 ans ·virgo34
sympa ! j'ai vécu à peu près cette aventure !
· Il y a plus de 8 ans ·Gabriel Meunier
Du côté du cancre ou du côté du prof ?
· Il y a plus de 8 ans ·virgo34
tout cancre peut accéder à la rédemption!
· Il y a plus de 8 ans ·menestrel75
Oui, parce que dans tout cancre sommeille un génie.
· Il y a plus de 8 ans ·virgo34