Le dico des marmots. (elle)

Seb Fontenay Meaza

J'ai rencontré une fille cet été. J'ai apparemment réussi à la trainer sur ce site. Elle m'a poussé à redéfinir "la rencontre", en voici un extrait.

CIN EQUANONE (ADV.)

Personnalisation d'une condition nécessaire.

Elle avait en un sens raison. Ceux qui l'entourent la touchent. Et je dois dire que je n'y comprenais rien. Parce qu'être heureux c'est un apprentissage, et il s'avère que je suis encore novice et qu'elle est mon mentor. Si les gens la touchaient, leur détresse me faisait me sentir utile. J'aimais le monde. L'histoire qu'il portait me transportait. Les gens étaient secondaires sans doute. Mais maintenant que j'y ai gouté, dur de m'en passer. Elle m'a appris à les aimer, pas seulement les observer et interpréter, mais aimer, et aujourd'hui je suis heureux. Et sa personne est la condition sinequanone à ce bonheur, qui découle simplement de ses sourires.



ENFEMME (N.F)

Créature mystique ayant la candeur du nourrisson et la maturité de l'adulte. Contrairement à l'enfhomme, clairement atteint du syndrome de Jack (RIP Robbin), qui agit comme un gosse au déguisement d'homme, l'enfemme a dû s'adapter à son enveloppe physique, en poussant le  sérieux à son paroxysme. Mais lorsqu'elle s'empare de ses armes créatrices, le masque tombe, et l'enfant prend les commandes. Une imagination débordante, une plume talentueusement adorable et un coup de crayon puérilement inventif, l'enfemme s'emploie à dessiner cet esprit infantile avec un attirail lexical et stylistique dont elle ne connaît pas la force. Car comme tous les enfants elle croit avoir beaucoup à apprendre, alors qu'elle a beaucoup à enseigner.


FÉLINITÉ (N.F.)

Féminité animale.

Elle s'observe rarement. Souvent par une force qui se dégage de leurs traits. Par une attitude prédatrice, sans peur apparente. Elle était la félinité incarnée. Les yeux d'une conquérante, perçants, une silhouette agile et redoutable. Si elle était un animal, une panthère, une superheroine, Catwoman. Une prédatrice urbaine, à l'instinct maternel. Une sauvage civilisée. Car ce genre-là vous bouffe tout cru, vous n'avez aucune chance. Alors quand elle sort les griffes par peur, prête à bondir, je frémis. Non pas de peur, mais de fascination.


L'AUTO-MÔME (N.F.) 

Il y a de ces personnes qui n'ont besoin de personne. Évidemment, affectivement, elles sont humaines, et se nourrissent de ceux qui les entourent, mais pour tout le reste niet. Ces personnes-là ont eu la lucidité de voir que rien était acquis, et surtout qu'il ne fallait jamais avoir de dettes. Que ce soit pour une pizza ou un billet d'avion. Si elle voulait obtenir quelque chose ce sera à la pudeur de son nom. Cindy, elle l'a appris bien vite. Encore môme. Alors qu'aujourd'hui on nous parle de toutes ces femmes actives, j'aimerai bien qu'on nous en dise plus sur ces auto-mômes.


L'ARTISTE REFOULÉE (EXP.)

Comme l'homo refoulé, l'artiste refoulée dément, en connaissance de cause, ou non, toute affiliation avec la qualification donnée.

J'ai eu la « chance » de rencontrer un artiste refoulée. Une vraie. Une qui s'était toujours donné comme mot d'ordre de ne jamais donner raison à un compliment fait sur ses talents artistiques. Elle portait depuis si longtemps le masque de la fille logique et cartésienne, qu'elle en était venue à ne plus savoir apprécier ses propres œuvres. Elle s'auto-déclarait copieuse ou reproductrice. Connerie. 

Elle ne l'admettra jamais, mais je suis sûr qu'elle avait ces talents très jeunes, et que sa chambre d'enfant regorge de trésors plumistes ou crayonnés. Il s'avère que cet enfant a réussi à garder une place importante. Cachée, mais importante. Et il prend le dessus dans ses dessins. Alors que l'adulte lui, plus logique, trône fièrement dans ses écrits. 

L'enfemme dans toute sa splendeur. Artiste de la vie.

Elle voyait la beauté chez les autres, s'en inspirait parfois. C'était une artiste si bien portée sur eux, qu'elle en devenait aveugle de son propre art.

Elle aurait dû s'en rendre compte... Rien que pour ça je l'appellerai artiste du cœur. 


LA NEOLOGISTE (n.f )

Comme Rimbaud, S. est un(e) vaillant soldat de la langue française, maniant ses mots avec la beauté du samouraï et la précision du sniper. Mais des fois, l'âme un peu cubaine, elle devient une révolutionnaire.

Elle contrarie, avec son sourire de tueuse, les codes, que certains illuminés ont imposés depuis si longtemps. Elle crie son amour pour Voltaire en levant fièrement son majeur. Elle les aime et les emmerde. Elle fait valser leurs trouvailles, mixant leurs années de recherches, écorchant leur si précieuse langue, apre, pour lui donner un nouveau gout. Un gout fruité et acide, sucré et fort. Elle opère cette si vieille maitresse pour lui redonner une jeunesse de catin hollandaise.

Parce que pour elle, les mots ne sont pas assez pour dessiner tout ce qu'elle désire. Il lui en faut d'autres. Des nouveaux. Des mieux. Mais toujours des esthétiques. Elle emmerde tous ces anglicismes édulcorés qui prennent peu à peu place dans les rangs de notre vocabulaire. Elle, elle crée. Elle érige un petit bataillon d'enfhommes, sac à mots sur le dos,  et les envoie artister aux quatre coins de ma tête. 


(...) 

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