Le gouffre

atsuna-revane

Un jour, en me réveillant, j'ai réalisé quelque chose d'important. Une pensée qui m'a transpercée comme une flêche, qui m'a transfigurée. Cette personne à côté de laquelle je me lève chaque jour depuis plus de six mois maintenant, cette personne-là, je l'aime. Sincèrement, et si profondément que j'en ai des vertiges.

Bien sûr, depuis que notre relation a commencé, j'ai toujours apprécié l'embrasser, passer du temps avec lui, être dans ses bras, profiter de ses sourires. Mais ce jour-là, j'ai compris que c'était bien plus fort que ça. Et pas seulement parce que je veux passer le restant de ma vie à ses côtés.

C'est quelque chose d'effrayant aussi, de se rendre compte à quel point il est essentiel à ma survie. À quel point les journées passées loin de lui me paraissent insipides, insignifiantes. Effrayant de se dire "s'il me quitte, je pourrais en mourir...". Je n'ai jamais pensé à ça jusque là, je trouvais même l'idée ridicule. "Pourquoi désirer mourir quand l'autre se détourne de nous ? La vie continue pourtant !" Mais maintenant je comprends. Quand l'autre devient le souffle, l'oxygène, le point de repère, le roc inébranlable, la main douce et rassurante, l'étreinte protectrice, le soutien d'une parole affectueuse, le sourire attendri ou amusé, alors on a l'impression d'imploser. Il est ma lumière, plus vive que jamais.

Pourtant j'ai peur de tomber dans ce gouffre, de me faire happer. J'ai peur que sa lumière n'éclaire toutes mes ombres, j'ai peur que ces ombres le fassent fuir. Et si je n'étais pas à la hauteur ? Et si je ne méritais pas tout ce qu'il fait pour moi, par sa simple présence chaque jour à mes côtés ?

Je suis maladroite, distraite, mal organisée, tout le temps fatiguée, angoissée, je suis une véritable madeleine avec un coeur en porcelaine. J'ai peur de déranger, de respirer ou de penser trop fort, j'ai peur de me planter.

J'ai peur de le voir s'en aller.

J'ai envie de sourire et de pleurer, de me blottir contre lui en lui disant encore à quel point je l'aime, à quel point il m'est essentiel... Et rien ne m'a jamais paru plus réel.

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