Le hasard ? Mon cul ! (Once upon a time in L.A - part.1)

wic

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Chap. premier


La posture de l'homme qui attendait sous le porche n'avait rien de naturel. L'épaule de son pardessus contre le mur ne collait résolument pas avec le jeu nerveux de ses mains. Et surtout, son regard s'enfuyait dès que je tournais la tête dans sa direction.

Une fois, deux fois, trois... Allez, entre nous,  j'avoue que je n'avais rien contre la convergence des hasards et qu'il m'était même arrivé d'apprécier à plusieurs reprises de telles brochettes casuelles à l'époque étincelante de Frisco. Mais franchement, quand le hasard devient déterministe avec la régularité de métronome, autant foncer direct à Vegas et entrer au Caesar Palace, la chance de toucher le gros lot est largement plus grande là-bas. Passons.

Coincé dans la caisse pourrie de Mike, j'ai malgré tout réussi à virer ma veste tout en choppant au passage le vieux Colt dans la boite à gants. Le Gros devait cuver son whisky à cette heure et autant que je m'en rappelais, la dernière journée avait été longue pour lui, particulièrement au niveau de l'alcool. J'espérais seulement qu'il ne me serait pas donné d'esquinter sa tire contre une poubelle si j'avais à me tirer de là rapidement. Je l'espérais car autant le chapeau mou du gars planqué là-bas sous le porche ne me faisait pas peur, autant les hurlements d'un Mike touché dans sa chair par objets interposés m'angoissaient par avance.

Mais comment avais-je réussi à me fourrer dans ce pétrin ?

Moi que l'on qualifiait sans hésitation de Grand parmi les grands il y a quelques semaines encore, j'étais décidément tombé bien bas. Mais au diable les apitoiements, l'heure de songer à la défaite n'était pas encore arrivée. Tout comme utiliser ce genre de vocabulaire ne se trouvait pas dans mes habitudes non plus. Alors attendez donc la suite avant de porter un premier jugement, voulez-vous, revenons plutôt aux prémices de cette histoire.

"Té ! Personne ne te connaît ici, Scoti ! L.A est trop grande pour toi, trop neuve aussi. Je dirais même que t'es mieux qu'un fantôme dans le coin alors y'aura personne pour te chercher des crosses. Le deal, c'est tout simple : faut juste filer discrètement la gonzesse. Et ça c'est un truc que tu sais faire non ? Puisqu'il parait que tu es plutôt bon privé... Alors tu la prends en charge à son hôtel et promis-juré, elle te mènera au baisodrome secret du Vioque aussi surement que deux et deux font quatre. Le seul risque que tu prends c'est de devoir t'enfiler un verre dans chacun des bars où elle s'arrêtera. Sinon, c'est coton. Ensuite, une fois là-bas, tu m'appelles, tu nous dis où ça se trouve et c'est tout. Allez tiens, voilà $200. Et y'en aura 300 de plus quand le job sera over."

Bon, je vous raconte ça de tête et y'a surement des détails qui pêchent. Dans l'esprit en tout cas, on en est pas très loin. Ouaip, à quelques chouias près, ça avait été les mots du type qui m'avait accosté entre deux gorgées de whisky offert par Mike pour fêter mon retour à L.A.

Mais toujours entre nous, le plus dingue ce n'est pas d'avoir laissé l'autre abruti terminer son monologue, c'est surtout d'avoir pu répondre Banco ! et lui serrer la pogne sans la moindre hésitation.

Et pourquoi cet empressement ? Parce que j'en avais besoin de ces $500. Une vraie nécessité, et si urgente qu'elle m'avait fait ignorer un à un tous les signaux d'alerte qui s'étaient allumés dans ma caboche, oubliant au passage les fondamentaux les plus élémentaires...

Car le soir même, effectivement, comme annoncé, aussi surement que deux et deux font quatre, la plantureuse poule sur talons aiguille m'avait fait son petit numéro de ricochets. Trois bars enquillés au rythme d'un par heure, pour m'amener aux alentours de deux plombes du mat devant un bel immeuble rouge-briques logé au creux d'une rue calme.

Comme prévu.

Sauf qu'une fois là-bas, toujours aussi surement que deux et deux font quatre pour continuer avec l'expression de l'autre con, une bagnole s'était pointée et un flingue au bout d'une main gantée avait descendu la fille par le carreau baissé.

Et qui se trouvait au volant de la vieille Oldsmobile stationnée dans les parages quand les costards cintrés du Vioque s'étaient amenés en urgence après les coups de feu ?

Bingo ! Scoti l'ex-roi des privés de San Francisco !

Et qui était toujours planqué dans la voiture, à quelques dizaines de mètres à peine, frein à main dans les cotes depuis une demi-plombe, attendant que l'agitation retombe ?

Re-bingo ! Toujours Scoti, le tout nouveau roi des pigeons de L.A !

Et pourquoi viens-je précisément d'utiliser ce mot pigeon ?

Parce que j'ai bien l'impression de m'être fait avoir. Ça fait d'ailleurs pas un pli.

Car sur ce coup précis, je me suis fait entuber tant et si bien que désormais, y'a plus que deux choses dont je suis certain : primo c'est que ma carrière de privé à L.A débute plutôt mal; et deuzio, c'est que même si je reste le pigeon dans c't'affaire, le gros nase avec ses manières d'apprenti limier là-bas sous son porche, et ben il a beau planquer son globe dans l'ombre, le reste de son auguste personne demeure toujours bien éclairé par le lampadaire. Or quand il sort son tire-jus pour s'essuyer le front, on ne voit plus que sa plaque côté ceinture. Un bronze étoilé qui lance de beaux rayons lumineux partout aux alentours. Et voyez-vous, les insignes, j'en ai une sainte horreur, presque une seconde nature chez moi, surement une des raisons également pour laquelle j'ai déserté aussi rapidement les instances officielles autrefois. J'en ai horreur car les représentants de la loi se cachent trop souvent derrière leur plaque, oubliant au passage que ce sont bien les cojones qui font le flic, jamais l'insigne. Et ouais, je hais autant les plaques que je les connais par cœur. Je les connais même tellement bien que je suis capable de les reconnaitre à des dizaines de mètres de distance. Alors devinez donc à quel poulailler appartient précisément la gabardine et le chapeau en feutre là-bas sous le porche ? Et ouais, c'est bien un fantassin de ce fichu presbytérien de Hoover !

Alors je vous le dis donc très simplement : deux et deux font bien quatre, je ne me permettrai pas de remettre ça en doute, je n'suis pas mathématicien, Dieu m'en garde. Mais par contre ce dont je suis certain, c'est que cette galère qu'on m'a balancée dans les pattes, c'est tout sauf un hasard. Parce qu'entre la gigolette allongée sur le macadam, le Vioque furibard là-haut au balcon et le FBI qui lorgne ma voiture, ça ne m'évoque qu'un truc. Un truc du genre Le hasard ? mon cul !

Et j'imagine que vous comprenez très bien...

  • salut wic ... tu repars dans les bas-fonds de LA ? je l'avais déjà lu ce texte ... j'aime bien l'ambiance et vais découvrir ka suite avec plaisir !

    · Il y a environ 11 ans ·
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    woody

    • Salut ami du green (quand j'écris ça, je repense à Ruby Rhod dans le 5eme élément... n'importe quoi !).
      Bon, juste te dire que je suis entrain d'écrire la suite (donc à partir du chapitre 7 mis en ligne ce matin).
      pour les épisodes 3 à 6, je me tate, je sais pas encore si je vais les recoller ici... on verra...

      · Il y a environ 11 ans ·
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      wic

    • En tout cas, merci d'avoir fait le détour par la Provence ce midi..
      (et je te dis pas Ciao Pantin des fois que tu le prennes mal ;-)
      A bientôt.

      · Il y a environ 11 ans ·
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      wic

    • tu as raison c'est génial si tu nous mets l'épiode 7 puis le 3 puis le 5 puis le 4 .... ça va être facile à suivre ... on dira que ce sont des flash back ...

      · Il y a environ 11 ans ·
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      woody

    • non, j'ai mieux: je vais mettre en ligne que les chapitres correspondants aux nombres premiers :-)

      · Il y a environ 11 ans ·
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      wic

  • Ah cool !! Bon, bah moi j'attends les nouveaux chapitres :D

    · Il y a environ 11 ans ·
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    octobell

  • Déjà lu non ? Ca swingue, bon rythme on a envie de te suivre. J'ai vu des coquilles je te les envoie par mp

    · Il y a environ 11 ans ·
    Tyt

    reverrance

    • effectivement, sur mon autre compte... je voulais juste voir ce que ça faisait avec le nouveau site... probable que je les (r)enlèverai dans quelques temps...*
      merci pour le détour par ici.

      · Il y a environ 11 ans ·
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      wic

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