Le karatékaman

Hervé Lénervé

Le karaté un art martial offensif, non-inoffensif, se pratiquant entre deux compétiteurs qui se tapent sur la gueule dans les règles de l’art nippon.

-         Ah, monsieur... prenez un siège. Non, pas celles du fond, celles devant mon bureau, c'est plus pratique pour discuter.

-         Cool !

-         Oui, monsieur... monsieur... permettez-moi de vous appeler, Momo, car votre patronyme accroche un peu, pour les profanes. Oui ! Je vous rassure, tout de suite, je ne vous ai pas invité à venir me voir pour le poste. Non, seulement pour satisfaire ma curiosité et pour vous épargner quelques erreurs sur votre présentation, qui réduiraient fatalement vos prochaines recherche d'emploi à l'échec fatal : GAMME OVER.

-         Ouais, moi, c'est pour le poste, moi, quoi ?

-         Taisez-vous Momo, quand les grandes personnes parlent ! Comme je vous le disais, avant d'être promptement interrompu, ne mettez pas votre adresse sur votre CV, « 23 ter, rue Staline, cité des 4000 ». C'est plombé ! Mettez quelque chose de plus glamour.

-         Attends, bouffon, moi j'ai des potes, cité 4000. On va te les faire les 4000 coups.

-         Taisez-vous Momo, où j'appelle la Sécurité ! Non, mais alors, l'effronté ! Donc, ensuite, votre lettre de motivation toute en petites lettres découpées dans le journal. Mauvais genre, trop daté, on ne le fait plus, ça. Toi, comprendre ?

-         Pour le poste, c'est bon, alors ?

-         Et la signature ; « Un ami qui vous veut encore du bien. » Trop roman de gare.

-         Je suis ceinture noire de karaté.

-         C'est bien ! Mais nous, on a besoin d'un manutentionnaire débonnaire pour bouger des caisses.

-         Et pourquoi tu les promènes tes caisses. C'est pas des pitbulls, eh, l'autre bouffon, lui !

-         Oui, l'écrit, est nul ! Mais il y a l'oral à travailler aussi.

Bouffon n'est autorisé que si la personne s'appelle, elle-même, Bouffon par nécessité et en ajoutant un « monsieur » devant. Mais pour ma part, il vaut mieux s'en tenir juste au « monsieur ». Car la personne, tout Bouffon qu'elle soit, doit savoir, malgré tout, que son nom est à chier. Compris, Momo ?

-         Good ! C'est bon, alors ?

-         Pour finir sur votre présentation. Les écouteurs, ce n'est pas recommandé !

-         Vas 'y, bouffon, j't'capte quand même cinq sur trois.

-         Et le chewing-gum, mâché la bouche ouverte, fortement déconseillé.

-         C'est pas un Chewing-gum, bouffon, c'est du shit !

-         Sans exiger le costume cravate, des pantalons couvrant vos fesses seraient appréciés.

-         C'a s'porte comme ça, c'est la mode des djeuns de porter l'djean ras du cul ! T'as jamais sorti de ta mosquée toi, l'bouffon !

-         Ecoutez, monsieur Momo, nous n'avons pas gardé les bouffons ensemble, j'appelle la Sécurité !

-         Mais lâchez-moi, lâchez-moi, bande de bouffons ou je vais vous faire du karaté !

Les Agents de Sécurité n'étaient pas initiés au karaté. Ils massacrèrent Momo, sans aucun style. Un carnage mal fait, sans chorégraphie, sans poésie, ni art nippon, ni rien.

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