Le livreur de pizza

Hervé Lénervé

Le livreur de pizza sonne toujours trois fois.

Manches levées, OK. Montre retirée, OK. Eau tiède, OK. On peut se laver les mains.

Oui, les petits gestes du quotidien que l'on fait sans y penser, en fait, le cerceau, lui les pense.

Oui, le cerveau est con, bête et discipliné, il suit la procédure.

Maintenant, si ça lui dit de perdre son temps, c'est son problème. Mais qui devient le mien. Car pendant qu'il perd son temps dans ses TOC, il n'est pas là, quand j'ai besoin de lui, pour mes activités cognitives. «  Je lui ai donné dix livres, elle ne m'a rien rendu. Mais combien, il coûtait, ce putain de bouquin ? Merde ! »

Quand le cerveau, n'est pas dans ses procédures, il passe son temps à rêvasser à la fenêtre. Il ferait mieux de tondre le gazon. Mais non, au lieu de se rendre utile, il va nous dire que le gazon prend un « z » et que la pelouse, un « s », alors que c'est la même chose, étrange, non ?

Mais qu'est-ce qu'on en a à foutre de ses problèmes linguistiques ?

En fait, le cerveau aime bien se faire passer pour un intellectuel. Il prend de grands airs inspirés et toise les petites gens. On aurait dû le mettre dans les pieds, il ne ferait moins le fier, ce fat.


Au fait, vous l'avez vu passer, vous, le livreur de pizza ? Non, il n'est jamais venu, le con ! Je vais encore manger des pattes, pathétique !

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