LE MIROIR BRISE

Autant vous le dire tout de suite, je ne suis pas un écrivain caché derrière sa plume à se poser des questions existentielles, taraudé par une tournure de phrase, à le recherche du mot vrai ou du bon mot pour faire sourire son lecteur. L’écriture, je la pratique pour fixer mes idées, cela me surprend toujours de voir apparaître sur mon écran des phrases auxquelles je ne pensais pas cinq minutes auparavant, cela me rassure d’écrire. Peut-être devrais-je aller voir un psy ? Après je n’écrirais peut-être plus, j’écris peut-être pour m’économiser une psychanalyse. Peut-être pour épargner la folie qui guette mon psychanalyste en puissance ? Et si je sombrais dans la folie? On ne s’écrit qu’à soi-même ? Dangereux ?

Facebook, Twittter, oui, bien-sûr ! Mais je ne suis pas celui qui collectionne ses amis sur Facebook ou ses lecteurs sur son site favori. Non, non… Si vous êtes un Geek, passez votre chemin, je ne suis pas du style à commenter les émissions de téléréalité le clavier sur les genoux. J’ai une répulsion pour ces tribus dont le totem est plasma-cathodique.  Cela m’inquiète aussi.

Je ne suis pas non plus un boulimique du papier imprimé, un bibliophage, un rat de bibliothèque, un insomniaque valiumisateur d’ouvrages imprimés.  Mais je salue le livre bien écrit, soigné, convaincant… Celui qui sollicite mon imagination. J’aime être invité par un auteur dans la salle à manger familiale pour y écouter ce qui s’y dit, ou ce qui ne s’y dit pas… Ne sommes-nous pas tous un peu voyeurs ?

Je ne suis pas non plus un webaddict, je n’allume pas l’ordinateur avant de moudre mon café. Ne m’envoyez pas des liens sur des vidéos hilarantes que vous avez recherchées sur Youtube ! Tout cela me fatigue, je n’ai pas la patience. J’ai horreur de perdre mon temps. J’ai toujours quelque chose sur le feu. Je ne sais quoi d’ailleurs. La semaine prochaine, j’aurais un peu de temps, cela ira mieux, c’est la phrase que je me répète sans cesse. Tant qu’il me reste quelque chose à faire, j’ai l’impression d’être débordé, c’est mon côté désordonné. Il y a de la joie dans le désordre, j’adore retrouver des choses que je croyais perdues en cherchant vainement celles que j’ai égarées.  

N’éteignez pas la musique ! Je ne suis pas mélomane, mais il y a quelques cd au milieu desquels je me sens bien. Oh, rien de transcendant mais j’aime me retrouver dans mon univers sonore, ma musique, celle que j’ai intégrée. Je ne suis pas très curieux, c’est mon côté disque rayé. Je préfère réécouter des musiques connues. Enfant, je soulais ma mère pour qu’elle me raconte toujours les mêmes histoires. Cela se terminait toujours par le même sommeil.

Moi, ce que j’aime, c’est me promener, c’est flâner, c’est perdre mon temps mais sans le gaspiller, en profiter pour voir, regarder, m’étonner… Rencontrer quelqu’un, pas pour partager des choses extraordinaires, pas pour qu’il me raconte dans quel pays il est allé traîner son ennui, je préfère qu’il me raconte comment il a embelli son quotidien, comment il s’est fait plaisir, pourquoi la première bouchée est toujours la meilleure, pourquoi un paysage n’est jamais si beau que lorsqu’on l’a traversé à pied.  Les petits faits sont plus savoureux que les grandes épopées.

Je ne crois pas avoir une nature changeante pourtant quand je relis ce texte, je ne m’y reconnais pas, je ne suis plus tout à fait d’accord avec ce que j’ai écrit hier. Au diable, la pâte humaine mouvante et capricieuse! Béni soit le temps où les auteurs seront des machines ! Finis les temps passés dans les rayonnages des bibliothèques pour retrouver au détour d’une page cette réflexion qui nous touche, cette phrase qui fait vibrer ces fibres, quelque part, tout au fond.

Oh et en plus, je m’aperçois que je ne vous ai pas parlé de ceux qui m’entourent. Ne m’accusez d’être narcissique ! Si vraiment  je l’étais, je ne m’en serais même pas aperçu.