Le Monde des Méchants
Y K
Quand j'étais petit, le trio de tête de la hiérarchie des Méchants était composée d'Adolf Hitler, de Jean Marie Le Pen et de Dark Vador. Mais bon au fait, le seul vrai méchant vivant, c'était Jean Marie Le Pen.
Dans mon imaginaire de gosse de cinq ans franco-marocain, un type avec un œil de verre qui réclamait le départ de mon père et questionnait ma légitimité au statut de français alors que j'avais les meilleures notes en dictée était beaucoup plus proche d'un méchant de James Bond que d'un politicien.
Et le fait que ce personnage effrayant fut breton, loin de faire appel à la fierté régionale légendaire de notre peuple bruyant et alcoolique dont je partageais farouchement les valeurs (moins l'alcoolisme à l'époque), ne le rendait que plus inquiétant. Assurément, un type pareil ne pouvait être digne de confiance.
Le Pen, c'était donc une sorte de mal à l'état pur, un breton renégat qui m'enseigna dès mon plus jeune âge une des leçons fondamentales que je devais par la suite confirmer lors de mes pérégrinations sur les cinq continents : il y a des méchants partout.
En face de chez nous vivait une famille de racistes.C'est d'ailleurs à peu près tout ce que je savais sur eux, « Les racistes» étant l'expression officielle pour les désigner. Cette paisible famille de français de souche qui vouait une haine viscérale au symbole de déchéance patriotique que je représentais à leurs yeux était à l'époque précurseur d'un style dont tout le monde ignorait qu'il serait un jour la tendance ultime: le fascisme affiché.
En effet, en ces temps reculés qu'étaient les années 80, les partisans de Le Pen, minorité dérisoire, inspiraient au mieux la pitié, au pire le dégout. Pour moi, ils étaient un peu comme des mini méchants, ou comme nous avions l'habitude de les désigner dans les jeux vidéos ou les films d'actions asiatiques avec mon frère, les « méchants minables », clique suiveuse du Chef suprême, ramassis inutile qu'on bute en 2 secondes mais que quand même ils sont chiants parce qu'il y en a plein.
Et dans mon petit bled breton où le seul noir était adopté et ma famille le deuxième élément exotique du cadre, il y avait à vrai dire fort peu d'occasions de faire son coming out raciste, et les méchants minables n'étaient que peau de chagrin.
En bref, tout le monde s'en foutait un peu.
Aujourd'hui… ben tout le monde s'en fout encore.
Sauf qu'ils sont vraiment plus nombreux qu'une petite famille dans un bled de 6000 habitants. Au fait, ils sont vraiment, vraiment beaucoup. 30%, c'est autant que le nombre d'obèses aux Etats Unis.
Alors oui, quand on dit obèse ça veut pas forcément dire « bibendum de 210 kilos », c'est juste du surpoids, encore des exagérations de médecins censées filer un coup de flippe à la populace, des conneries tout ça. Mais bon, quand tu rentres dans cette catégorie, ça veut quand même dire que t'es pas vraiment au top niveau santé. Que si t'es en surpoids à 30 ans, il y a de bonnes chances que tu deviennes effectivement un bibendum à 50.
Donc les obèses pas obèses, faites attention.
Et les voteurs du FN pas racistes, faites gaffe aussi, c'est trop pas cool d'être un méchant minable dans un jeu vidéo pourri.
J'ai dévoré votre texte. Merci pour cette lecture !
· Il y a plus de 7 ans ·damephoenix
merci :)
· Il y a plus de 7 ans ·Y K
oui il y a des empêcheurs de bonheur en rond partout qui veulent te dire comment penser comment respirer comment écrire ... viens on va leur casser la gueule à la récré - une fraîcheur de ton qui fait du bien merci pour ce texte
· Il y a presque 9 ans ·Marie Guzman
Les bretons résistent, irréductibles, et pour une fois j'suis content d'habiter en Bretagne, il y pleut plus certes qu'en région Paca, mais le climat y est plus sain...
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
Peutête c'est lié va savoir...
· Il y a presque 9 ans ·Y K