Le papillon

Lev Hamels

Quand j'étais enfant, les papillons étaient pour moi un petit enchantement, le genre de miracle qui importe peu, et que l'on oublie dans la minute.

Quand j'étais jeune adolescente, les papillons se déchaînaient dans mon ventre, quand les yeux d'un autre m'électrisaient, et faisaient battre mon cœur comme un tambour sans métronome.

Il y a encore quelques mois, les papillons étaient un symbole, parmi les autres. Ils ne m'importaient pas plus que ça.

Et puis aujourd'hui, le papillon me hante, et je crois bien que mon papillon à moi a des aiguilles empoisonnées en lieu de pattes. Je crois que mon papillon à moi est carnivore, et plus je me prive de nourriture, plus il aspire la substance de mon corps. D'abord la graisse, puis les muscles, et fait parfois de petits trous dans mes os. Ce papillon, c'est un hématome violacé dans mon psychisme obsédé par toute cette nourriture, que je désire et redoute en même temps. Et puis il fait des enfants, ce papillon, et si tout à commencé par un papillon suceur de sang, aujourd'hui c'est mon corps tout entier qui est recouvert de papillons acides qui en veulent toujours plus. Et pourtant, je m'accoutume à leurs piqûres, et pourtant, bien que j'en souffre, je ne veux surtout pas qu'ils partent...

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