Le patrimoine de Léon.

J'aurais du racheter la vie de Léon. Sur Leboncoin elle était à vendre ou à échanger contre 3000 mètres carrés de terrain sur une plage. N'ayant pas la plage, j'avais le pognon dans une grosse paire de chaussettes à la banque pour si jamais.

Léon a passé sa vie à voyager un peu de partout quand d'autres se sont bien fait chier à travailler dedans pour essayer de lui donner un sens économique et social.

Léon, avec son petit camion aménagé, partait pour petit-déjeuner sur des levers de soleil qu'aucune carte postale n'avait réussi à représenter, se brossait à son rythme les dents dans son rétroviseur avant d'avaler les premières bouffées d'une Lucky Strike pour en extraire quelques volutes, et disait-il, « tapisser ses poumons de motifs mortifères », puis faisait un rapide tour d'horizon du monde sur son smartphone pour prendre un peu de ses nouvelles tout en se foutant grave de la hausse du paquet de clopes ou des aides de l'état quant à l'isolation des combles pour 1 €, préférant taper sur le pare-chocs de son engin mobile la crotte de dessous ses bottes tout en repensant à la pêche à pied d'hier, à celle où il aurait dû plus aller vers les rochers de la pointe pour en cueillir des huîtres, et que le petit blanc Muscadet qu'il s'était mis de côté pour cette occasion et qu'il transportait depuis son stop au Leclerc de Pornic, serait pour un autre jour, que finalement le pâté en croûte du coin, accommodé de quelques cornichons sauvages aux vertus essentielles du vinaigre de cidre, avait tout aussi bien fait son effet.

La maison de Léon, perchée dans une ossature bois et moulée sur une structure en acier ...