LE RENDEZ-VOUS TINDER

Véronique Simonnet

Elle arrive avec des pansements sur tout le visage. On dirait qu’elle a une couche sous ses vêtements, elle marche avec difficulté.

Plus jamais. Vous m'entendez, plus jamais ça ! Y en a t'il parmi vous qui sont sur Tinder ? Bien sûr, si vous êtes venus avec votre copine ou copain, vous n'allez pas hurlé « Ouiiiii ! Moi ! Moi ! » donc, seuls les célibataires répondront. Que ceux qui sont sur Tinder lèvent la main ! Peut-on éclairer la salle ? Voilà, repérez-vous, je vous offre un Tinder speed dating occulaire gratos, profitez-en !

Mais méfiez-vous, car c'est Tinder qui m'a rendu comme ça !

L'air pensive et nostalgique.

Pourtant au début, cela avait bien commencé. Je flashe sur un homme de monâge, ultra canon, genre mannequin abdo, des yeux tendres et lumineux, un sourire solaire, la TOTALE ! Pas dans ma catégorie me dis-je, et ben si, bingo, il l'est ! J'aurais dû me méfier. Mais j'étais déjà privé de toute réflexion carthésienne alors j'ai matché. Il a matché ; J'ai re matché. Wouaou, le gars joueur et inventif il a re matché ! Wouaou, j'ai tout de suite compris qu'en fait il me disait « c'est fou on est totalement sur la même longueur d'ondes, c'est comme si je te connaissais depuis toujours ! Dans la demi heure qui suvait on buvait le premier verre et au bout du dixième TGV (Téquila, Gin, Vodka) on s'arrachait nos vêtements caché derrière un porche.


J'étais en forme, j'étais fraîche, j'étais parfaitement bien épilée. Après m'avoir embrassée comme un dieu, il m'a sussurré à l'oreille, avec sa voix si chaude, « je ne me suis pas rasé depuis quelques temps, cela te dérrange ? ». Je n'étais plus chaude comme la braise, j'avais atteint la température de la lave en fusion. Décidée à le rassurer, je me dis, une petite pipe.. Montrant son visage : Voilà le résultat. J'ai bien senti que ça grattait un peu..mais sans plus. On s'est embrassé avec une telle fougue que j'ai cru que le sang sur mes lèvres venait de là. Lui, quand il a vu ma tête, ça l'a littéralement galvanisé ! Il m'a retournée aussi sec et à l'assaut ! Franchement, c'était bon au début, même si ça grattait. Mais de gratter je suis passée à baiser avec des oursins ! Puis l'étape du feu, pour finir par l'acide ! Je ne sais si c'est l'étape oursin qui m'a fait dessaouler, mais je n'étais plus du tout dans le « délire grattage » ! J'ai voulu l'éjecter, mais il s'est mis dos au mur en me cramponnant comme un malade, et en me disant que j'étais le meilleur coup de sa vie.

Cela doit être le mot coup. j'ai pris sa tête entre mes deux mains et je l'ai frappé contre le mur pour qu'il s'arrête. J'ai dû frapper un peu trop fort, parce qu'il a glissé tout doucement le long du mur avec moi dessus et n'a plus bougé. Non, non rassurez-vous, je ne l'ai pas tué ! A la réflexion, j'aurais peut-être dû. Parce qu'il s'était évanoui et qu'on était collés ! J'ai dû appeler les urgences et leur expliquer le problème. Comment décrire la situation ? Je me suis envoyée en l'air avec une râpe à gruyère ultra aiguisée et qui est tombée en panne ? (Gros soupir, on sent le profond abattement). Bref ils sont venus, et voilà : trois mois d'arrêt maladie, le temps que ça cautérise.

La souffrance physique vous transcende et j'en suis venue à me poser cette question existentielle : et si je ne m'étais pas épilée ? Soit j'aurais été mieux protégée par ma propre pilosité, soit il ne m'aurait pas sauté dessus et cramponner tel un chien en rut. Et si lui ne s'était pas épilé ? Aucun poil de longueur respectacle n'est abrasif comme de la chaux vive. Ca vous dégoûte ? Je préfère ça à ce que je vis depuis. Je tourne au tramadol. Je reste debout u couchée sur le ventre. J'ai l'impression qu'un sadique me tatoue au bambou les fesses, l'entrejambe et le visage, vingt quatre heure sur vingt quatre. Je n'en peux plus ! Non, plus jamais ça !

D'ailleurs j'ai jeté tout ce qui me servait à m'enlever les poils, je les laisse pousser. Je me demande même si je ne vais pas faire une cure de taurine et m'injecter des hormones mâles pour accélrer la pousse !

L'air traumatisé et déterminé Nan, plus jamais ça.

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