L'écologie moderne.

Christophe Hulé

Les loups ont mal aux côtes à force de se marrer.

Les écolos ont prévu de compenser les bergers pour les « prélèvements ».

Non seulement on les laisse festoyer, sans trop de risques, mais en plus, il n'y a pas d'addition.

Ils sont sympas quand même ces écolos modernes avec leur coiffure en balais d'chiottes.

Pour toucher les subventions, les bergers attachent les chiens et regardent la meute avec une calculette. Une affaire qui marche, comme autrefois les quotas laitiers.

Avec un tel système, on a même réintroduit les ours en quantité industrielle.

Ça coince un peu pour les randonneurs mort aux champs d'honneur.

Bon, le risque zéro n'existe pas, petits dommages collatéraux, mais c'est le business qui l'emporte.

D'ailleurs, marcher c'est con, enfin perso ça me fait chier, je préfère un bon match à la télé bières-pizzas-potes. Comme disait Coluche : « sportif va ! ».

Les chasseurs râlent évidemment, on a rien prévu pour eux, toutes ces cartouches perdues c'est un budget quand même.

Ils ont qu'à moins picoler.

Pour les calmer, on leur a accordé leur quota de randonneurs.

Les petits maires s'en mettent plein les poches.

Même les bled perdus dans le trou du cul du monde, construisent à milliards des centres culturels dignes du temps des pharaons.

Comme y a pas assez d'public, on éveille les animaux de ferme à la culture classique, il paraît que ça augmente le bien-être et le rendement.

On arrête pas l'progrès.

Avec tout ce bordel, les parisiens sont retournés en ville.

Les coqs sont autorisés à chanter, les cloches des églises sonnent toutes les heures, on tolère à nouveau le bon air de la campagne, bouses, purin, et autres délices.

Les fermes ont des grilles comme au Luxembourg, avec des allées de gravillons et des statues partout.

Les ranchs américains paraissent bien petits.

Les touristes étrangers affluent dans la Creuse, au cul des vaches.

Les start-up ont racheté des granges.

Bon, le revers de la médaille c'est les périmètres ultra-sécurisés pour contenir toute cette faune.

Les gosses rentrent de l'école en jeep, comme en Afrique, où on a envoyé des experts.

La campagne française est devenue un vaste zoo naturel, et le réchauffement climatique a permis d'introduire à peu près toutes les espèces.

Ce qui, naturellement, a relancé le tourisme local, plus besoin de voyager 24 heures, au bas mot, pour voir des lions ou des rhinocéros.

Là encore, les chasseurs ont tiqué, ils voient leurs rangs se décimer.

Pour les calmer, on leur a fourni des chars d'assaut pour les lapins ou les palombes. 

Dans cette logique exponentielle, on a multiplié les cimetières pour randonneurs et facilité les tracasseries administratives pour indemniser au plus vite les proches.

Aux dernières nouvelles, la bête du Gévaudan s'est fait bouffer par un python gigantesque, on attend plus que King Kong.

Ben quoi, on peut bien rigoler.

Incidemment, le bon peuple des HLM, ou autres forteresses de béton, a retrouvé le charme et l'avantage de vivre en hauteur.

Une autre faune ne sévit plus aux pied des immeubles, et pour cause, tous ont été bouffés.

Le ravitaillement se fait par un système compliqué de poulies dans les airs.

Tous en télétravail et peinards.

Les portes sont ouvertes pour qui veut entrer et c'est la fête tous les soirs, à tous les étages.  

Les vieilles et les vieux, jadis isolés, ont gagné au moins dix ans, au bas mot.

Et vive l'écologie moderne !

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